Ukraine: Biden offre des armes perfectionnées, Poutine mobilise Minsk
Joe Biden a promis lundi au président ukrainien Volodymyr Zelensky des "systèmes perfectionnés" de défense aérienne, après les bombardements russes meurtriers - d'une ampleur inégalée depuis des mois - qui ont frappé Kiev et d'autres villes d'Ukraine. Ces frappes sont intervenues deux jours après l'explosion qui a sérieusement endommagé le pont russe de Crimée.

A la frontière nord de l'Ukraine, le Bélarus faisait craindre l'ouverture d'un nouveau front, annonçant un déploiement aux contours non précisés de troupes russo-bélarusses.

"Ils essaient de nous détruire tous, de nous effacer de la surface de la terre", a réagi le président ukrainien Volodymyr Zelensky lundi matin alors que les missiles russes frappaient les villes ukrainiennes. Mais "l'Ukraine ne peut pas être intimidée", a-t-il ensuite lancé dans son allocution du soir, promettant de "réparer tout ce qui a été détruit".

Un énorme cratère dans une artère de la ville de Dnipro.

 

Le président russe Vladimir Poutine a justifié ces bombardements "massifs" par l'attaque "terroriste" de Kiev contre le pont reliant le territoire russe à la Crimée (sud), péninsule ukrainienne annexée par Moscou en 2014.

Les frappes ont fait au moins 11 morts et 89 blessés en Ukraine, selon le dernier bilan de la police. Le Premier ministre Denis Chmygal a indiqué que 11 infrastructures importantes avaient été endommagées dans huit régions, en plus de la capitale.

"Ils veulent détruire le système énergétique", a estimé Volodymyr Zelensky, alors que des coupures d'électricité affectaient de nombreuses régions.

L'Ukraine a annoncé arrêter ses exportations d'électricité à destination de l'Europe à la suite de ces frappes.

Les dégâts causés sur une aire de jeux après des explosions tôt dans la matinée dans la capitale ukrainienne, Kiev.

 

 

Ces bombardements ont provoqué l'indignation en Occident.

L'Union européenne a estimé qu'ils s'apparentaient à des "crimes de guerre" dont les responsables devront "rendre compte", appelant le Bélarus à "ne pas être partie à l'agression brutale menée par la Russie".

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a dénoncé "une escalade inacceptable".

Tous les pays des Nations unies se sont réunis lundi à New York (Etats-Unis) en assemblée générale d'urgence. L'ambassadeur de l'Ukraine à l'ONU, Sergiy Kyslytsya, y a accusé la Russie d'être "un Etat terroriste que l'on doit dissuader de la plus forte des manières".

Les services d'urgence ukrainiens publient des images montrant des pompiers, des ambulanciers et des policiers à l'oeuvre sur les lieux visés par les frappes russes à Kiev.

 

L'Otan, que l'Ukraine ambitionne d'intégrer, a condamné des "attaques horribles et aveugles" contre des infrastructures civiles et promis son soutien à Kiev "aussi longtemps qu'il le faudra", selon son secrétaire général Jens Stoltenberg.

Le président américain Joe Biden a condamné la "brutalité absolue" des bombardements russes et son secrétaire d'Etat Antony Blinken a assuré l'Ukraine du "soutien" de Washington après ces "horribles frappes".

Le président ukrainien a annoncé en soirée avoir discuté avec M. Biden après les frappes. Ce dernier a promis à M. Zelensky "de continuer à fournir à l'Ukraine ce dont elle a besoin pour se défendre, y compris des systèmes perfectionnés" de défense antiaérienne, selon un communiqué de la Maison Blanche.

Un bâtiment résidentiel éffondré dans la ville de Zaporijjia.

 


"La défense antiaérienne est actuellement la priorité numéro un de notre coopération en matière de défense", a souligné le président ukrainien.

Berlin a annoncé une réunion virtuelle d'urgence des dirigeants du G7 et du président Volodomyr Zelensky pour mardi à 12H00 GMT. L'Allemagne livrera aussi en urgence un premier système de défense antiaérienne promis de longue date.

Vladimir Poutine a indiqué lundi que la Russie avait mené une campagne "massive" de bombardements "contre l'infrastructure énergétique, militaire et de communication de l'Ukraine", en réponse à l'attaque "terroriste" du pont de Crimée.

Il a promis des répliques "sévères" en cas de nouvelles attaques ukrainiennes contre la Russie. Les frappes "ont atteint leur objectif", a assuré le ministère russe de la Défense.

De la fumée s'élevant au-dessus de la ville de Lviv.

 

Dimanche, M. Poutine avait accusé l'Ukraine d'avoir organisé l'explosion samedi matin qui a détruit une partie du pont de Crimée, construit à grands frais et inauguré en 2018. L'attaque a fait trois morts.

Kiev n'a ni confirmé ni démenti son implication.

L'ex-président russe Dmitri Medvedev, actuel numéro 2 du Conseil de sécurité de Moscou, a été plus loin, promettant que les frappes de lundi n'étaient qu'un "premier épisode" et appelant au "démantèlement total du régime politique de l'Ukraine".

"Sur les 84 missiles russes tirés contre l'Ukraine, 43 ont été abattus. Sur les 24 drones russes, 13 ont été abattus", a indiqué le président ukrainien lundi soir.

Une demi-douzaine de déflagrations ont été entendues à Kiev, avec des frappes sur plusieurs quartiers dont le centre-ville, qui ont notamment pulvérisé une aire de jeux pour enfants dans le parc Taras Chevtchenko. Dans la rue voisine le missile a creusé un cratère, un corps sans vie gisant sous une couverture thermique.

Un quartier de Dnipro se relève après des frappes russes (AFP)

 

"Je suis très choqué. Je suis arrivé à Kiev ce matin. Je marchais dans la rue (...) quand il y a eu les explosions", a raconté Ivan Poliakov, un jeune homme de 22 ans. "Il y a une université, deux musées, il n'y a pas de cible militaire. Ils tuent juste des civils", s'est indignée Ksenia Riazantseva, une habitante du quartier.

L'Ukraine a assuré que la Russie menait ces frappes massives en désespoir de cause face à ses récents revers sur plusieurs fronts.

"Même maintenant, les occupants ne peuvent pas nous affronter sur le champ de bataille, c'est pourquoi ils recourent à ce terrorisme. Eh bien, rendons le champ de bataille encore plus douloureux pour l'ennemi", a lancé Volodymyr Zelensky.

Le président bélarusse Alexandre Loukachenko.

 

Allié de Moscou mais s'étant jusque-là gardé d'envoyer ses troupes en soutien à Moscou, le président bélarusse Alexandre Loukachenko a accusé Kiev de préparer une attaque contre son pays, ajoutant qu'en conséquence Minsk et Moscou allaient déployer des troupes russo-bélarusses, sans préciser leur localisation.

Il a aussi a accusé la Pologne, la Lituanie et l'Ukraine de préparer des attaques "terroristes" et un "soulèvement militaire" au Bélarus.

 

Georges Haddad, avec AFP
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