Je suis vieux et las. Je suis éreinté par une longue vie sans répit. Oh ! J’en ai vu des atrocités. Ce que j’espérais c’est mourir en paix. Mais le destin a décidé de jouer une dernière scène désastreuse dans le théâtre de mon petit pays.
N’allez pas croire que je ne sois pas solide, que je sois fragile ou que je manque de courage. Non. Je suis grand et bien bâti, j’ai la peau dure comme on dit. Mais elle est marquée, je porte sur elle les cicatrices, les peines, les blessures, les disparitions de mes amis les plus fidèles. Nous avons été détruits au fil du temps, alors que nous vivions épanouis, nombreux, solidaires les uns des autres. Notre tribu s’est amaigrie, aujourd’hui nous sommes encore quelques vieilles branches qui partagent un coin de terre paradisiaque, un véritable paysage de carte postale.
Croyez-moi, cela ne va pas durer. Nous n’avons ni les forces, ni les ressources, encore moins le soutien nécessaire pour contrer l’avenir. Nous restons simplement plantés là à attendre le funeste déclin.
Pourtant, ici, où je vis, on me respecte, je suis un symbole fort, une icône même. J’ai fondé une grande famille, nous sommes soudés les uns aux autres, presque fusionnels. Nous nous sommes étendus, bien enracinés dans notre espace. D’une certaine façon, je suis aussi un espoir. Un espoir fatigué. Je la pense ma vieille rengaine… « je-n’-cèdrai-pas ».
J’aime à croire que la jeunesse pourra nous sauver, elle est notre lumière. Les quelques jeunes recrus ont amené la fraîcheur d’un vent nouveau, ils sont pleins d’innocence, ils ne demandent qu’à s’épanouir ici, petits bourgeons fragiles. Ils ont cette capacité à nous tirer vers le haut, à nous partager leur énergie, nous donner des vitamines et à nous laisser entrevoir quelque lendemain plus heureux.
Et puis il y a eu la fin juillet.
L’atmosphère était suffocante, l’air sec, le vent avait tourné depuis longtemps en nous emportant de son souffle puissant. Les tensions avaient atteint leur paroxysme, les esprits échauffés et il n’a suffi que d’une étincelle pour voir le Liban s’embraser.
Je vous l’ai dit, je suis grand, fort et je m’en suis tiré. Mais mes vieux amis ont péri sans que je ne puisse les aider. Nous l’avons d’abord entendu, le grondement sourd de la bête féroce. Et puis nous les avons vues au loin, les flammes rouge vif et gourmandes, tout engloutir sur leur passage.
Je suis vieux et las. Je suis le plus âgé des cèdres de ce petit coin de la vieille forêt et je suis le seul survivant. Combien de temps encore vais-je devoir le supporter ?
Dessins: Camille Elamine.
N’allez pas croire que je ne sois pas solide, que je sois fragile ou que je manque de courage. Non. Je suis grand et bien bâti, j’ai la peau dure comme on dit. Mais elle est marquée, je porte sur elle les cicatrices, les peines, les blessures, les disparitions de mes amis les plus fidèles. Nous avons été détruits au fil du temps, alors que nous vivions épanouis, nombreux, solidaires les uns des autres. Notre tribu s’est amaigrie, aujourd’hui nous sommes encore quelques vieilles branches qui partagent un coin de terre paradisiaque, un véritable paysage de carte postale.
Croyez-moi, cela ne va pas durer. Nous n’avons ni les forces, ni les ressources, encore moins le soutien nécessaire pour contrer l’avenir. Nous restons simplement plantés là à attendre le funeste déclin.
Pourtant, ici, où je vis, on me respecte, je suis un symbole fort, une icône même. J’ai fondé une grande famille, nous sommes soudés les uns aux autres, presque fusionnels. Nous nous sommes étendus, bien enracinés dans notre espace. D’une certaine façon, je suis aussi un espoir. Un espoir fatigué. Je la pense ma vieille rengaine… « je-n’-cèdrai-pas ».
J’aime à croire que la jeunesse pourra nous sauver, elle est notre lumière. Les quelques jeunes recrus ont amené la fraîcheur d’un vent nouveau, ils sont pleins d’innocence, ils ne demandent qu’à s’épanouir ici, petits bourgeons fragiles. Ils ont cette capacité à nous tirer vers le haut, à nous partager leur énergie, nous donner des vitamines et à nous laisser entrevoir quelque lendemain plus heureux.
Et puis il y a eu la fin juillet.
L’atmosphère était suffocante, l’air sec, le vent avait tourné depuis longtemps en nous emportant de son souffle puissant. Les tensions avaient atteint leur paroxysme, les esprits échauffés et il n’a suffi que d’une étincelle pour voir le Liban s’embraser.
Je vous l’ai dit, je suis grand, fort et je m’en suis tiré. Mais mes vieux amis ont péri sans que je ne puisse les aider. Nous l’avons d’abord entendu, le grondement sourd de la bête féroce. Et puis nous les avons vues au loin, les flammes rouge vif et gourmandes, tout engloutir sur leur passage.
Je suis vieux et las. Je suis le plus âgé des cèdres de ce petit coin de la vieille forêt et je suis le seul survivant. Combien de temps encore vais-je devoir le supporter ?
Dessins: Camille Elamine.
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