Le 6 mai dernier, le Royaume-Uni a couronné son nouveau monarque, Charles III. La cérémonie a été un événement riche en symboles, marqué par des traditions séculaires et une grande solennité, surtout qu’elle s’est tenue à l’abbaye de Westminster. Ce moment historique a été célébré dans le monde entier, mettant en relief l'importance de la monarchie britannique au double plan de l'histoire et de la culture.
Cette nouvelle ère qui débute ne laisse guère indifférents les pays du Moyen-Orient. En effet, Charles III est connu pour son intérêt et son respect pour l'islam, ce qui fait de lui un monarque britannique islamophile. Sa proximité avec le monde arabe et sa volonté de renforcer les relations avec cette région seraient influencées par sa connaissance de l'islam et sa compréhension de la culture musulmane.
Charles III a toujours réfuté la thèse controversée du «choc des civilisations» qui soutient que l’islam est en conflit avec l’Occident. Il soutient, bien au contraire, que l’islam, le judaïsme et le christianisme sont des religions monothéistes qui ont plus de points en commun qu'on ne le pense généralement.
Depuis 1993, le nouveau roi est un mécène du Centre d’études islamiques d’Oxford, où il avait alors prononcé le discours inaugural intitulé «L’islam et l’Occident». Ce discours, plutôt inédit, abordait une réflexion complexe sur la civilisation islamique et ses relations avec l’Europe.
Alors prince de Galles, Charles III s'est profondément engagé dans cette réflexion. Il estime que l'islam fait «partie intégrante de notre passé et de notre présent dans tous les domaines de l’activité humaine». Et de poursuivre: «Il a contribué à créer l’Europe moderne. Cela fait partie de notre propre héritage, ce n’est pas une chose à part».
Intégration réciproque
Le nouveau monarque se distinguait de ceux qui préconisent une assimilation des musulmans au sein de la société britannique. Il prônait plutôt un processus d'intégration réciproque où les musulmans devaient concilier leur liberté d'être eux-mêmes avec une appréciation de l'importance de l'intégration dans la société, tandis que les non-musulmans devaient respecter la pratique quotidienne de la foi islamique et éviter de causer des offenses.
Ce discours venait ironiquement de l'héritier du trône, adressant aux musulmans britanniques, en grande partie des migrants des anciennes colonies, un message clair: leur présence dans le pays était non seulement bienvenue, mais également appréciée. Quel paradoxe avec les interventions récentes de hauts dirigeants politiques britanniques depuis l’arrivée au pouvoir de David Cameron!
Le nouveau souverain a une connaissance approfondie du monde arabe et de sa culture. Il a souvent exprimé son admiration pour les traditions, la musique, la poésie et la littérature arabes, ainsi que pour l'architecture islamique. Il a même écrit un livre intitulé «The Old Man of Lochnagar» qui, inspiré de ses voyages en Arabie Saoudite et au Qatar, a incorporé des éléments de la culture arabe et de l'islam.
En 2015, lors d’une tournée au Moyen-Orient en tant que Prince de Galles, il avait prouvé son intérêt pour l'islam. Le prince avait consacré une période de six mois précédant sa tournée pour s'adonner à l'apprentissage de la langue arabe, en vue de pouvoir aisément déchiffrer les inscriptions ornant les œuvres muséales et archéologiques, et pour lire le Coran dans sa version originale.
Sympathie à l’égard des Palestiniens
Dans un ouvrage de 2018, intitulé «Charles at Seventy: Thoughts, Hopes and Dreams», le correspondant Robert Jobson révèle que le monarque avait exprimé en privé son opposition à l'invasion de l'Irak en 2003 et avait fait part de ses objections directement au Premier ministre Tony Blair. Selon Jobson, le roi Charles estimait que l’imposition de pratiques occidentales en matière de démocratie était à la fois «téméraire et futile».
Sans oublier la sympathie manifestée par Charles à l’égard des Palestiniens, qui pourrait expliquer pourquoi c’est son fils, le prince William, qui avait effectué la visite royale en Israël en juin 2018. En 2020, il avait veillé à visiter les territoires palestiniens occupés, où il a exprimé son souhait que «l’avenir apporte la liberté, la justice et l’égalité à tous les Palestiniens», n’hésitant pas à critiquer la politique israélienne à ce propos.
Dans son discours précité au Centre d'études islamiques d'Oxford, le prince Charles avait souligné que l'ignorance de la dette culturelle occidentale envers le monde islamique est une source de malentendus et d'erreurs de jugement concernant la nature de l'islam. Il avait également insisté sur le fait que l'islam a conservé une vision métaphysique unifiée de l'être humain et de son environnement que l'Occident a perdue depuis la révolution scientifique.
