Les États-Unis quadruplent les droits de douane sur les véhicules électriques chinois
©(Photo de Mandel NGAN / AFP)
Les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine s’intensifient alors que Washington annonce un quadruplement des droits de douane sur les véhicules électriques chinois, une mesure justifiée par des accusations de concurrence déloyale.

La Chine «triche» mais «nous n’allons pas (la) laisser inonder notre marché», a affirmé mardi le président américain Joe Biden, pour justifier le quadruplement des droits de douane sur les véhicules électriques chinois annoncé plus tôt dans la journée.

«Nous ne laisserons jamais la Chine contrôler le marché pour ce type de véhicule», a-t-il insisté lors d’une conférence de presse à la Maison Blanche, estimant qu’il est «impossible pour (nos) constructeurs automobiles de la concurrencer honnêtement».

En début de journée, le gouvernement américain a annoncé une forte hausse des droits de douanes pour ce type de véhicules, qui passent de 25% à 100%, parmi une liste d’augmentation concernant plusieurs autres secteurs considérés comme «stratégiques», au premier rang desquels les semi-conducteurs ou les batteries.

Une décision qui «affectera gravement l’atmosphère de la coopération bilatérale», a aussitôt affirmé le ministère chinois du Commerce, appelant les États-Unis «à revenir immédiatement sur leurs actions erronées et à annuler les mesures tarifaires supplémentaires contre la Chine». Exprimant sa «forte désapprobation», Pékin a souligné que «l’OMC a depuis longtemps conclu» que les tarifs américains «violent ses règles», mais «les États-Unis persistent dans leurs erreurs encore et encore».

La veille, la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, avait souligné la nécessité, pour la Maison Blanche, de «s’assurer que le stimulus apporté par l’IRA (le grand plan vert voté il y a un an, NDLR) pour soutenir ces industries, que ces investissements soient protégés». Le gouvernement américain a investi plus de 860 milliards de dollars, via l’IRA, afin d’accélérer la production de voitures électriques, batteries pour véhicules, mais aussi panneaux solaires ou éoliennes «made in America».

Mais Washington accuse Pékin de soutenir fortement ses industries dans ces secteurs stratégiques avec d’importantes subventions entraînant une surproduction écoulée à prix cassés par les entreprises chinoises sur le marché mondial, empêchant le développement d’industries concurrentes dans d’autres pays. Une crainte partagée par l’Union européenne et d’autres pays, tels que la Turquie, le Brésil ou l’Inde, a souligné un responsable américain.

Le président américain «veut mettre d’importants droits de douanes sur la Chine, ce qui est ce que j’ai proposé. Où étiez-vous pendant trois ans et demi?» a fait mine de s’interroger son concurrent républicain pour les élections de novembre, Donald Trump, en marge de son procès à New York.

«Mon prédécesseur a échoué à protéger les États-Unis», lui a répondu Joe Biden, ajoutant que M. Trump «veut augmenter tous les droits de douane, il n’a tout simplement pas compris».


«Signal aux constructeurs américains»

Au-delà du quadruplement sur les véhicules électriques, Washington fait passer ceux visant l’acier et l’aluminium de 7,5% à 25%, tout comme pour les batteries, et ceux pour les semi-conducteurs de 25% à 50%, appliqués désormais aux panneaux solaires et à certains produits médicaux. La directrice du Conseil national économique rattaché à la Maison Blanche, Lael Brainard, a justifié ces choix par le fait que la Chine «finance sa croissance aux dépens des autres». «Du fait de ses pratiques déloyales, la Chine disposera d’une capacité de production de panneaux solaires qui sera plus de deux fois supérieure à la demande mondiale anticipée à court terme», a-t-elle estimé.

Ces droits de douane peuvent «renforcer les outils à disposition du gouvernement pour accélérer la relocalisation ou le friendshoring (l’installation dans des pays géographiquement ou idéologiquement proches, NDLR) de la production des secteurs considérés comme stratégiques», a expliqué à l’AFP Emily Benson, chercheuse pour le CSIS. «C’est un signal aux constructeurs américains que l’administration Biden cherche à (les) protéger», a estimé Paul Triolo, chercheur spécialisé sur la Chine pour Albright Stonebridge Group.

Le syndicat des ouvriers de la métallurgie (USW) a salué, dans un communiqué, la décision de la Maison Blanche, la jugeant nécessaire pour «soutenir notre production intérieure et nos ouvriers».

La décision intervient à l’occasion de la révision des droits de douane mis en place par Donald Trump. Plus de 300 milliards de dollars supplémentaires de droits de douanes avaient été imposés à l’époque sur des produits chinois importés aux États-Unis.

À son arrivée au pouvoir en 2021, Joe Biden a maintenu les tarifs douaniers tous azimuts de son prédécesseur, y ajoutant une série de mesures plus ciblées restreignant l’accès de Pékin aux technologies de pointe ou aux investissements américains.

Un responsable américain a confirmé à l’AFP qu’aucun droit de douane en place n’était supprimé, les 18 milliards annoncés mardi correspondant à la hausse de droits existants et à la création de nouveaux.

Erwan Lucas, avec AFP
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