Les Irakiens ont commencé mardi à voter pour élire un nouveau Parlement, un scrutin peu susceptible de bouleverser le paysage politique, mais surveillé de près par Téhéran et Washington.
L'Irak a connu une stabilité inhabituelle ces dernières années, après plusieurs décennies de guerre et de répression sous le dictateur Saddam Hussein et depuis l'invasion menée par les États-Unis en 2003 qui l'a renversé.
Beaucoup d'Irakiens doutent que ces élections puissent apporter un changement réel dans un pays qui souffre d'infrastructures médiocres, de services publics défaillants et d'une corruption endémique.
Dès le début du scrutin, en matinée, des personnalités politiques ont néanmoins glissé leur bulletin dans l'urne d'un bureau de vote installé au sein du luxueux hôtel al-Rasheed de Bagdad.
Quatre heures plus tard, des correspondants de l'AFP constataient une faible participation dans plusieurs grandes villes du pays. Les rues de Bagdad, placardées d'affiches électorales, étaient grandement désertes à l'exception de la présence de forces de l'ordre.
Mohammed Mehdi, un fonctionnaire trentenaire qui a voté dans la capitale, souligne que les candidats ont dépensé beaucoup d'argent pour gagner des voix, «ce qui prouve que mon bulletin a de la valeur».
Les bureaux de vote doivent rester ouverts jusqu'à 18H00 (15H00 GMT). Des premiers résultats sont attendus dans les 24 heures qui suivront la fin du scrutin.
Plus de 21,4 millions d'électeurs sont appelés à départager plus de 7.700 candidats, dont près d'un tiers de femmes, pour occuper 329 sièges de députés aux mandats de quatre ans.
Les femmes doivent obtenir au moins un quart des sièges du futur Parlement, selon un système de quotas, tandis que neuf sont réservés aux minorités.
Seuls 75 candidats indépendants sont en lice, la loi électorale étant perçue comme favorisant les grands partis.
«Tous les quatre ans, c'est la même chose. On ne voit ni des visages jeunes, ni de nouvelles énergies» capables «d'apporter un changement», déplore un étudiant d'université, Al-Hassan Yassin.
Postes bien définis
Certains craignent de voir le taux de participation tomber en dessous des 41% enregistrés en 2021, pour ce sixième scrutin depuis la chute de Saddam Hussein.
Les élections ouvrent la voie à la désignation d'un nouveau président - poste largement honorifique réservé à un Kurde - et d'un Premier ministre - traditionnellement chiite - choisi après de longues tractations. Un sunnite occupera le poste de président du Parlement.
Depuis la chute du sunnite Saddam Hussein, la majorité chiite longtemps opprimée en Irak continue de dominer, la plupart des partis conservant des liens avec l'Iran voisin.
L'actuel Premier ministre chiite Mohamed Chia al-Soudani, qui mise sur un second mandat, espère une victoire. Il était arrivé au pouvoir en 2022 grâce au soutien d'une alliance regroupant des partis et factions chiites tous liés à l'Iran.
Absence de Moqtada Sadr
Le prochain Premier ministre sera élu par la coalition qui parviendra à rassembler suffisamment d'alliés.
Lors des dernières législatives, le courant du leader chiite Moqtada Sadr avait remporté le plus grand nombre de sièges avant de se retirer du Parlement à la suite d'un différend avec les partis chiites qui ne soutenaient pas sa tentative de former un gouvernement et qui se sont plutôt regroupés entre eux.
La rupture avait culminé avec des combats meurtriers dans la capitale.
Cette année, M. Sadr a refusé de participer à une «élection bancale, dominée par les intérêts sectaires, ethniques et partisans», appelant ses partisans à boycotter le scrutin.
Les partis sunnites se présentent séparément, l'ancien président du Parlement Mohamed al-Halboussi étant donné favori.
Dans la région autonome du Kurdistan, la rivalité entre le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et l'Union patriotique du Kurdistan (UPK) reste vive.
Téhéran et Washington à l'affût
L'Irak, proche allié de l'Iran et des États-Unis, cherche de longue date à maintenir un équilibre fragile entre les deux ennemis.
L'Iran espère préserver son influence chez son voisin après avoir vu ses autres alliés régionaux (Hezbollah libanais, Hamas palestinien, Houthis yéménites) affaiblis par des frappes israéliennes depuis deux ans. Téhéran a en outre perdu un allié majeur avec la chute de Bachar al-Assad en Syrie fin 2024.
Et l'Irak est sous pression des États-Unis (qui maintiennent quelque 2.500 soldats dans le pays) pour désarmer les groupes pro-iraniens.
L'administration Trump a nommé un envoyé spécial pour le pays, Mark Savaya, d'origine irakienne, qui a insisté sur la nécessité de voir l'Irak «libéré des ingérences étrangères malveillantes, notamment celles de l'Iran et de ses supplétifs».
Avec AFP



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