Accusée de diffamation, la chaîne Fox News est au cœur de l'actualité avec des révélations quotidiennes de documents privés compromettants qui feront l'objet d'un procès. Ces documents ont révélé que les responsables de la chaîne ne croyaient guère à la théorie d'une élection présidentielle "volée" par les démocrates. Mais c'était seulement en privé, alors que ces théories faisaient florès à l'antenne.
Poste avancé des batailles des conservateurs aux Etats-Unis, la chaîne Fox News traverse une phase de turbulences avec les révélations sur ses coulisses durant la présidentielle de 2020 et un procès à plus d'un milliard de dollars en vue. Mais l'impact pour la perle de l'empire Murdoch reste difficile à évaluer.
C'est devenu un feuilleton qui régale les médias américains et le camp démocrate. Chaque semaine apporte une nouvelle salve de messages privés, textos ou courriels émanant de figures de proue de la chaîne et rendus publics dans le cadre des poursuites en diffamation intentées par un fabricant de machines de vote électroniques, Dominion Voting Systems.
Quartier général de Fox News à New York (AFP)
"Nous sommes vraiment, vraiment, tout proches de pouvoir ignorer Trump, presque tous les soirs (...) Je le déteste passionnément", écrivait ainsi le présentateur vedette Tucker Carlson, fervent soutien des républicains, à des membres de son équipe, le 4 janvier 2021, deux jours avant l'assaut contre le Capitole par des milliers de partisans de l'ancien président.
Les documents ont surtout révélé qu'en novembre 2020, au sein de la chaîne préférée des conservateurs américains, on ne croyait guère, jusqu'à son propriétaire Rupert Murdoch, à la théorie d'une élection présidentielle "volée" par les démocrates, notamment au moyen du vote électronique.
Mais c'était seulement en privé, alors que ces théories faisaient florès à l'antenne, sur les plateaux des stars Tucker Carlson, Sean Hannity, ou Laura Ingraham.
Ces contradictions sont au coeur de l'argumentaire de Dominion Voting Systems, qui veut voir la chaîne condamnée pour diffamation à 1,6 milliard de dollars de dommages et intérêts, lors d'un procès civil qui doit commencer mi-avril dans l'Etat du Delaware.
"C'est une attaque sans précédent contre le premier amendement" de la Constitution américaine protégeant la liberté de la presse, répond Fox News à l'AFP.
La chaîne ajoute qu'il était légitime de donner la parole au camp Trump quand il contestait le vote et "essentiel pour la recherche de la vérité" de laisser s'exprimer toutes les parties. Elle accuse aussi Dominion d'avoir "choisi et sorti des citations de leur contexte".
Mais quelle que soit l'issue judiciaire, les révélations "ont salement éclaboussé Fox", selon Mark Feldstein, professeur de journalisme à l'université du Maryland.
Joe Biden répond aux journalistes de Fox News (AFP)
"Longtemps, nous étions comme devant une pièce de théâtre, et l'on pouvait voir en regardant Fox que c'était plein de mensonges. Ce que l'on ne savait pas, c'est à quel point c'était délibéré et orchestré", ajoute-t-il.
L'universitaire est quand même circonspect sur les effets qu'auront ces révélations pour les téléspectateurs de Fox News, qui a revendiqué en 2022, pour la septième année consécutive, le titre de chaîne la plus regardée sur le câble par les Américains, bien devant ses concurrentes CNN ou MSNBC.
"Ils s'adressent à une population qui croit déjà à ce genre de choses. Ces mensonges, ils les diffusaient en grande partie parce que leur public voulait les entendre", explique Mark Feldstein.
Lancée en 1996, la chaîne a déjà traversé plusieurs crises comme les scandales de harcèlement sexuel impliquant son emblématique patron Roger Ailes, décédé en 2017, et l'un de ses présentateurs emblématiques, Bill O'Reilly, licencié la même année.
Même en cas de lourde condamnation, "Fox News est une vache à lait. Ils vont simplement absorber la perte et continuer à programmer", dit Mark Feldstein.
Une condamnation à plus d'un milliard de dollars aurait tout de même un impact financier non négligeable sur la maison mère de Fox News, le groupe Fox Corporation, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 14 milliards de dollars sur l'année fiscale 2022 (juillet 2021-juin 2022). Et Fox News est poursuivie dans une affaire similaire par une autre société, Smartmatic.
Pour l'instant, la chaîne maintient son cap. Cette semaine, Tucker Carlson a consacré son émission à chercher à minimiser la violence des partisans de Donald Trump lors de l'assaut contre le Capitole, le 6 janvier 2021, images présentées comme exclusives à l'appui.
Des camions publicitaires portant des affiches qui dénoncent le stratagème de Fox News pendant les élections américaines, à San Francisco (AFP)
Fox News s'est attirée les critiques de Joe Biden, qui a rappelé que 140 policiers avaient été blessés. De manière notable, le chef des républicains au Sénat, Mitch McConnell, a aussi dénoncé "une erreur".
"Au-delà du procès (Dominion), les conséquences les plus probables, si Fox en subit, viendront des annonceurs qui jugeront la marque trop indigne de confiance et des téléspectateurs qui décideront finalement de la quitter", estime le rédacteur en chef de la Columbia Journalism Review, Kyle Pope.
