Ali Hassan Khalil : Nous sommes heureux de former un tandem avec le Hezbollah
Le député et bras droit du président de la Chambre Ali Hassan Khalil a affirmé que le mouvement Amal est "heureux de former un tandem national avec le Hezbollah, un tandem qui porte la responsabilité de défendre le Liban, sa terre et son peuple, de protéger sa résistance face à l’occupation israélienne et de défendre l’instauration de l’État et de ses institutions ». Il a également assuré que l’alliance avec le Hezbollah "ne sera pas ébranlée par le chantage pratiqué par Gebran Bassil".

Au cours d’une conférence de presse au siège du mouvement Amal à Bir Hassan, le député a tiré à boulets rouges sur le président de la République Michel Aoun et son gendre le chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil. Ce dernier avait tenté de régler ses comptes lors d'un discours télévisé, la veille, avec ses adversaires politiques, notamment Nabih Berry, chef du mouvement Amal et président de la Chambre depuis près de 30 ans d’affilés, qu’il considère comme la seule faille dans son alliance avec le Hezbollah puisque le parti pro-iranien préfère Nabih Berry au CPL pour des raisons communautaires. Le gendre du président de la République a tenté une énième fois une stratégie populiste pour renforcer sa base populaire qui s’effrite depuis le début de la crise économique et financière qui touche le Liban depuis plus de deux ans.

"Le blocage institutionnel, c'est le CPL"

Ali Hassan Khalil- qui par ailleurs fait l’objet d’un mandat d’arrêt dans l’affaire de la double explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020- a répondu point par point aux accusations lancées la veille par son adversaire politique –profitant de l’occasion pour s’attaquer au président de la République- leur imputant d’être eux et leur parti les seuls responsables des blocages institutionnels et de la crise économique et financière. « Vous seuls avez bloqué le vote au sein du Conseil des ministres qui devait limiter vos rôles dans les secteurs de l’électricité, des télécoms, de l’environnement et bien d’autres » a accusé Khalil. « Les Libanais ont subi des années de blocage avant votre présidence pour les beaux yeux du gendre. » Il a également renchéri aux propos de Gebran Bassil sur les seigneurs de la guerre en s’interrogeant sur le fait de savoir « si le fondateur du CPL Michel Aoun n’est pas l’un des seigneurs de la guerre .»

Le député a réfuté les accusations de M. Bassil selon lesquelles le président de la Chambre entretient un " pouvoir discrétionnaire qui fait qu’il fait passer les textes de loi de son choix et de la manière qu’il entend et bloque d’autres ", assurant que « la plupart des projets de loi bloquées le sont au sein des commissions parlementaires présidées par des membres du CPL qui mesurent la priorité des projets de loi selon leurs intérêts personnels.» M. Khalil a également rappelé que les différents ministres de l’Énergie des douze dernières années, Gebran Bassil et ses proches, sont ceux qui ont bloqué la loi prévoyant une autorité de régulation du secteur de l’énergie.

Au sujet de l’enquête sur la double explosion du port, l’ancien ministre a implicitement accusé le camp présidentiel de bloquer les investigations en refusant que les anciens ministres ne soient déférés devant la Haute cour chargée de juger les présidents et ministres. « Un sage qui se veut protecteur de la Loi et de la Constitution ne peut faire abstraction de textes clairs sur les procédures concernant l’enquête sur le port de Beyrouth ».

Concernant la décentralisation élargie revendiquée par M.Bassil et le président Aoun dans son allocution télévisée du 27 décembre, Ali Hassan Khalil a souligné qu’« il était dangereux de parler à plusieurs reprises de la décentralisation fiscale, qui saperait le fondement d’un État unifié et d’un développement équilibré » tout en réfutant les propos de M.Bassil qui considère que le pouvoir central est paralysé. « Le problème du pouvoir central est d’avoir deux présidents », a affirmé l’ancien ministre dans une allusion à peine voilée sur le rôle que joue le gendre du président Aoun dans les couloirs du Palais présidentiel. « Le président de la République est celui qui bloque les institutions au nom de la défense des droits du CPL », a souligné l'ancien ministre.

