L’explosion d’un dépôt d’armes du mouvement Hamas dans le sous-sol d’une mosquée dans le camp palestinien de Borj el-Chemali à l’est de Tyr, le vendredi 10 décembre, n’était pas un incident circonstanciel, ni “une explosion de bonbonnes d’oxygène”, comme l’a prétendu le Hamas dans un communiqué dans un état de confusion manifeste de ses responsables, dont certains, comme Oussama Hamdane, ont fait état d’un mauvais entreposage dans un dépôt proche de la mosquée et d’autres d’une opération israélienne contre la cache.
Dans son traitement de l’incident, le Liban officiel, qui a cherché à étouffer la vérité et à assurer une couverture au Hamas, a pavé la voie à la tuerie lors des funérailles survenues le lendemain dans le camp, qui a fait quatre morts et plusieurs blessés.
Il est évident que le Hamas n’a pas été impressionné par l’explosion et que les services libanais ont été particulièrement dociles aux directives du Hezbollah, ce qui a poussé le Hamas à mobiliser des centaines de combattants aux funérailles sans rencontrer aucune opposition officielle libanaise. Au contraire, les miliciens du Hamas ont paru posséder une liberté de circulation sans précédent aussi bien dans le camp que dans ses environ. Pourtant, Borj el-Chemali, contrairement à Aïn el-Héloué à Saïda, n’a pas connu de parade armée annoncée ou de confrontation entre les groupuscules palestiniens depuis des décennies et est généralement classé parmi les camps petits et sûrs du Liban.
Cette mobilisation armée injustifiée au moment des funérailles a causé de nouvelles victimes, indépendamment des différentes versions concernant la raison pour laquelle ces victimes sont tombées. Si l’explosion du dépôt n’est pas le résultat d’une attaque ou d’une opération sécuritaire, mais due à une “erreur” comme l’a indiqué le Hamas, pourquoi donc ce besoin de procéder à un tel étalage de miliciens armés en provenance de plusieurs camps lors de la cérémonie ?
Cette volonté d’étouffer les circonstances réelles de l’explosion et d’empêcher les médias d’approcher des lieux de l’incident a par ailleurs montré que les services de sécurité et les services militaires officiels étaient de toute évidence en phase avec le Hamas et ses calculs. Mais quels étaient donc ces calculs ?
Il va de soi que le but des armes du Hamas au Liban n’est pas de combattre Israël. Le mouvement a annoncé à plusieurs reprises qu’ "il ne cautionne aucune action militaire contre l’occupation à l’extérieur de la Palestine occupée”, même si cette position a été quelque peu ébranlée durant la dernière guerre israélienne à Gaza, lorsque l’un des dirigeants du Hamas a évoqué la possibilité d’ouvrir un deuxième front contre Israël, au moment où des roquettes étaient tirées à partir du sud de Tyr en direction du territoire israélien, mais sans faire de dégâts. Il s’agissait là d’un message concret de pression pour dire que le Hamas pouvait ouvrir à tout moment un front à partir du Liban-Sud dans le cas d’une poursuite de l’attaque contre Gaza.
Il est de notoriété publique que la décision de l’ouverture du front du Liban-Sud se trouve entre les mains de l’Iran et pas du Hamas. Ce que le mouvement a fait, en réalité, c’est proclamer son ralliement à l’axe iranien, ce qui nécessite, dans une perspective palestinienne, qu’il s’impose comme étant la force réelle sur le terrain au sein des camps palestiniens au Liban, processus du reste en cours depuis des années. Plusieurs parties palestiniennes assurent ainsi que le Hamas est aujourd’hui la force la plus puissante dans les camps au Liban sur le plan sécuritaire et militaire, et qu’il a pris le dessus sur le Fateh et les autres groupuscules.
L’Etat libanais, dans sa position globale, adopte pratiquement la politique de soutien au Hamas du Hezbollah aux dépens de la légalité palestinienne représentée par l’OLP et l’Autorité nationale, contrairement à ce qui prévalait sous le mandat du président Michel Sleiman, qui avait consacré la relation avec l’Autorité palestinienne, reçu Mahmoud Abbas plus de cinq fois, inauguré l’ambassade de Palestine au Liban et conclu une série d’accords relatifs à la présence palestinienne au pays du Cèdre.
