Libye: nouveaux combats entre milices à Tripoli
©MAHMUD TURKIA/AFP

Des affrontements ont opposé de mardi soir jusqu'à mercredi après-midi des groupes armés à Tripoli dans des secteurs densément habités de la capitale, après des combats ces derniers jours ayant fait au moins six morts.

Ces combats violents concentrés dans l'ouest de la capitale ont connu une accalmie en fin de journée, selon les télévisions et des habitants contactés par l'AFP.

Toute la nuit et la matinée, ils ont fait rage "à grande échelle entre la Force Radaa et la Brigade 444", selon un responsable du ministère de l'Intérieur, évoquant des tirs à l'arme lourde: mitrailleuses et lance-roquettes.

Le groupe armé Radaa n'est pas sous l'autorité du chef du gouvernement de Tripoli Abdelhamid Dbeibah, tandis que la Brigade 444, rattachée au ministère de la Défense, le soutient.

Aucun bilan officiel n'a été donné mais le Croissant rouge libyen a récupéré un corps dans un véhicule endommagé. Des internautes ont diffusé des images de voitures calcinées et d'importants dégâts aux habitations et commerces du centre ville.

Mercredi avant la tombée de la nuit, quelques épiceries et boulangeries ont rouvert brièvement tandis que les établissements scolaires sont restés fermés.

Le déclencheur des nouveaux combats a été, selon les experts, le démantèlement annoncé par M. Dbeibah de Radaa, mardi, en même temps que celui d'organes sécuritaires contrôlés jusqu'alors par un autre puissant groupe armé, le SSA (Autorité de soutien à la stabilité) dont le chef Abdelghani "Gheniwa" el-Kikli a été tué lundi soir.

Mercredi soir, plus de 500 personnes ont manifesté dans le quartier de Souq el-Joumaa, fief de Radaa en criant des slogans contre le gouvernement de Dbeibah, dénonçant "une agression injuste", en référence à la dissolution du groupe.

Basés dans l'est de la capitale et près de l'aéroport, Radaa ("dissuasion") est un groupe plutôt respecté qui réunit des salafistes qui font la police et arrêtent aussi bien des trafiquants (drogue, alcool) que des affiliés de l'organisation Etat islamique.

En soirée toujours, cinq ambassades (Allemagne, France, Etats-Unis, Grande-Bretagne et Italie) ont appelé les "autorités à protéger les civils" et à "restaurer immédiatement le calme dans l'intérêt de tous les Libyens".

Auparavant, la Turquie, qui soutient le gouvernement de Tripoli, avait inhabituellement diffusé un communiqué pour appeler "toutes les parties à mettre en oeuvre sans délai un cessez-le-feu et à engager un dialogue".

La Mission de l'ONU en Libye (Manul) a également exigé l'arrêt des combats, exprimant sa "profonde préoccupation" face à "une situation qui pourrait rapidement devenir incontrôlable".

Minée par les divisions depuis la chute et la mort du dictateur Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye est gouvernée par deux exécutifs rivaux: celui de M. Dbeibah reconnu par l'ONU, et un autre dans l'est, contrôlé par le maréchal Khalifa Haftar.

Malgré un relatif retour au calme ces dernières années, des luttes d'influence opposent régulièrement une myriade de groupes armés, particulièrement à Tripoli et dans l'ouest libyen.

Le ministère de la Défense a assuré avoir décrété "un cessez-le-feu sur tous les fronts dans le but de protéger les civils et préserver les institutions", affirmant avoir positionné des forces dans la capitale.

Dans un communiqué, la représentation européenne à Tripoli a exprimé "son soutien fort à l'annonce d'une trêve et à la désescalade des tensions qui devrait s'en suivre".

Dans la nuit de lundi à mardi, au moins six personnes avaient été tuées, selon un bilan officiel, lors de combats opposant la Brigade 444 au SSA, devenu ultra-puissant et une menace pour le Premier ministre, selon les experts.

Les affrontements avaient éclaté après l'annonce lundi de la mort de "Gheniwa", abattu dans "une embuscade" selon sa famille alors qu'il s'était rendu dans une caserne de la Brigade 444 pour une médiation.

Selon l'analyste Jalel Harchaoui, la situation est "plus dangereuse qu'en 2011, 2014 et 2019" en raison de l'arrivée au centre de Tripoli "de plus en plus de factions" armées.

La Force Radaa bénéficie, selon M. Harchaoui, du renfort de troupes venues de Zawiya, ville située à 45 km à l'ouest de Tripoli et de Zintan (sud du pays). Alors que les groupes fidèles à M. Dbeibah sont épaulés par des brigades arrivées de Misrata, ville natale du Premier ministre.

Avec AFP

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