
Le principal candidat asiatique pour la papauté, l'ancien archevêque de Manille Luis Antonio Tagle, est une figure modérée, souvent surnommé le « François asiatique » du fait de son engagement auprès des personnes défavorisées.
Comme le pape François, le cardinal Tagle, 67 ans (né le 21 juin 1957) est en pointe dans la défense des pauvres, des migrants et des personnes marginalisées.
Cet homme charismatique aux lunettes rectangulaires, à l'allure juvénile et au sourire facile, surnommé « Chito », est populaire chez les quelque 90 millions de catholiques des Philippines, un pays profondément religieux.
Né dans une famille modeste près de Manille, il a été ordonné prêtre en 1982 et est devenu archevêque de la capitale en 2011, une fonction influente dans l'un des plus grands diocèses d'Asie, où le catholicisme est en croissance.
Créé cardinal par Benoît XVI en 2012, il avait été considéré comme un possible candidat lors du conclave de 2013 ayant abouti à l'élection de François.
Signe des liens étroits entre le pape et l'évêque le plus en vue d'Asie, le cardinal Tagle a été nommé en 2019 à la tête d'un département important du Vatican, la Congrégation pour l’évangélisation des peuples.
Après la réforme de ce secteur clé, il a été nommé par François en 2022 à la tête de la section pour « la première évangélisation et les nouvelles Églises particulières », avec la responsabilité des nouveaux diocèses dans les terres de mission.
Brillant orateur
Mgr Tagle est connu pour sa proximité avec les fidèles, n'hésitant pas à parler avec eux après la messe ou à inviter des mendiants à dîner chez lui.
Son adaptation à Rome et aux usages du Vatican n'a pas été facile. Il avait confié peu après son arrivée en 2020 qu'il faisait « souffrir les Italiens » en écorchant leur langue.
Brillant orateur doté d'une voix douce, Tagle, connu pour sa franchise et son humour, n'hésite pas à recourir à l'autodérision dans ses homélies.
En tant qu'archevêque de Manille (2011-2019), Tagle s'est exprimé contre la guerre sanglante contre la drogue lancée par le président philippin à l'époque, Rodrigo Duterte.
« Nous ne pouvons pas gouverner le pays en tuant », avait-il ainsi estimé en 2017.
Tagle milite également pour une Église plus humble et plus ouverte aux préoccupations des fidèles. Lors d'une réunion au Vatican en 2019 sur la lutte contre la pédocriminalité, il avait mis en cause les plus hauts responsables de l'Église.
« Des blessures ont été infligées par nous, les évêques, aux victimes et en fait à tout le corps du Christ », avait-il lancé.
« Notre absence de réponse à la souffrance des victimes, qui va même jusqu'à rejeter celles-ci et à couvrir le scandale pour protéger les auteurs (des agressions, NDLR) et l'institution, a blessé notre peuple, laissant une profonde blessure dans notre relation avec ceux que nous devons servir », avait-il déploré.
Il lui a cependant été reproché de ne pas s'attaquer suffisamment au problème aux Philippines.
Des interrogations ont aussi surgi sur son degré de connaissance autour de l'emploi, par Caritas en Centrafrique, de Luk Delft, un père belge précédemment condamné pour des faits d'agression sexuelle sur mineurs.
Le cardinal Tagle a été président de Caritas Internationalis, la deuxième plus grande association caritative mondiale, de 2015 à 2022, date à laquelle lui et le reste de l'équipe dirigeante ont été démis par François après qu'un audit conduit par le Vatican eut révélé des « déficiences » dans la gestion et les procédures.
En juin 2023, le pape l'a nommé envoyé spécial au Congrès eucharistique national de la République démocratique du Congo.
Il a exercé un rôle similaire lors de la Conférence générale de la Fédération des conférences épiscopales d’Asie (FABC) à Bangkok en octobre 2022.
Le cardinal a confié qu'il ne s'était jamais considéré comme un homme d'Église de haut rang. « Si j'étais Dieu, je ne me choisirais pas pour être évêque ou cardinal », avait-il dit dans une interview en 2018.
Par Cecil MORELLA avec Alexandria SAGE à Rome / AFP
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