
Sous pression pour arracher un accord commercial avec les États-Unis, les Européens réunis en sommet jeudi ont cherché la formule pour apaiser Donald Trump sur ce front, après avoir consenti une hausse historique de leurs dépenses militaires à l'Otan.
«Nous avons reçu aujourd’hui le dernier document des États-Unis en vue de poursuivre les négociations. Nous sommes en train de l’évaluer», a annoncé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
Le chancelier allemand Friedrich Merz l’a «encouragé à parvenir rapidement à un accord».
Le dirigeant de la première économie européenne veut aller vite, quitte à accepter un accord asymétrique dans lequel les Européens accepteraient de subir certaines surtaxes, sans contrepartie.
Personne à Bruxelles ne pense que l’ambition du «zéro droits de douane» soit atteignable. Selon plusieurs diplomates européens, l’objectif est plutôt de permettre à Trump de revendiquer une victoire, sans sacrifier l’essentiel.
L’un d’eux a évoqué la perspective d’un accord «gruyère», avec de nombreux trous. L’UE pourrait se résigner à une taxe générale sur les importations européennes, mais avec une série d’exemptions pour des secteurs clés comme l’acier, l’automobile, la pharmacie ou l’aéronautique.
Un moindre mal pour des entreprises aujourd’hui en grande souffrance face aux droits de douane déjà mis en œuvre par l’administration américaine : 25% sur l’acier et l’automobile, et 10% sur la plupart des autres produits.
«La France défend une conclusion rapide d’un accord, nous ne sommes pas pour que cela dure éternellement», a également insisté le président français Emmanuel Macron, à l’issue du sommet.
«Ni naïfs, ni faibles» face à Donald Trump
Mais, «si à la fin, le choix des Américains était de garder 10% de tarifs sur notre économie, il y aura immanquablement une compensation sur les biens et produits qui sont vendus par les Américains sur le marché européen», a-t-il ajouté, affirmant que les Européens n’étaient «ni naïfs, ni faibles».
Le temps presse alors qu’approche la date limite du 9 juillet fixée par Donald Trump. Faute d’accord après cette date, il pourrait doubler à 20% le taux par défaut sur les importations en provenance de l’UE, voire les porter à 50% comme il l’a déclaré en mai.
Le gouvernement américain a cependant annoncé jeudi que cette date pourrait être repoussée.
«On ne se laisse pas provoquer, on reste calme», a assuré le Premier ministre belge, Bart De Wever, appelant à éviter une guerre commerciale avec les États-Unis.
Emmanuel Macron avait haussé le ton la veille à l’issue du sommet de l’Otan durant lequel les Européens ont concédé une hausse de leurs dépenses militaires à 5% du produit intérieur brut (PIB) réclamée par Donald Trump.
«On ne peut pas, entre alliés, dire il faut dépenser plus» pour la défense «et au sein de l’Otan se faire la guerre commerciale, c’est une aberration», avait-il lancé.
«Le problème, c’est que du côté américain on a un négociateur hors pair alors que l’Union européenne a des dirigeants peu capables», a déclaré jeudi Viktor Orban, adepte de la provocation.
Les Vingt-Sept sont divisés. Le chef du gouvernement hongrois revendique une proximité avec le locataire de la Maison Blanche, comme son homologue italienne, Giorgia Meloni.
Les pays les plus mercantilistes du nord de l’Europe sont aussi plus enclins à éviter une escalade à tout prix.
L’UE avait menacé début mai de taxer pour 95 milliards d’euros d’importations américaines, dont les voitures et avions, en cas d’échec des négociations commerciales avec Trump. Elle a depuis mis cette menace en sourdine.
Les États-Unis profitent aussi de la négociation pour tenter d’arracher des concessions sur les réglementations européennes, notamment dans le numérique, accusées à Washington de cibler les champions américains comme Apple, Google ou Meta.
L’administration américaine voudrait assouplir la mise en œuvre des législations visant à limiter les abus de pouvoir de la «big tech» en matière de concurrence, de contenus en ligne ou d’intelligence artificielle.
Les Européens sont prêts à discuter de normes transatlantiques communes, mais les textes issus du débat démocratique restent une ligne rouge. «Le processus de décision de l’Union européenne» est un sujet «absolument intouchable», avait affirmé lundi Ursula von der Leyen.
Par Daniel ARONSSOHN/AFP
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