En 2006, le célèbre «Si j’avais su» aurait pu augurer d’un éveil de sentiments de remords après la destruction du Liban-Sud, de la banlieue et des milliers de morts. Les pays du Golfe avaient alors dépensé des milliards de dollars pour reconstruire le pays. Dix-neuf ans plus tard, les mêmes protagonistes sont sur scène. Les mêmes erreurs stratégiques aussi. Depuis le 8 octobre 2023, au moins 500 morts et 3.500 blessés sont à décompter parmi les Libanais. Pour quoi? Pour qui? On peut se le demander. Cette fois, le slogan est plus clair. Il s’agit de «l’axe de la résistance» qui offre un «front de soutien» à Gaza. Sauf que, concrètement, on ne voit pas vraiment en quoi entraîner le Liban dans le sang et la guerre a pu soulager les Gazaouis. Pire, après la destruction complète du territoire palestinien et la mort de plus de 40.000 personnes, l’architecte de l’attaque du 7 octobre, Yahya Sinouar, se voit proposer un sauf-conduit qui pourrait lui permettre de s’installer sous des cieux plus cléments. Les victimes palestiniennes apprécieront la délicate attention.
Au Liban, personne ne peut se réjouir de ce qui se passe. Même si nous sommes en désaccord total, depuis longtemps et dans tous les domaines, avec le Hezbollah, on ne peut pas oublier que les victimes sont libanaises. Donc la folie doit s’arrêter.
Le secrétaire général du Hezbollah ne veut pas d’une guerre totale qui serait un suicide militaire et politique. Il a besoin d’une porte de sortie pour garder son influence. Une porte que Benjamin Netanyahou ne veut obstinément pas ouvrir. Alors comment garder la face? Un moyen serait que M. Sinouar adresse un message de remerciements au Hezbollah, lui demandant d’arrêter son soutien, dans la mesure où le Hamas pourrait, contre toute évidence, afficher une prétendue victoire. Mission accomplie.
Dans la foulée, le gouvernement libanais pourrait ordonner à l’armée libanaise de se déployer en force à la frontière. Un peu simpliste, me direz-vous. Et vous auriez raison. Parce que les décideurs sont ailleurs, à Téhéran. D’officiels en officiels, de discours en discours, les dirigeants iraniens bombent le torse et paradent sereins.
Leur argument est pour le moins étonnant: «Nous faisons échec aux plans israéliens en exerçant le… contrôle de soi!» Ce qui est psychédélique, c’est qu’il y a des gens pour le croire. Pas fous les mollahs, ils n’ont aucune envie de subir le sort des Palestiniens et des Libanais. Ce qu’ils veulent, c’est négocier avec les Américains et obtenir des arrangements politiques et économiques pour leur pays. Les ripostes, ce n’est pas leur truc. Même après l’assassinat de Qassem Soleimani, ils avaient soigneusement prévenu les Américains qu’ils allaient tirer quelques missiles sur une base. En avril dernier, même chose. Des centaines de missiles et de drones avaient été lancés vers Israël, mais l’annonce avait été faite tellement en amont, qu’ils ont tous été interceptés. Ouf! La riposte n’a pas fait de victimes, mais pour les gens aux cerveaux lavés par des décennies de mensonges, il s’agissait d’une magnifique démonstration de puissance.
Ce qui est stupéfiant, c’est que pas un seul de leurs alliés proclamés (ou contraints) n’ose dire aux Iraniens: «Les gars, vous vous moquez de nous!» N’importe quel observateur un tantinet éveillé a compris depuis longtemps que Téhéran ne bougera pas le petit doigt pour les Libanais et les Palestiniens.
Proposition: Et si au Liban, la méthode du «contrôle de soi», qui a si bien réussi à Téhéran, était appliquée. Cela éviterait tant de larmes et de sang. Fallait y penser.
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