Sous le mandat Aoun, il est évident que les visites officielles de l’Autorité palestinienne se sont faites bien plus rares, le président Mahmoud Abbas n’ayant fait qu’un seul déplacement à Beyrouth pour exprimer sa disposition à discuter des armes palestiniennes, proposition refusée par Michel Aoun, comme l’avait révélé à l’époque un proche de M. Abbas selon un article exhaustif paru en 2017.
Ce que veut le Hamas au Liban c’est d’abord, contrôler pratiquement la scène palestinienne, sans nécessairement mettre au pas le Fateh et les autres groupuscules. Et pour cause: le Hamas ne veut pas supporter le même fardeau politique et financier que l’Autorité légale et le Fateh s’agissant des réfugiés palestiniens. Il ne veut pas non plus contrôler l’ambassade ou l’annihiler.
Le Hamas souhaite aussi asseoir son autorité et son rôle en tant que première force militaire et politique palestinienne au Liban. Dans un contexte de recul palpable du Fateh, dont certains responsables ont été amadoués, le mouvement est aidé dans sa tâche par les services de sécurité libanais et par le Hezbollah, qui a besoin de cette alliance avec une organisation palestinienne, qui plus est une extension des Frères musulmans, surtout à un moment où le parti chiite a perdu la vague de soutien dont il bénéficiait dans le monde sunnite arabe, surtout après ses équipées guerrières en Syrie, en Irak et au Yémen contre la “majorité sunnite”.
La visite de Khaled Mechaal au Liban, responsable du Hamas hors de Palestine, vient ouvrir la voie à des arrangements avec le Hezbollah d’une part et à une consolidation du rôle du Hamas au Liban grâce à une couverture tacite de l’Etat libanais. Le président de la République et son équipe ont montré qu’ils étaient disposés à offrir plus de services au Hezbollah à ce niveau, en contrepartie de services offerts par le parti chiite sur le plan libanais. Dans ce contexte, le Hamas cherche à consolider dans la conscience libanaise et chez les réfugiés qu’il est désormais le seul décideur palestinien au Liban, par le biais de son ralliement à l’axe iranien.
En conclusion, le mini-Etat du Hamas marche sur les pas de celui du Hezbollah… et sur sa voie.
Dans son traitement de l’incident, le Liban officiel, qui a cherché à étouffer la vérité et à assurer une couverture au Hamas, a pavé la voie à la tuerie lors des funérailles survenues le lendemain dans le camp, qui a fait quatre morts et plusieurs blessés.
Il est évident que le Hamas n’a pas été impressionné par l’explosion et que les services libanais ont été particulièrement dociles aux directives du Hezbollah, ce qui a poussé le Hamas à mobiliser des centaines de combattants aux funérailles sans rencontrer aucune opposition officielle libanaise. Au contraire, les miliciens du Hamas ont paru posséder une liberté de circulation sans précédent aussi bien dans le camp que dans ses environ. Pourtant, Borj el-Chemali, contrairement à Aïn el-Héloué à Saïda, n’a pas connu de parade armée annoncée ou de confrontation entre les groupuscules palestiniens depuis des décennies et est généralement classé parmi les camps petits et sûrs du Liban.
Cette mobilisation armée injustifiée au moment des funérailles a causé de nouvelles victimes, indépendamment des différentes versions concernant la raison pour laquelle ces victimes sont tombées. Si l’explosion du dépôt n’est pas le résultat d’une attaque ou d’une opération sécuritaire, mais due à une “erreur” comme l’a indiqué le Hamas, pourquoi donc ce besoin de procéder à un tel étalage de miliciens armés en provenance de plusieurs camps lors de la cérémonie ?
Cette volonté d’étouffer les circonstances réelles de l’explosion et d’empêcher les médias d’approcher des lieux de l’incident a par ailleurs montré que les services de sécurité et les services militaires officiels étaient de toute évidence en phase avec le Hamas et ses calculs. Mais quels étaient donc ces calculs ?
