L'Opéra de Paris: pas de deux à Marseille
©Crédit photo : Christophe Simon / AFP
Baignant dans la lumière méditerranéenne du 5 juin 2023, deux étoiles de l'Opéra national de Paris, Julien Guillemard, 27 ans, et Marion Gautier de Chamace, 26 ans, ont transposé la grâce de leurs mouvements au cœur du quartier nord de Marseille, Busserine. Ces virtuoses de la danse, habitués à l'enceinte sacrée du Palais Garnier, ont orchestré un atelier exceptionnel, dansant avec les enfants de ce secteur fréquemment délaissé.

Initié par l'Opéra de Paris, un programme audacieux de danse ambitionne d'embrasser la diversité de Marseille en proposant des ateliers de danse aux jeunes, illustrant ainsi une vision renouvelée de l'inclusion par la culture et le pont culturel entre la capitale de la France et les diverses cités.
«Non, l'Opéra de Paris n'est pas réservé aux beaux quartiers»: au pied des barres d'immeubles d'une cité de Marseille, Sarah, Wellia, Hidaya et leurs camarades adolescentes s'initient, guidés par deux danseurs de la prestigieuse institution, à leur première chorégraphie de danse contemporaine.
«En deux heures, on ne va pas vous apprendre à danser... On va juste essayer de vous transmettre une petite part de ce qu'est notre quotidien», les met d'emblée à l'aise Julien Guillemard, 27 ans, du corps de ballet de l'Opéra de Paris.
«L'idée c'est surtout d'apprendre de soi et des autres», déclare-t-il, à l'attention des dix jeunes filles de 10 à 14 ans réunies pour cet atelier hors norme, avant que sa comparse, Marion Gautier de Charnacé, 26 ans, n'entame l'échauffement.
Crédit photo : Christophe Simon / AFP
Une porte qui grince et qu'il faut huiler, de l'air qu'on pousse et qui résiste, une bougie qui fond: avec une énergie communicative, la danseuse multiplie les images pour rendre plus lisibles les mouvements auprès du groupe qui, tantôt en cercle, tantôt dispersé, ne ménage pas sa peine.
«Quand je vais taper dans les mains, on va essayer de se relever le plus vite possible», lance la pétillante danseuse, faisant alterner gestes doux, relaxation et phases cardio, pour le plus grand bonheur des participantes, dont beaucoup arborent de larges sourires.

«Quand tu fais du contemporain, il faut être souple, plus flexible, agile», note Wellia, 11 ans, crop top rose flashy, les cheveux noués en chignon. Chaque semaine, elle suit avec ses camarades un cours de danse afro-urbaine dans ce centre social tout juste rénové de la Busserine dans le nord de la ville.
Le ballet classique est «quand même un monde un peu élitiste. Que des jeunes de milieux populaires puissent accéder à cela, c'est merveilleux», «ce ne sera plus des a priori mais quelque chose qu'elles auront vécu», estime Rania Yahyaoui, la directrice du centre social de l'Agora.
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«Aller dans les cités, c'est aussi casser une forme d'élitisme, (...) que des mondes aussi éloignés se rencontrent», souligne Dominique Bluzet, le directeur des Théâtres, qui regroupe quatre salles de spectacle à Marseille et Aix-en-Provence, à l'origine de ce partenariat avec l'Opéra de Paris.
À la fin de l'échauffement, sur un rythme endiablé, les dix jeunes filles montrent à Marion et Julien la chorégraphie qu'elles présenteront pour le spectacle de fin d'année. «Le but n'est pas d'en faire des spectateurs de théâtre, le but c'est d'avoir organisé une rencontre qui va laisser des traces», souligne Dominique Bluzet.
«L'art c'est quand même la plus belle des excuses pour se retrouver ensemble et partager.» Or, «sans ce projet-là, on ne se serait pas rencontrés», conclut Marion.
Marie-Christine Tayah avec AFP
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