Début juillet, les Britanniques et les Français se sont rendus aux urnes pour élire de nouveaux parlements. Dans les deux pays, la gauche a remporté la victoire avec le Parti travailliste en Grande-Bretagne et le Nouveau Front populaire (NPF) en France. Cependant, ces victoires de la gauche ne signifient pas pour autant des défaites pour l’extrême droite, contrairement à ce que certains pourraient penser. Les résultats montrent plutôt que l’extrême droite continue de gagner du terrain en Europe.
Au Royaume-Uni, le parti de droite anti-immigration Reform UK a remporté environ 14% des voix, ce qui correspond à 5 sièges sur les 650 du Parlement. Ce résultat a également joué un rôle significatif dans la division du vote de droite en Grande-Bretagne, permettant ainsi au Parti travailliste de remporter 412 sièges malgré seulement 34% des voix. Le Parti conservateur a, quant à lui, subi sa pire défaite de l’histoire, beaucoup de ses électeurs ayant migré vers Reform UK.
Le faible nombre de sièges obtenus par Reform UK s’explique par le système électoral britannique de «premier arrivé, premier servi», où le parti ayant le plus de voix dans une circonscription remporte le siège. Aussi, bien que Reform soit arrivé deuxième dans de nombreuses circonscriptions, il n’a fini par remporter la première place que dans une poignée d’entre elles. Selon un système de représentation proportionnelle, le parti aurait remporté environ 91 sièges, ce qui constituerait une victoire révolutionnaire pour un parti relativement nouveau.
Cette élection serait, selon la Société pour la réforme électorale, «la plus disproportionnée de l’histoire électorale britannique». La stratégie électorale de Reform UK a également contribué à leur faible nombre de sièges, car ils ne se sont pas concentrés sur certaines circonscriptions marginales. Parallèlement, le baron travailliste Lord Mandelson a déclaré à la BBC que la stratégie du Parti travailliste avait été de maximiser ses chances de remporter un grand nombre de sièges, considérés comme gagnables, plutôt que d’augmenter sa part de voix à l’échelle nationale.
En France, une situation similaire s’est produite. Le Rassemblement national (RN), parti d’extrême droite, a également perdu l’élection face au NPF. Cependant, le RN a obtenu 33,3% des voix au premier tour, ce qui a incité le parti centriste Ensemble de Macron à collaborer avec le NPF afin de former un «cordon sanitaire» contre le RN. Cette stratégie consistait à ce que les candidats d’Ensemble et du NPF arrivés en troisième position au premier tour se retirent de la course pour éviter une division des voix qui aurait permis au RN de l’emporter. Cette approche a porté ses fruits puisque le NPF et Ensemble ont respectivement pris la première et la deuxième place. Le RN, arrivé troisième, a été surpris par ce résultat après avoir été confiant de pouvoir obtenir le plus de sièges à l’Assemblée. Comme dans le cas de Reform au Royaume-Uni, une répartition disproportionnée des voix a joué un rôle dans cette défaite. Le RN a remporté 37% des voix, soit plus de 11 points de pourcentage de plus que le NPF. Malgré cela, le RN a augmenté son nombre de sièges de 53, atteignant un total de 142 sièges sur les 577 que compte l’Assemblée nationale. Le manque d’unité au sein du NPF, dont les divisions sont apparues au grand jour pendant la campagne électorale, rendra encore plus difficile la formation d’un gouvernement, offrant potentiellement au RN une opportunité d’entrer au pouvoir.
Ces deux cas ne doivent pas être interprétés comme des défaites pour l’extrême droite, car ils illustrent la grande popularité et la compétitivité politique de ces mouvements, comme en témoignent les augmentations significatives de leur part de voix. Partant, ils s’inscrivent dans la tendance émergente de l’extrême droite à travers l’Europe. De plus, ces résultats ont renforcé l’extrême droite en tant qu’opposition. Cette position pourrait s’avérer plus avantageuse que d’être au gouvernement, car elle leur permet de maintenir le discours populiste anti-establishment qui les caractérise et de gagner davantage de soutien en vue des élections prochaines. En somme, ces élections révèlent une tendance claire et continue pour l’extrême droite, qui redéfinit désormais la politique européenne.
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