Brigitte Macron, Michelle Obama ou Jacinda Ardern... Ces femmes de pouvoir ont en commun d'avoir été victimes dans leur pays de fausses informations au sujet de leur identité de genre ou leur sexualité, visant à les moquer, voire les humilier.
La Première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern et l'ex-Première dame américaine Michelle Obama avaient elles aussi été ciblées par des rumeurs prétendant qu'elles étaient nées assignées homme, en 2017 et 2018.
Ces rumeurs se répandent comme une traînée de poudre sur internet. Et peu importe que personne ou presque ne croit que Brigitte Macron soit une femme transgenre, elles ouvrent la porte aux insultes, aux dénigrements voire au cyberharcèlement.
A l'image de ces assauts répétés subis par ces femmes puissantes, cette "désinformation genrée" touche en réalité une population plus large composée de femmes, de minorités sexuelles ou de genre engagées dans la vie publique à différentes échelles de responsabilités.
Ces contenus les prenant pour cible visent à "les réduire au silence et les évincer de la sphère politique", selon Lucina Di Meco, militante féministe et cofondatrice de #ShePersisted, une initiative mondiale pour lutter contre cette désinformation.
Ces rumeurs ont un "impact dans la vie réelle", souligne Marylie Breuil, membre du collectif féministe français Nous Toutes, engagé notamment contre les violences sexistes, sexuelles ou économiques.
A cause d'elles, "la personne qui s'expose publiquement peut voir sa carrière être totalement défaite", un phénomène souvent accompagné par un harcèlement en ligne voire hors ligne.
En 2013, une rumeur selon laquelle elle avait dansé en sous-vêtements à la télévision a valu à Laura Boldrini, ex-présidente de la Chambre des députés italienne, des milliers d'insultes sexistes, des menaces de viol et des montages pornographiques.
Intidhar Ahmed Jassim, candidate aux élections parlementaires en Irak début 2018, dut renoncer à se présenter, harcelée par des internautes qui ont prétendu la reconnaître dans une sextape.
En empêchant ou en décourageant ces femmes de participer à la vie publique, la désinformation genrée contribue à "l'érosion des institutions démocratiques", considère Lucina di Meco, de #ShePersisted.
En véhiculant des stéréotypes, cette forme de désinformation "dit des choses de ce qui est perçu comme non-conforme par rapport à un modèle hétéronormatif classique", analyse Réjane Sénac, directrice de recherche CNRS à l'Institut d'études politiques de Paris.
Dans le cas des rumeurs sur Brigitte Macron, la transidentité est utilisée comme un "véhicule" pour "fracturer la réputation de quelqu'un qui a une position de pouvoir dans la hiérarchie sociale", ici Emmanuel Macron, selon Maud-Yeuse Thomas, anthropologue et cofondatrice de l'Observatoire des transidentités.
Faire courir ces rumeurs sur une transidentité ou une homosexualité supposées renforce la stigmatisation des personnes LGBTI+.
En accusant Mme Macron d'une "masculinité cachée", ceux qui propagent cette rumeur utilisent la transidentité qu'ils considèrent comme une humiliation, analyse Marie-Joseph Bertini, professeure en sciences de l'information et la communication à l'Université Nice Sophia Antipolis
Mais ils en profitent aussi pour réactiver un soupçon que sa relation avec M. Macron "cache forcément" une homosexualité qui rappellerait la rumeur ayant circulé à ce sujet pendant la campagne présidentielle de 2017.
Au-delà des personnes influentes qu'elles visent, ces campagnes de désinformation contribuent très probablement "à l'augmentation, ces dernières années, des crimes haineux signalés contre les personnes LGBTI+ en Europe", alertait en juillet le Parlement européen.
AFP
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