Lors de la célébration de la fête nationale, l’indépendance semble, une fois de plus, empreinte d’un lourd sentiment d’inachevé, au point où nous avons presque honte de la célébrer. Même la traditionnelle parade militaire, habituellement sobre, n’a pas eu lieu cette année, en raison de l’absence d’un président de la République et du manque de conscience nationale. Au lieu de hisser le drapeau, ce sont les conditions portant sur la présidentielle qui ont prévalu, favorisant la logique du «moi ou personne».
Dans mes souvenirs, la célébration de l’indépendance était étroitement associée à l’armée libanaise. Durant notre jeunesse, nous portions avec fierté l’uniforme militaire et brandissions joyeusement des drapeaux en papier. En grandissant, l’armée est devenue pour nous un symbole d’espoir, un rempart contre les agissements des politiciens dont les actions ont malheureusement mené le pays vers des chemins peu prometteurs.
Aujourd’hui, l’armée est confrontée à des défis, non pas en raison d’un manque de ressources. La troupe demeure capable de faire face à la crise, tout comme elle l’a fait à maintes reprises par le passé. Cependant, elle est actuellement confrontée à des remous politiques que son commandant avait anticipés et cherchait à éviter dès son accession à la tête de l’armée. Il s’est efforcé de la protéger en empêchant toute ingérence des politiciens, même dans les nominations militaires, alors que l’armée avait souvent été utilisée comme terrain de jeu servant les aspirations électorales des politiciens.
Le mandat de Joseph Aoun est limpide, marqué par une conduite empreinte de dignité, sans la moindre implication dans des affaires financières douteuses ou des manœuvres politiques déviantes. Sa conduite est demeurée exemplaire, à l’écart des influences néfastes émanant de certains hommes politiques, en particulier ceux qui étaient proches de lui. Ces derniers ont, en effet, tenté de l’influencer par leurs requêtes, leur pouvoir et leurs conditions.
Ils espéraient qu’il s’opposerait au mouvement populaire du 17 Octobre, mais il a préféré se tenir aux côtés du soldat dont les yeux se sont remplis de larmes en étant témoin de la révolution du peuple, de ses concitoyens affamés et de ceux qui se faisaient du mauvais sang pour l’avenir de leur pays.
Ils ont tenté de le manipuler, mais il a choisi de rester maître de ses décisions, ne faisant aucune concession, n’admettant aucune indulgence et refusant toute atteinte à ses prérogatives par l’intermédiaire des ministres de la Défense qui ont été utilisés pour le mettre sous pression.
En raison du contraste saisissant entre l’image que Joseph Aoun représente et la leur, ils ont engagé, aujourd’hui, cette lutte contre lui.
Si Joseph Aoun était considéré comme un simple outil, ils auraient prolongé son mandat, ne se souciant ni des lois ni de ses prérogatives, tout comme ils font aujourd’hui fi des droits des chrétiens en exigeant la nomination d’un chef de l’armée en l’absence de président de la République, leur principal souci étant leurs propres intérêts. La priorité de Joseph Aoun, en revanche, demeure l’armée. Ils cherchent uniquement à l’évincer du chemin menant à Baabda. Pourvu que Joseph Aoun ne réussisse pas, à leurs yeux, à édifier un pays et à faire appliquer la loi car cela ne correspond pas à leurs desseins et mettra en lumière leur passé, dont aucun Libanais n'est fier, même en ces jours difficiles.
Partant, peut-on aspirer à une véritable indépendance? Sans aucun doute, nous continuerons à entretenir nos rêves, face à ceux qui ternissent l'image du pays et ciblent son armée de diverses manières. Nous demeurerons aux côtés de la vérité, même si cette vérité est souvent bafouée.
«Il faut être deux pour découvrir la vérité; l’un pour la dire et l’autre pour la comprendre.» La citation est de Gibran Khalil Gibran (une précision qui s’impose pour éviter toute interprétation erronée).
Lire aussi
Commentaires