L'époustouflant cheminement de Nathalie Naoum de Kfarchima à Madfoun 

C’est dans cette pièce, intitulée Min Kfarchima lal Madfoun, que Nathalie Naoum fait son grand retour. Après un long parcours dans le monde de la télévision et du journalisme et à la suite d’une période où l’on ne l’a plus revue devant les caméras, elle fait une apparition époustouflante sur les planches du théâtre Le Monnot, dans une pièce de théâtre écrite par l’incomparable Yehia Jaber.
Après avoir écrit et mis en scène Mjaddra Hamra en 2018, où il relate les histoires de trois femmes de confession chiite, interprétées brillamment par Anjo Rihane, puis en 2022, Morphine, la seconde pièce de la trilogie, avec l’actrice Sawsan Chawraba qui met à l’honneur la tragédie d’une femme atteinte de cancer, Yehia Jaber réalise donc une nouvelle pièce où il met en valeur le climat chrétien au Liban à travers le drame personnel d’une femme.
Derrière les coulisses, Nathalie Naoum raconte que, lors d’une rencontre avec Yehia Jaber, elle lui demande spontanément de lui écrire une pièce. Ce dernier la prend au mot. Durant six mois de travail acharné et après de longues heures à discuter autour de la personnalité de l’actrice et de sa vision personnelle de la vie, le scénario voit le jour.
Elle, qui n’avait jamais fait de théâtre, se met donc à nu (en robe pointillée) sur les planches. Dans une ambiance minimaliste à souhait, sur une scène sans décor, avec pour seuls accessoires une chaise et un foulard, l’actrice livre une performance de haut niveau en monologuant durant presque deux heures.
Elle joue le rôle de Laura, une femme maronite quinquagénaire qui découvre l’adultère de son époux, puissant avocat spécialiste des divorces et de rite orthodoxe, avec sa meilleure amie.
Nathalie Naoum tient le public en haleine en alternant moments hilares et dramatiques, faisant un parallélisme subtil entre la situation libanaise vue par une femme de confession chrétienne. Le succès de cette pièce vient du fait que les différents problèmes sociaux, économiques, et culturels sont élucidés avec subtilité, depuis la guerre civile et jusqu’à la vision erronée de ceux qui habitent entre Beyrouth-Est et Beyrouth-Ouest, en passant par tous les préjugés et les faux-semblants, les amitiés et l’amour, l’adultère et la vie de famille sous les bombes.
Tous ces sujets sont abordés avec brio, chaque spectateur se retrouve quelque part entre Kfarchima et Madfoun, en commençant par Tabaris à Achrafieh, puis en passant par le tunnel de Nahr el-Kalb, témoin de tant de drames sous les bras grands ouverts du Christ Roi, puis par Jounieh sous la protection de la Vierge de Harissa pour arriver à Jbeil.


L’actrice chante et danse sur scène pour briser les moments forts et lourds. Elle redonne du souffle au public en se dandinant devant sa marmite de «chich barak» pour essayer de tenter son mari et fait référence aux artistes héros de l’époque, comme Philémon Wehbe, Melhem Barakat ou Majida el-Roumi, pour donner plus de ton à ses chansons.
Elle voudrait humilier son mari en dévoilant publiquement son adultère, mais elle finit par tourner en rond, ne sachant plus quelle destination prendre, au risque de se retrouver à Madfoun, qui symbolise la mort. («Enterré» en arabe).
Un autre sujet épineux est mis en évidence durant toute la pièce: la solitude. D’où l’hésitation de la femme à vouloir faire face au divorce. Elle ne veut pas se retrouver seule comme son voisin Toufic, que l’on retrouve mort dans sa baignoire.
La pièce est en cours jusqu’au 24 mars au théâtre Le Monnot et sera bientôt jouée au théâtre Al-Madina et au Béryte. Notre «Natalou» nationale continuera à surprendre le public durant la saison estivale.
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