Les Turcs fortement mobilisés pour un scrutin serré
Les deux principaux candidats à la présidentielle en Turquie, dont le président sortant Recep Tayyip Erdogan, ont déposé leur bulletin dans l'urne dimanche à la mi-journée pour un scrutin qui s'annonce serré et draine, depuis l'ouverture des bureaux, de longues files d'attente à travers le pays.

Alors que les Turcs se rendaient aux urnes dimanche, le duel s'annonce serré pour choisir le treizième président de la Turquie, le troisième au suffrage universel direct, un siècle après la fondation de la République. Le pays, plus divisé que jamais, devra, à l'issue du scrutin, retrouver une nouvelle assemblée et un nouveau président.

Arrivé à la mi-journée dans son bureau de vote d'Üsküdar, quartier conservateur sur la rive asiatique d'Istanbul, M. Erdogan, les traits fatigués, a souhaité "un avenir profitable au pays et à la démocratie turque", soulignant "l'enthousiasme des électeurs" en particulier dans les zones affectées par le séisme du 6 février qui a fait au moins 50.000 morts.

Peu auparavant, le principal candidat de l'opposition avait été le premier des deux à déposer son bulletin à Ankara: "La démocratie nous a manqué", a déclaré le social-démocrate Kemal Kiliçdaroglu, tout sourire. "Vous verrez, le printemps va revenir dans ce pays, si Dieu le veut, et il durera pour toujours", a-t-il ajouté en reprenant un de ses slogans de campagne.



Polarisés entre le président islamo-conservateur Erdogan, 69 ans, au pouvoir depuis vingt ans, et son adversaire Kemal Kiliçdaroglu, 74 ans, à la tête d'un parti social-démocrate et laïque CHP, les électeurs doivent accorder à l'un des deux au moins 50% des voix plus une pour assurer sa victoire au premier tour.

Au total 64 millions d'électeurs, qui éliront aussi leur Parlement, sont inscrits dans près de 200.000 bureaux à travers ce pays de 85 millions d'habitants, traditionnellement assidu aux urnes avec des taux de participation supérieurs à 80%.

M. Kiliçdaroglu, chef du CHP, le parti de Mustafa Kemal Atatürk, fondateur de la Turquie moderne, emmène un front uni de six partis de la droite nationaliste au centre-gauche libéral. Il a en outre reçu le soutien du parti prokurde HDP, troisième force politique du pays.


En 2018, lors de la dernière présidentielle, le chef de l'Etat l'avait emporté au premier tour avec plus de 52,5 % des voix. Un ballotage, qui obligerait à un second tour le 28 mai, constituerait déjà pour lui un revers.

M. Erdogan a promis de respecter le verdict des urnes, surveillées par des centaines de milliers de scrutateurs des deux camps et dont il a toujours tiré sa légitimité.

Il se présente cette fois à un pays usé par une crise économique, avec une monnaie dévaluée de moitié en deux ans et une inflation qui a dépassé les 85% à l'automne.

Face à lui, Kemal Kiliçdaroglu a joué la carte de l'apaisement, promettant le rétablissement de l'Etat de droit et le respect des institutions, malmenés au cours des dix dernières années par la dérive autocratique de M. Erdogan.

Selon les sondages, ses discours brefs, calmes, à rebours des envolées et invectives de M. Erdogan, ont séduit une majorité des plus de 5 millions de jeunes Turcs qui voteront pour la première fois.

Une forme de "printemps turc" qui sera scruté de près à l'étranger. Car la Turquie, membre de l'Otan, jouit d'une position unique entre Europe et Moyen-Orient, et est un acteur diplomatique majeur.

Les bureaux de vote fermeront à 17H00 (14H00 GMT).

Roger Barake, avec AFP
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