Redécoupage électoral : débat relancé au Texas à l’approche des élections de 2026
À l’approche des élections de mi-mandat de 2026, Donald Trump intensifie la pression pour redessiner les cartes électorales dans plusieurs États clés, relançant le débat sur le «gerrymandering» et provoquant la fuite stratégique des élus démocrates du Texas. ©DC POOL / AFP

Cinq sièges supplémentaires au Texas, deux dans l'Ohio, un dans le Missouri : à travers les États-Unis, Donald Trump fait pression pour redécouper les circonscriptions électorales et asseoir sa majorité au Congrès. Et si en face les démocrates tentent bien de riposter, leur arsenal demeure limité.

«J'ai gagné le Texas», s'est vanté mardi sur la chaîne CNBC le président républicain, expliquant qu'avec cette avance lors de la dernière présidentielle, les républicains avaient obtenu le droit et méritaient de décrocher «cinq sièges de plus» lors des élections de mi-mandat de novembre 2026, capitales pour la suite du mandat de Donald Trump.

Avec ses déclarations, Donald Trump illustre une vieille recette de cuisine électorale aux États-Unis, le «gerrymandering».

Cette technique de découpage des circonscriptions, utilisée à la fois par les républicains et les démocrates, vise «à diluer le pouvoir électoral relatif d'un groupe particulier», explique à l'AFP Daron Shaw, professeur de sciences politiques à l'université du Texas.

Ce qui permet en retour de «maximiser le nombre de sièges qu'un parti reçoit», ajoute-t-il, entraînant des résultats inéquitables à l'échelle des États américains.

De ce savant charcutage électoral ressort parfois des circonscriptions aux contours ubuesques, sans cohérence géographique ou de population.

Il entraîne aussi une polarisation certaine. Selon le Cook Political Report, en 2024, seulement 27 sièges pouvaient véritablement basculer démocrate ou républicain sur les 435 que compte la Chambre américaine des représentants.

- Rural et urbain -

Avec une majorité au Congrès qui se compte sur les doigts de la main, et alors que le parti au pouvoir perd traditionnellement du terrain lors des élections de mi-mandat, la Maison Blanche sait que l'horloge tourne.

Ces dernières semaines, Donald Trump a ainsi pesé de tout son poids sur les responsables républicains du Texas pour que ceux-ci proposent rapidement un découpage plus favorable, qui permettrait de remporter 30 des 38 sièges en jeu, contre 25 actuellement.

Présentée la semaine dernière, cette nouvelle carte va rendre les circonscriptions «encore plus discriminatoires sur le plan racial qu'elles ne le sont actuellement», dénonce auprès de l'AFP Dave Jones, président de la coalition d'associations Fair Maps Texas, qui milite contre le «gerrymandering» dans cet État.

Habitant de la métropole de Dallas, il cite l'exemple de sa circonscription, dont les limites seront étendues à des localités bien plus rurales avec la nouvelle carte.

«Le but est de diluer les votes des personnes de couleur dans les zones urbaines», estime Dave Jones, puisque l'électorat afro-américain et hispanique vote traditionnellement en majorité démocrate.

Dans une tentative d'empêcher un vote au parlement du Texas pour entériner ce nouveau découpage, les élus démocrates ont fui dimanche l'État, se réfugiant à Chicago ou à New York. En leur absence, un quorum n'est pas atteint, ce qui a poussé le gouverneur républicain Greg Abbott à les menacer d'arrestation et de déchéance de leur mandat s'ils ne revenaient pas rapidement.

- «Le feu par le feu» -

Au-delà du Texas, l'administration Trump souhaiterait également redessiner en sa faveur les cartes de l'Ohio, du Missouri, ou encore de l'Indiana.

En riposte, plusieurs gouverneurs démocrates ont annoncé leur intention d'en faire de même, comme le Californien Gavin Newsom, qui a dit vouloir «combattre le feu par le feu».

Mais à l'inverse du Texas, où le processus légal permet ce redécoupage relativement facilement, les États démocrates ont pour beaucoup mis en place des garde-fous législatifs, voire constitutionnels. Il sera donc compliqué pour eux de compenser les sièges potentiellement perdus ailleurs.

Pour Daron Shaw, de l'université du Texas, il ne faut pas oublier cependant que la pratique du «gerrymandering» est loin d'être exclusive aux États républicains.

Il cite ainsi son analyse récente, basée sur les résultats de la présidentielle de 2024, qui montre une surreprésentation des démocrates en Californie de 12 sièges et dans l'Illinois de huit sièges ; tandis que les républicains sont surreprésentés principalement en Floride de quatre sièges, et au Texas de trois sièges.

L'argument démocrate selon lequel ce redécoupage des républicains est une menace pour la démocratie, est donc «particulièrement gonflé venant de gens en Californie et en Illinois qui ont un gerrymandering bien plus flagrant qu'au Texas», estime le professeur.

Par Robin LEGRAND

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