Amnesty International a lancé ce mardi 8 août une nouvelle action, #MyOpinionIsNotaCrime, dans le cadre de laquelle elle demande au Parlement libanais d’abolir toutes les lois criminalisant l’insulte et la diffamation.
L’organisation a ainsi appelé les autorités libanaises à abandonner immédiatement les poursuites engagées contre des journalistes, des défenseurs des droits de l’Homme, des militants et d’autres personnes critiquant des représentants de l’État.
Cette action, axée sur le Liban, est menée alors que les poursuites visant des personnes ayant critiqué des figures politiques, sécuritaires, judiciaires et religieuses se multiplient dans le pays. Selon l’organisation, ces personnes – des milliers – auraient toutes fait l’objet d’enquêtes criminelles depuis 2015.
«Les lois libanaises relatives aux insultes et à la diffamation sont conçues pour protéger les personnes au pouvoir contre toute forme de critique. À l’heure où les Libanaises et les Libanais devraient discuter librement de ce qu’ils attendent de leurs dirigeants, compte tenu des souffrances aiguës causées par la crise économique, de hauts responsables s’en prennent aux journalistes, aux défenseurs des droits de l’Homme, aux militants et à d’autres personnes qui expriment pacifiquement leurs opinions et s’efforcent de dénoncer des faits de corruption présumés», a déclaré la directrice adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnesty International, Aya Majzoub.
Selon ses explications, la nouvelle action #MyOpinionIsNotaCrime appelle les autorités libanaises à abolir les articles qui criminalisent les insultes du Code pénal, de la Loi sur les imprimés et du Code de justice militaire, et à remplacer les articles sur la diffamation par de nouvelles dispositions civiles», a souligné Aya Majzoub.
Dans ce contexte, Amnesty a affirmé avoir documenté nombre d’enquêtes et de poursuites liées à la liberté d’expression, constatant une importante augmentation de leur nombre après le mouvement de protestation d’octobre 2019.
L’ONG a notamment indiqué que de hauts responsables utilisent de plus en plus souvent des dispositions pénales «répressives, non conformes au droit international, afin de réduire l’opposition au silence», alors que le Liban est plongé dans une crise multidimensionnelle et que le mécontentement de la population est à son apogée.
Parmi les cas retenus par Amnesty International, ceux de la journaliste Dima Sadek, condamnée en juillet dernier à un an de prison et au paiement d’une amende de 110 millions de livres libanaises pour diffamation criminelle et provocation, après avoir critiqué une action du Courant patriotique libre (CPL) sur Twitter.
«Le procès de Dima Sadek a été une parodie de justice et illustre la façon dont des lois pénales archaïques sont utilisées pour sanctionner l’opposition ou la réduire au silence. Sa condamnation à une peine de prison envoie un message paralysant aux journalistes moins connus dans le pays et dissuadera les gens de dénoncer les puissants – qu’il s’agisse de représentants de l’État, de dirigeants de partis politiques ou de figures religieuses –, en particulier à une époque où l’impunité est généralisée», a déploré Aya Majzoub.
Amnesty a en outre cité le cas de Jean Kassir, cofondateur du site d’informations Mégaphone, convoqué pour un interrogatoire à la suite d'une plainte pour diffamation criminelle déposée contre lui par le procureur de la République, Ghassan Oueidate. Ce dernier avait été désigné par le site comme étant l’un des «fugitifs de la justice» dans l’affaire de l’explosion du port de Beyrouth. La mobilisation populaire et la solidarité avec Jean Kassir avaient incité le procureur à abandonner les poursuites contre lui.
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