Le prince Charles a également appelé à la résistance contre la tendance à associer l'extrémisme à l'islam, car l'extrémisme ne représente pas la majorité des musulmans. Il a rappelé que la grande majorité des musulmans sont modérés dans leur politique et que leur religion est la «religion de la voie du milieu». Il affirme dans ce cadre que «le prophète lui-même détestait et craignait l'extrémisme, et que l'extrémisme n’est pas exclusif à l'islam mais se trouve dans toutes les religions, y compris le christianisme».
Fervent anglican
Il est déplorable de constater que certains commentateurs islamophobes ridiculisent la curiosité intellectuelle du nouveau roi de Grande-Bretagne. Parmi ces commentateurs, Daniel Pipes, néoconservateur américain, qui s’était interrogé sur son blog:«Charles s’est-il converti à l’islam?». Il présentait à cet égard de nombreuses «preuves» selon lesquelles le roi serait lui-même devenu musulman. Ces «preuves» incluent notamment le fait que le prince Charles a participé à une cérémonie de rupture du jeûne pendant le Ramadan et qu'il a critiqué Salman Rushdie pour avoir insulté les «convictions les plus profondes» des musulmans.
En réalité, le roi est, selon maints observateurs, un fervent anglican, dont le profond intérêt pour l'islam est lié à sa posture intellectuelle et son appartenance au courant traditionaliste, une école de pensée ésotérique du XXᵉ siècle dont les premiers partisans s'opposaient au monde moderne, et croyaient que toutes les grandes religions partagent des vérités universelles qui pourraient être des remèdes aux malheurs contemporains.
Islamophile ou traditionnaliste, un changement doit s’opérer! Bien que le prince Charles, à présent roi, ait exprimé à plusieurs reprises une profonde admiration pour l'islam et le monde arabe, il doit désormais agir avec une plus grande prudence dans ses déclarations publiques, en tant que chef de l'Église anglicane et monarque constitutionnel.
Depuis la Glorieuse Révolution de 1688 qui a établi le principe de la monarchie constitutionnelle en Angleterre, le monarque britannique doit rester politiquement neutre. Pour ce faire, Charles III doit faire preuve de retenue, étant donné qu'il ne peut pas s'ingérer dans les affaires politiques de son pays, en autres celles liées à l'immigration.
En considérant le rôle symbolique et protocolaire du monarque britannique, la passion du roi Charles III pour l'islam peut être vue comme une manière de promouvoir le dialogue interculturel et de souligner l'importance du respect et de la compréhension mutuelle entre les cultures.
Cependant, cette passion peut également susciter des interrogations quant aux limites de son influence dans les relations internationales du Royaume-Uni.
Cette nouvelle ère qui débute ne laisse guère indifférents les pays du Moyen-Orient. En effet, Charles III est connu pour son intérêt et son respect pour l'islam, ce qui fait de lui un monarque britannique islamophile. Sa proximité avec le monde arabe et sa volonté de renforcer les relations avec cette région seraient influencées par sa connaissance de l'islam et sa compréhension de la culture musulmane.
Charles III a toujours réfuté la thèse controversée du «choc des civilisations» qui soutient que l’islam est en conflit avec l’Occident. Il soutient, bien au contraire, que l’islam, le judaïsme et le christianisme sont des religions monothéistes qui ont plus de points en commun qu'on ne le pense généralement.
Depuis 1993, le nouveau roi est un mécène du Centre d’études islamiques d’Oxford, où il avait alors prononcé le discours inaugural intitulé «L’islam et l’Occident». Ce discours, plutôt inédit, abordait une réflexion complexe sur la civilisation islamique et ses relations avec l’Europe.
Alors prince de Galles, Charles III s'est profondément engagé dans cette réflexion. Il estime que l'islam fait «partie intégrante de notre passé et de notre présent dans tous les domaines de l’activité humaine». Et de poursuivre: «Il a contribué à créer l’Europe moderne. Cela fait partie de notre propre héritage, ce n’est pas une chose à part».
Intégration réciproque
Le nouveau monarque se distinguait de ceux qui préconisent une assimilation des musulmans au sein de la société britannique. Il prônait plutôt un processus d'intégration réciproque où les musulmans devaient concilier leur liberté d'être eux-mêmes avec une appréciation de l'importance de l'intégration dans la société, tandis que les non-musulmans devaient respecter la pratique quotidienne de la foi islamique et éviter de causer des offenses.
Ce discours venait ironiquement de l'héritier du trône, adressant aux musulmans britanniques, en grande partie des migrants des anciennes colonies, un message clair: leur présence dans le pays était non seulement bienvenue, mais également appréciée. Quel paradoxe avec les interventions récentes de hauts dirigeants politiques britanniques depuis l’arrivée au pouvoir de David Cameron!