Il va de soi que le but des armes du Hamas au Liban n’est pas de combattre Israël. Le mouvement a annoncé à plusieurs reprises qu’ "il ne cautionne aucune action militaire contre l’occupation à l’extérieur de la Palestine occupée”, même si cette position a été quelque peu ébranlée durant la dernière guerre israélienne à Gaza, lorsque l’un des dirigeants du Hamas a évoqué la possibilité d’ouvrir un deuxième front contre Israël, au moment où des roquettes étaient tirées à partir du sud de Tyr en direction du territoire israélien, mais sans faire de dégâts. Il s’agissait là d’un message concret de pression pour dire que le Hamas pouvait ouvrir à tout moment un front à partir du Liban-Sud dans le cas d’une poursuite de l’attaque contre Gaza.
Il est de notoriété publique que la décision de l’ouverture du front du Liban-Sud se trouve entre les mains de l’Iran et pas du Hamas. Ce que le mouvement a fait, en réalité, c’est proclamer son ralliement à l’axe iranien, ce qui nécessite, dans une perspective palestinienne, qu’il s’impose comme étant la force réelle sur le terrain au sein des camps palestiniens au Liban, processus du reste en cours depuis des années. Plusieurs parties palestiniennes assurent ainsi que le Hamas est aujourd’hui la force la plus puissante dans les camps au Liban sur le plan sécuritaire et militaire, et qu’il a pris le dessus sur le Fateh et les autres groupuscules.
L’Etat libanais, dans sa position globale, adopte pratiquement la politique de soutien au Hamas du Hezbollah aux dépens de la légalité palestinienne représentée par l’OLP et l’Autorité nationale, contrairement à ce qui prévalait sous le mandat du président Michel Sleiman, qui avait consacré la relation avec l’Autorité palestinienne, reçu Mahmoud Abbas plus de cinq fois, inauguré l’ambassade de Palestine au Liban et conclu une série d’accords relatifs à la présence palestinienne au pays du Cèdre.
Sous le mandat Aoun, il est évident que les visites officielles de l’Autorité palestinienne se sont faites bien plus rares, le président Mahmoud Abbas n’ayant fait qu’un seul déplacement à Beyrouth pour exprimer sa disposition à discuter des armes palestiniennes, proposition refusée par Michel Aoun, comme l’avait révélé à l’époque un proche de M. Abbas selon un article exhaustif paru en 2017.
Ce que veut le Hamas au Liban c’est d’abord, contrôler pratiquement la scène palestinienne, sans nécessairement mettre au pas le Fateh et les autres groupuscules. Et pour cause: le Hamas ne veut pas supporter le même fardeau politique et financier que l’Autorité légale et le Fateh s’agissant des réfugiés palestiniens. Il ne veut pas non plus contrôler l’ambassade ou l’annihiler.
Le Hamas souhaite aussi asseoir son autorité et son rôle en tant que première force militaire et politique palestinienne au Liban. Dans un contexte de recul palpable du Fateh, dont certains responsables ont été amadoués, le mouvement est aidé dans sa tâche par les services de sécurité libanais et par le Hezbollah, qui a besoin de cette alliance avec une organisation palestinienne, qui plus est une extension des Frères musulmans, surtout à un moment où le parti chiite a perdu la vague de soutien dont il bénéficiait dans le monde sunnite arabe, surtout après ses équipées guerrières en Syrie, en Irak et au Yémen contre la “majorité sunnite”.
La visite de Khaled Mechaal au Liban, responsable du Hamas hors de Palestine, vient ouvrir la voie à des arrangements avec le Hezbollah d’une part et à une consolidation du rôle du Hamas au Liban grâce à une couverture tacite de l’Etat libanais. Le président de la République et son équipe ont montré qu’ils étaient disposés à offrir plus de services au Hezbollah à ce niveau, en contrepartie de services offerts par le parti chiite sur le plan libanais. Dans ce contexte, le Hamas cherche à consolider dans la conscience libanaise et chez les réfugiés qu’il est désormais le seul décideur palestinien au Liban, par le biais de son ralliement à l’axe iranien.
En conclusion, le mini-Etat du Hamas marche sur les pas de celui du Hezbollah… et sur sa voie.
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