Chroniqueur de la vie des médias sur Fox News, le journaliste Howard Kurtz a déploré fin février de ne pas pouvoir évoquer l'affaire Dominion à l'antenne, à la demande de son employeur.
Maureen Décor, avec AFP
Poste avancé des batailles des conservateurs aux Etats-Unis, la chaîne Fox News traverse une phase de turbulences avec les révélations sur ses coulisses durant la présidentielle de 2020 et un procès à plus d'un milliard de dollars en vue. Mais l'impact pour la perle de l'empire Murdoch reste difficile à évaluer.
C'est devenu un feuilleton qui régale les médias américains et le camp démocrate. Chaque semaine apporte une nouvelle salve de messages privés, textos ou courriels émanant de figures de proue de la chaîne et rendus publics dans le cadre des poursuites en diffamation intentées par un fabricant de machines de vote électroniques, Dominion Voting Systems.
Quartier général de Fox News à New York (AFP)
"Nous sommes vraiment, vraiment, tout proches de pouvoir ignorer Trump, presque tous les soirs (...) Je le déteste passionnément", écrivait ainsi le présentateur vedette Tucker Carlson, fervent soutien des républicains, à des membres de son équipe, le 4 janvier 2021, deux jours avant l'assaut contre le Capitole par des milliers de partisans de l'ancien président.
Les documents ont surtout révélé qu'en novembre 2020, au sein de la chaîne préférée des conservateurs américains, on ne croyait guère, jusqu'à son propriétaire Rupert Murdoch, à la théorie d'une élection présidentielle "volée" par les démocrates, notamment au moyen du vote électronique.
Mais c'était seulement en privé, alors que ces théories faisaient florès à l'antenne, sur les plateaux des stars Tucker Carlson, Sean Hannity, ou Laura Ingraham.
Un acte de diffamation "délibéré et orchestré"
Ces contradictions sont au coeur de l'argumentaire de Dominion Voting Systems, qui veut voir la chaîne condamnée pour diffamation à 1,6 milliard de dollars de dommages et intérêts, lors d'un procès civil qui doit commencer mi-avril dans l'Etat du Delaware.
"C'est une attaque sans précédent contre le premier amendement" de la Constitution américaine protégeant la liberté de la presse, répond Fox News à l'AFP.
La chaîne ajoute qu'il était légitime de donner la parole au camp Trump quand il contestait le vote et "essentiel pour la recherche de la vérité" de laisser s'exprimer toutes les parties. Elle accuse aussi Dominion d'avoir "choisi et sorti des citations de leur contexte".
Mais quelle que soit l'issue judiciaire, les révélations "ont salement éclaboussé Fox", selon Mark Feldstein, professeur de journalisme à l'université du Maryland.
Joe Biden répond aux journalistes de Fox News (AFP)
"Longtemps, nous étions comme devant une pièce de théâtre, et l'on pouvait voir en regardant Fox que c'était plein de mensonges. Ce que l'on ne savait pas, c'est à quel point c'était délibéré et orchestré", ajoute-t-il.
L'universitaire est quand même circonspect sur les effets qu'auront ces révélations pour les téléspectateurs de Fox News, qui a revendiqué en 2022, pour la septième année consécutive, le titre de chaîne la plus regardée sur le câble par les Américains, bien devant ses concurrentes CNN ou MSNBC.
"Ils s'adressent à une population qui croit déjà à ce genre de choses. Ces mensonges, ils les diffusaient en grande partie parce que leur public voulait les entendre", explique Mark Feldstein.
Une perte de confiance des téléspectateurs ?
Lancée en 1996, la chaîne a déjà traversé plusieurs crises comme les scandales de harcèlement sexuel impliquant son emblématique patron Roger Ailes, décédé en 2017, et l'un de ses présentateurs emblématiques, Bill O'Reilly, licencié la même année.
Même en cas de lourde condamnation, "Fox News est une vache à lait. Ils vont simplement absorber la perte et continuer à programmer", dit Mark Feldstein.
Une condamnation à plus d'un milliard de dollars aurait tout de même un impact financier non négligeable sur la maison mère de Fox News, le groupe Fox Corporation, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 14 milliards de dollars sur l'année fiscale 2022 (juillet 2021-juin 2022). Et Fox News est poursuivie dans une affaire similaire par une autre société, Smartmatic.
Pour l'instant, la chaîne maintient son cap. Cette semaine, Tucker Carlson a consacré son émission à chercher à minimiser la violence des partisans de Donald Trump lors de l'assaut contre le Capitole, le 6 janvier 2021, images présentées comme exclusives à l'appui.
Des camions publicitaires portant des affiches qui dénoncent le stratagème de Fox News pendant les élections américaines, à San Francisco (AFP)
Fox News s'est attirée les critiques de Joe Biden, qui a rappelé que 140 policiers avaient été blessés. De manière notable, le chef des républicains au Sénat, Mitch McConnell, a aussi dénoncé "une erreur".
"Au-delà du procès (Dominion), les conséquences les plus probables, si Fox en subit, viendront des annonceurs qui jugeront la marque trop indigne de confiance et des téléspectateurs qui décideront finalement de la quitter", estime le rédacteur en chef de la Columbia Journalism Review, Kyle Pope.
Chroniqueur de la vie des médias sur Fox News, le journaliste Howard Kurtz a déploré fin février de ne pas pouvoir évoquer l'affaire Dominion à l'antenne, à la demande de son employeur.
Maureen Décor, avec AFP
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