Maintenir un climat de «ni guerre, ni paix»… Conserver le «dosage» qu’il faut en entretenant une atmosphère belliqueuse pour satisfaire son opinion interne, mais sans aller jusqu’à la confrontation militaire ouverte avec Israël. Telle est la stratégie que paraît suivre le Hezbollah. Du moins jusqu’à présent… Cela dure depuis août 2006…
Le dernier épisode portant sur le renouvellement du mandat de la Finul et le débat dont ont été le théâtre à ce propos le Palais de verre à New-York et les grandes chancelleries occidentales constituent l’illustration de ce «jeu» diplomatique (et médiatique) auquel se livrent les acteurs présents sur la scène du Liban-Sud. La formation chiite, bénéficiant du soutien du gouvernement en place et de la «compréhension» du pouvoir français, a mené une campagne assidue afin de neutraliser la clause de la résolution du Conseil de Sécurité de l’Onu accordant une liberté totale de mouvement aux Casques Bleus dans leur zone d’opération.
Le Hezbollah n’a pas abouti à ses desseins et le Liban s’est contenté d’un lot de consolation, d’une vague mention stipulant une liberté d’action de la Finul «en coordination avec le gouvernement libanais». Pas assez au goût du parti chiite… Le chef de la diplomatie Abdallah Bou Habib devait d’ailleurs souligner sans détours que Beyrouth tentera l’an prochain de faire mieux! En d’autres termes, de restreindre les mouvements de la Finul… pour permettre au poulain des mollahs de Téhéran d’accroître ses débordements mais… dans la légalité! Le Hezbollah se montre en effet très soucieux d’obtenir pour sa stature milicienne une couverture légale de la part d’instances officielles, locales ou étrangères, même s’il les dédaigne et les méprise par la suite, après avoir obtenu ce qu’il veut.
Dans les faits, on pourrait s’attendre au cours des douze prochains mois à une multiplication des actions ponctuelles sur le terrain visant à entraver de facto l’action des Casques bleus. Comme à son habitude dans ce genre de situation, la formation pro-iranienne n’agira pas directement et s’abstiendra de monter elle-même au créneau. Elle interviendra par le biais d’«habitants», de préférence des «habitantes», qui s’opposeront aux patrouilles des soldats onusiens sous divers prétextes. Peu importe la nature des prétextes…
Cette tactique – à laquelle les milices qui contrôlaient Beyrouth-Ouest durant la guerre avaient parfois recours pour fermer les voies de passage entre les deux secteurs de la capitale – présente un avantage multiple pour le «parti de Dieu»: elle lui permet, comme c’est le cas depuis 2006, de télécommander un «dérapage» contrôlé sur le terrain quand il le juge utile, de rappeler ainsi sa capacité de nuisance, et de satisfaire sa base populaire en entretenant une illusion de «résistance», sans trop attirer l’attention sur son arsenal militaire.
A priori, le Hezbollah n’aurait pas intérêt à aller plus loin – militairement – que cette situation de «ni guerre, ni paix », surtout après la délimitation de la frontière maritime entre Israël et le Liban, et le début des travaux de forage au bloc 9, situé pratiquement à cheval sur cette frontière. Certains observateurs affirment que le parti chiite et, derrière lui, les mollahs iraniens auraient avalisé l’accord avec l’État hébreu, pour entamer les travaux au bloc 9, en contrepartie de revenus substantiels qui iraient, sous diverses formes, à la formation pro-iranienne et à son parrain. Après tout, Israël a bien obtenu le droit d’exploiter – avec le consentement de Téhéran et de son allié libanais – une partie du champ gazier de Cana, situé au bloc 9… «L’argent n’a pas d’odeur», souligne le dicton populaire. Surtout entre «ennemis» pragmatiques…
Cette situation de mi-figue mi-raisin instaurée par le Hezbollah au Sud constitue ainsi la partie visible de l’iceberg qui cache mal, à en croire divers experts, des ententes tacites et des marchés inavouables. Mais ne dit-on pas que dans le domaine de la macro-politique rien n’est vraiment totalement blanc ou noir?
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