Bartholomée Ier: «La Turquie n’est pas un environnement hostile pour les chrétiens»
Le patriarche œcuménique de Constantinople Bartholomée Iᵉʳ, assiste à une messe lors de l'assemblée plénière d'automne des évêques de France à Lourdes, le 4 novembre 2025. ©Ed Jones / AFP

La Turquie à large majorité musulmane, qui accueille jusqu'à dimanche le pape Léon XIV, ne constitue pas un «environnement hostile» aux chrétiens, affirme dans un entretien à l'AFP le patriarche Bartholomée Iᵉʳ, primat de l'Église orthodoxe de Constantinople.

«Il serait simpliste de voir des adversaires partout et d'imaginer que la visite du pape consiste à choisir son camp dans un environnement hostile», souligne le patriarche de Constantinople.

Il célébrera vendredi, au côté de Léon XIV, le 1700ᵉ anniversaire du concile de Nicée — aujourd'hui Iznik, petite ville au sud-est d'Istanbul —, considéré comme un moment fondateur pour le christianisme.

En recevant le chef de l'Église catholique jeudi à Ankara, le président Recep Tayyip Erdogan, accusé par ses détracteurs de vouloir islamiser son pays, a affirmé «encourager le respect de toutes les confessions».

Le pape a néanmoins qualifié la Turquie de «carrefour de sensibilités dont l'homogénéisation représenterait un appauvrissement». «Une société n'est vivante que si elle est plurielle», a-t-il insisté.

La Turquie, pays de 86 millions d'habitants, ne compte plus que 100 000 chrétiens environ, conséquence notamment du génocide des Arméniens sous l'Empire ottoman — que nie Ankara — et des échanges de populations et pogroms qui ont poussé le siècle dernier au départ de nombreux Grecs orthodoxes.

Pour Bartholomée Ier toutefois, «vivre dans un pays à majorité musulmane est une bénédiction déguisée: elle renforce la caractéristique essentielle du Patriarcat œcuménique (...) qui est de mener un dialogue ouvert et honnête avec tous les peuples, partout, sans distinction de race ni de religion».

Bénir le bain de sang

À une époque où «le monde est troublé et divisé par les conflits et les antagonismes», la visite de Léon XIV «est particulièrement importante et significative», juge le patriarche de Constantinople, qui exerce une primauté honorifique et historique sur les autres patriarches du monde orthodoxe.

«Cela rappelle à nos fidèles que nous sommes plus forts et plus crédibles lorsque nous sommes unis dans notre témoignage et notre réponse aux défis du monde», estime le plus prestigieux dignitaire des Églises orthodoxes.

Évoquant le patriarcat de Moscou, qui a rompu avec Constantinople après sa reconnaissance en 2018 de l'Église indépendante d'Ukraine, Bartholomée Ier souligne là encore que «la porte du dialogue est toujours ouverte».

Le patriarche, qui avait affirmé en 2022 être devenu «une cible pour Moscou», reste toutefois ferme sur l'Ukraine, exhortant le puissant patriarcat de Moscou, qui a pris l'ascendant sur le monde orthodoxe, à rompre avec le Kremlin.

«Les chefs spirituels en Russie ne peuvent suivre aveuglément les intérêts inhumains et les politiques barbares de leurs dirigeants politiques», assène-t-il.

«Ils ne peuvent pas non plus cautionner sans discernement, ni même bénir, le bain de sang en Ukraine», insiste le patriarche.

AFP

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