Autour de ses tri-campeones, Buenos Aires est une fête
©Le bus à impérial transportant la sélection argentine championne du monde, peu après son arrivée à Buenos Aires, mardi. Tomas Cuesta/AFP
Buenos Aires n'était mardi qu'une fête, gigantesque, démesurée, ses avenues du centre gonflées de centaines de milliers de personnes, pour communier avec ses champions du monde, rentrés dans la nuit, et attendus pour une parade qui promettait d'être incandescente.

De partout, des banlieues de la capitale, de provinces, de Rosario à 300 km, ils étaient venus, partis parfois au cœur de la nuit, profitant d'un jour décrété férié pour venir partager l'ivresse du 3e titre mondial, et ont envahi dès les premières heures de la matinée la capitale.

"Muchaaachos... ahora ganamos la tercera" (maintenant on a gagné la troisième (NDLR) de loin en loin, la chanson devenue l'hymne officieux des hinchas argentins résonnait le long des grandes avenues, fermées à la circulation, et dans le métro. En alternance avec l'hymne national, plus que jamais à propos "Coronados de gloria" (Couronnés de gloire) et un répertoire inépuisable.

Près de quatre heures avant l'arrivée prévue du bus des joueurs à l'Obélisque, ils étaient déjà des dizaines de milliers, sans doute davantage, un océan de maillots ciel et blanc de l'Albiceleste. 25 degrés à 9H00, la journée promettait d'être chaude.

Juste "les" voir

Leur but ? Célébrer, communier, juste "les" voir. "Juste pouvoir les regarder passer, c'est beaucoup ! Rien que si Messi nous regarde un moment dans les yeux quand je filmerai pour moi c'est bon !" déclarait, hilare, Nicolas, 19 ans, venu à l'Obélisque avec une dizaine d'amis.

Ils avaient été plus d'un million, selon la municipalité, jusque tard dans la nuit de dimanche pour fêter la victoire contre la France (3-3, 4 t.a.b à 2). Ce chiffre devrait être dépassé sans mal mardi.

Dans la nuit, Leo Messi, joueur de légende et capitaine de succès argentin a été le premier à apparaître sur la passerelle de l'avion vers 02h30 locales (7h30 Beyrouth), brandissant le trophée doré de la Coupe du monde, pour gagner le tapis rouge déployé sur le tarmac de l'aéroport d'affaire d'Ezeiza.

L'Airbus A330 bleu ciel et blanc de la compagnie Aerolineas Argentinas portait l'inscription "une équipe, un pays, un rêve" et sur son aile arrière figurent les dessins de Messi, Rodrigo de Paul, ou Angel di Maria, l'autre héros de la finale, auteur du 2e but contre la France.

Les joueurs sont immédiatement montés dans un bus à impériale blanc, floqué de 3 étoiles et du "campeon del mundo (champion du monde, NDLR)", pour quelques heures de repos au centre d'entraînement, tout proche, de la Fédération argentine de football (AFA). Acclamés par plusieurs milliers de supporters, qui campaient depuis des heures, désireux d'être les premiers à saluer les héros.

Dès l'après-midi, par grappes, en familles, avec des tentes, chaises de camping, parillas, tambours - et bien sûr ballons - ils se sont postés sur les larges bas-côtés ombragés du trajet d'environ dix kilomètres entre l'aéroport et l'AFA.


"Je suis ici à cause de la passion pour l'Argentine", disait Alejandra Diaz, 55 ans, qui avait attendu dans la nuit l'Albiceleste près de l'AFA. "J'aime Messi. J'aime toute l'équipe. C'est une émotion immense difficile à expliquer (d'être un fan de football en Argentine). Ton cœur bat la chamade. Je pense que c'est le seul pays qui vit (le football) de cette façon, avec cette folie, cette joie, et ce bonheur".

Messi vous dit "bonjour"

De nombreux policiers étaient prévus pour assurer un trajet rapide, des déviations pour permettre un accès fluide au centre-ville du bus, qui devait quitter vers 12H00 de l'AFA pour rallier l'Obélisque à environ 30 km. En 2021, au retour de la campagne victorieuse de la Copa America au Brésil, le bus avait mis quatre heures pour effectuer une dizaine de kilomètres.

"Buen dia" (Bonjour) a posté Lionel Messi sur son compte Instagram, accompagné d'une photo de lui endormi avec la Coupe du Monde dans les bras.

Le climax de la journée était attendu en début d'après-midi, autour de l'Obélisque, sur l'itinéraire d'une grande boucle de 7 kilomètres que le bus des désormais "tri-campeones" argentins devait emprunter, par les larges avenues de la ville. Un changement d'itinéraire de dernière minute n'était pas exclu, car emprunter l'Avenue 9 de Julio, l'un des plus larges du monde (140 m) paraissait a priori mission impossible, étant donné la foule compacte.

Mais sauf, surprise, pas par la Casa Rosada, le palais présidentiel, qui ne figurait pas sur le parcours initial. Après le dernier titre mondial, en 1986, Diego Maradona était apparu au balcon présidentiel avec le trophée, aux côtés du président Raul Alfonsin. Une image restée dans les mémoires.

Car cette troisième étoile pour l'Albiceleste, après celles des équipes de Daniel Passarella (1978) puis Diego Maradona (1986), après la longue attente, les finales perdues de 1990 et 2014, porte la marque de Messi, septuple Ballon d'Or, et au soir de sa carrière, à 35 ans, désigné meilleur joueur du Mondial.

Messi, qui devait plus tard mardi ou mercredi rejoindre son Rosario natal, pour une nouvelle fête, un nouvel accueil en héros, désormais entré dans la légende, aux côtés de Diego Maradona.

"On recevra Leo à Rosario, et on va continuer à le fêter, pour des mois, des années..", promettait, radieux, Luciano Peralta, commerçant de 41 ans, levé à 2 du matin pour venir à Buenos Aires partager cette "joie indescriptible, cette bénédiction, cette bouffée d'air, après tant d'années de crise économique".

"C'est émouvant, quand on aime son pays, de le voir ainsi...", résumait Cristina Vasquez, 42 ans, un maillot ciel et blanc sur les épaules, émue parmi bientôt un million d'autres.
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