Le nouveau souverain a une connaissance approfondie du monde arabe et de sa culture. Il a souvent exprimé son admiration pour les traditions, la musique, la poésie et la littérature arabes, ainsi que pour l'architecture islamique. Il a même écrit un livre intitulé «The Old Man of Lochnagar» qui, inspiré de ses voyages en Arabie Saoudite et au Qatar, a incorporé des éléments de la culture arabe et de l'islam.
En 2015, lors d’une tournée au Moyen-Orient en tant que Prince de Galles, il avait prouvé son intérêt pour l'islam. Le prince avait consacré une période de six mois précédant sa tournée pour s'adonner à l'apprentissage de la langue arabe, en vue de pouvoir aisément déchiffrer les inscriptions ornant les œuvres muséales et archéologiques, et pour lire le Coran dans sa version originale.
Sympathie à l’égard des Palestiniens
Dans un ouvrage de 2018, intitulé «Charles at Seventy: Thoughts, Hopes and Dreams», le correspondant Robert Jobson révèle que le monarque avait exprimé en privé son opposition à l'invasion de l'Irak en 2003 et avait fait part de ses objections directement au Premier ministre Tony Blair. Selon Jobson, le roi Charles estimait que l’imposition de pratiques occidentales en matière de démocratie était à la fois «téméraire et futile».
Sans oublier la sympathie manifestée par Charles à l’égard des Palestiniens, qui pourrait expliquer pourquoi c’est son fils, le prince William, qui avait effectué la visite royale en Israël en juin 2018. En 2020, il avait veillé à visiter les territoires palestiniens occupés, où il a exprimé son souhait que «l’avenir apporte la liberté, la justice et l’égalité à tous les Palestiniens», n’hésitant pas à critiquer la politique israélienne à ce propos.
Dans son discours précité au Centre d'études islamiques d'Oxford, le prince Charles avait souligné que l'ignorance de la dette culturelle occidentale envers le monde islamique est une source de malentendus et d'erreurs de jugement concernant la nature de l'islam. Il avait également insisté sur le fait que l'islam a conservé une vision métaphysique unifiée de l'être humain et de son environnement que l'Occident a perdue depuis la révolution scientifique.
Le prince Charles a également appelé à la résistance contre la tendance à associer l'extrémisme à l'islam, car l'extrémisme ne représente pas la majorité des musulmans. Il a rappelé que la grande majorité des musulmans sont modérés dans leur politique et que leur religion est la «religion de la voie du milieu». Il affirme dans ce cadre que «le prophète lui-même détestait et craignait l'extrémisme, et que l'extrémisme n’est pas exclusif à l'islam mais se trouve dans toutes les religions, y compris le christianisme».
Fervent anglican
Il est déplorable de constater que certains commentateurs islamophobes ridiculisent la curiosité intellectuelle du nouveau roi de Grande-Bretagne. Parmi ces commentateurs, Daniel Pipes, néoconservateur américain, qui s’était interrogé sur son blog:«Charles s’est-il converti à l’islam?». Il présentait à cet égard de nombreuses «preuves» selon lesquelles le roi serait lui-même devenu musulman. Ces «preuves» incluent notamment le fait que le prince Charles a participé à une cérémonie de rupture du jeûne pendant le Ramadan et qu'il a critiqué Salman Rushdie pour avoir insulté les «convictions les plus profondes» des musulmans.
En réalité, le roi est, selon maints observateurs, un fervent anglican, dont le profond intérêt pour l'islam est lié à sa posture intellectuelle et son appartenance au courant traditionaliste, une école de pensée ésotérique du XXᵉ siècle dont les premiers partisans s'opposaient au monde moderne, et croyaient que toutes les grandes religions partagent des vérités universelles qui pourraient être des remèdes aux malheurs contemporains.
Islamophile ou traditionnaliste, un changement doit s’opérer! Bien que le prince Charles, à présent roi, ait exprimé à plusieurs reprises une profonde admiration pour l'islam et le monde arabe, il doit désormais agir avec une plus grande prudence dans ses déclarations publiques, en tant que chef de l'Église anglicane et monarque constitutionnel.
Depuis la Glorieuse Révolution de 1688 qui a établi le principe de la monarchie constitutionnelle en Angleterre, le monarque britannique doit rester politiquement neutre. Pour ce faire, Charles III doit faire preuve de retenue, étant donné qu'il ne peut pas s'ingérer dans les affaires politiques de son pays, en autres celles liées à l'immigration.
En considérant le rôle symbolique et protocolaire du monarque britannique, la passion du roi Charles III pour l'islam peut être vue comme une manière de promouvoir le dialogue interculturel et de souligner l'importance du respect et de la compréhension mutuelle entre les cultures.
Cependant, cette passion peut également susciter des interrogations quant aux limites de son influence dans les relations internationales du Royaume-Uni.
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