Au sujet de l’audit juricomptable mainte fois demandé par le président Aoun et le CPL, Ali Hassan Khalil a affirmé que ce ne sont que des paroles en l’air de la part du camp présidentiel qui tente uniquement de faire croire à l’opinion publique qu’ils ne sont pas corrompus. « Le président de la Chambre a fait adopter les lois s’y rapportant mais a 'désamorcé toutes les mines' qu’elles recelaient », a affirmé le bras droit du président Berry. Il a également demandé que l’audit englobe d’autres institutions pour pouvoir révéler les affaires de corruption du ministère de l’Énergie.


Concernant le gouverneur de la Banque centrale régulièrement pointé du doigt par le camp aouniste, l’ancien ministre des Finances a critiqué Gebran Bassil affirmant que les Libanais ne sont pas dupes. Pour lui, l’opinion publique sait que c’est le CPL « qui a souhaité le renouvellement de son mandat, après que des banques proches du parti ont profité des ingénieries financières de la Banque du Liban », dans une allusion à la Cedrus Bank, proche des milieux aounistes.

Le proche conseiller du président de la Chambre a, -malgré une vingtaine de minutes de flèches tirées contre le président et son gendre - conclu ses propos en tendant la main à tous les partenaires politiques pour ne pas alimenter la polémique dont le seul bénéficiaire serait in fine Gebran Bassil qui pourrait – et c’est son désir profond- récupérer quelques votes au prochain scrutin législatif.

Polémique avec les milieux du CPL

Dans une première réaction, le député de Koura et membre du bloc parlementaire aouniste « le Liban fort » Ghassan Atallah a critiqué Ali Hassan Khalil rappelant dans une longue diatribe que le député fait l’objet d’un mandat d’arrêt et que le président de la Chambre avait lui aussi participé à des guerres fratricides dans les années 1980 contre le Hezbollah. Il a finalement conclu son communiqué de presse en précisant que l’audit juricomptable « vise le mouvement Amal et toutes les personnes qui lui ressemblent ».

De son côté, le député Ibrahim Kanaan, membre du bloc aouniste, a réfuté les propos de M. Hassan Khalil selon lesquels le camp aouniste a fait prévaloir des intérêts personnels dans sa gestion des affaires publiques. M. Kanaan a souligné à ce propos sur son compte Twitter : "Les intérêts personnels et privés seraient les bienvenus s'il s'agit d'œuvrer pour les lois sur l'enrichissement illicite, la levée du secret bancaire, la lutte contre la corruption dans le secteur public, la récupération des fonds pillés, le contrôle des capitaux, le blanchiment d'argent, quatre projets de budget en trois ans, qui sont autant de textes approuvés dans les commissions présidées par le CPL".

L'ancien ministre Nada Boustany a réagi quant à elle sur son compte Twitter en ces termes: "J'ai le sentiment que nous étions le 1er avril et non pas le début de l'année".

En réponse aux accusations de corruption au ministère de l'Energie, le CPL a réclamé l'ouverture d'une enquête publique et transparente sur ce plan, et s'il s'avère qu'il y a eu corruption au ministère, le CPL demandera la démission de son chef et sa mise à l'écart de l'action politique. Si, par contre, l'enquête révèle une corruption au ministère des Finances, le CPL réclamera la démission du président de la Chambre, Nabih Berry.

Réagissant, Ali Hassan Khalil a approuvé la proposition du CPL en faveur d'un procès public et transparent. Suite à quoi le CPL a de nouveau répondu, en appelant le président Berry à convoquer dans les plus brefs délais à une séance parlementaire publique durant laquelle le dossier serait étudié et chaque partie présenterait ses éléments de preuves. Dans une nouvelle réponse, Ali Hassan Khalil a estimé que c'est Gebran Bassil qui rendrait des comptes et devrait démissionner...
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