Le monde du cinéma pleure la disparition de Robert Towne, décédé à 89 ans. Oscarisé pour Chinatown, ce scénariste de génie a marqué l’histoire d’Hollywood avec ses dialogues incisifs et ses intrigues complexes, laissant une empreinte indélébile sur le septième art.
Robert Towne, l’un des plus grands scénaristes de l’histoire du cinéma américain, s’est éteint paisiblement à l’âge de 89 ans, entouré de sa famille, le 1er juillet 2024 à Los Angeles. Sa disparition marque la fin d’une ère pour Hollywood, celle du Nouvel Hollywood des années 1970, dont il fut l’un des artisans les plus talentueux et influents.
Né en 1934, Robert Towne a commencé sa carrière dans les années 1960 comme scénariste pour des productions à petit budget. Mais c’est dans la décennie suivante qu’il va véritablement s’imposer comme l’un des maîtres incontestés de l’écriture cinématographique. Son chef-d’œuvre, Chinatown (1974), reste à ce jour considéré par beaucoup comme le meilleur scénario original jamais écrit pour le grand écran.
Ce film noir, qui met en scène Jack Nicholson dans le rôle d’un détective privé enquêtant sur une affaire de corruption dans le Los Angeles des années 1930, est un modèle du genre. L’intrigue complexe, les dialogues ciselés et l’atmosphère trouble qui s’en dégage ont fait de Chinatown un classique instantané, récompensé par l’Oscar du meilleur scénario original en 1975.
Mais le talent de Towne ne s’est pas limité à ce seul film. Il a été nommé aux Oscars à trois reprises consécutives dans les années 1970, pour The Last Detail (1973), Chinatown (1974) et Shampoo (1975), co-écrit avec Warren Beatty. Cette dernière nomination lui a valu les éloges de Lee Grant, oscarisée pour son rôle dans le film, qui a salué sur les réseaux sociaux «une vie, comme les personnages qu’il a créés, incisive, iconoclaste et entièrement originale».
Towne était également réputé pour son travail de «script doctor», intervenant sur des scénarios existants pour les améliorer ou y ajouter des scènes clés. Bien que souvent non crédité, son apport a été crucial pour des films devenus cultes comme Bonnie and Clyde (1967) ou The Godfather (1972). Francis Ford Coppola lui-même a tenu à le remercier publiquement lors de son discours aux Oscars pour une scène mémorable entre Al Pacino et Marlon Brando.
Sa carrière a connu quelques revers, notamment avec Greystoke : The Legend of Tarzan, Lord of the Apes (1984), dont il a désavoué le résultat final au point d’utiliser le nom de son chien comme pseudonyme au générique. La suite de Chinatown , The Two Jakes (1990), n’a pas non plus rencontré le succès escompté.
Cependant, Towne a su rebondir en collaborant avec Tom Cruise sur plusieurs projets à succès dans les années 1990, notamment Days of Thunder, The Firm et les deux premiers volets de la franchise Mission : Impossible. Il a également réalisé plusieurs films, dont Personal Best (1982) et Tequila Sunrise (1988), démontrant une polyvalence rare dans l’industrie.
L’influence de Robert Towne sur le cinéma américain est incommensurable. Son style unique, mêlant intrigue sophistiquée, dialogues percutants et critique sociale, a inspiré des générations de scénaristes. En 2006, la Writers Guild of America a classé Chinatown au troisième rang des plus grands scénarios de tous les temps, juste derrière Casablanca et The Godfather, deux films sur lesquels Towne avait également travaillé.
Son décès a suscité de nombreux hommages dans l’industrie du cinéma. L’American Film Institute a salué son «influence éternelle», tandis que de nombreux cinéastes et critiques ont souligné l’importance de son héritage. Scott Tobias, dans un article récent du Guardian, affirmait qu’aucun scénario original des 50 dernières années n’avait égalé celui de Chinatown en termes d’élégance narrative, de charge politique et d’évocation historique.
Robert Towne laisse derrière lui sa seconde épouse, Luisa, et ses filles Chiara et Katharine. Sa famille a annoncé qu’une cérémonie en son honneur serait organisée ultérieurement, demandant le respect de leur intimité en ces temps de deuil.
Avec AFP
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