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Le 23 mars, il faisait défection de manière spectaculaire en dénonçant devant l'Organisation des Etats américains (OEA) la "dictature" de Daniel Ortega au Nicaragua où plus de "177 prisonniers politiques" sont emprisonnés. Limogé, l'ex-ambassadeur nicaraguayen Arturo McFields évoque auprès de l'AFP par téléphone depuis les Etats-Unis, la situation dans son pays quatre ans après la sanglante répression des manifestations anti-gouvernementales.


AFP: Quelle est la situation au Nicaragua ?

(Arturo McFields) "La délinquance et le trafic de drogue augmentent, mais la police persécute et harcèle les responsables religieux, les journalistes, les chanteurs et les quelques rares défenseurs des droits humains qui restent encore dans le pays. C'est irrationnel. Mais toutes les morts ont leur résurrection et je pense que le Nicaragua va connaître son dimanche de gloire".
Que peut encore faire le gouvernement de Daniel Ortega ?

"Oser emprisonner des responsables religieux. Cela pourrait être une nouvelle étape de la répression. L'an dernier, le président a déclaré que dans n'importe quel autre pays, des religieux (qui critiquent le gouvernement) seraient en prison (...) Il les a qualifiés de terroristes".
Vous dites cela en raison de l'expulsion du nonce apostolique en mars ?

"Les menaces se sont poursuivies cette année et nous savons qu'ensuite elles se concrétisent. Je veux croire qu'il va y avoir de l'espérance. Les gens sont fatigués de tant de répression, même les fonctionnaires, les policiers, les militaires".
Cela peut-il prendre la forme de manifestations collectives ?

"Cette lassitude à un moment donné va se concrétiser d'une manière ou d'une autre dans une manifestation, dans quelque chose de différent. Comment je sais cela ? J'en suis la preuve vivante. J'étais à l'intérieur et j'en ai eu assez. Assez de tant de cruauté, de mauvais traitements. La répression est un boomerang. Quand la répression et la cruauté augmentent, cela vous révèle comme dictateur. Et la rhétorique habituelle de l'impérialisme (des États-Unis) et de la CIA et toutes ces choses tombent à plat".
Quels sont les projets du gouvernement ?

"La soif de pouvoir est très grande, même si aucun successeur n'a été désigné. Pour des raisons biologiques, (Daniel Ortega, 76 ans, et son épouse Rosario Murillo, 70 ans) ne peuvent pas durer éternellement. Cela pourrait être Rosario Murillo, mais on ne sait pas. Ce que l'on sait, c'est qu'ils veulent rester au pouvoir pour toujours. La seule façon d'éviter cela, c'est que l'opposition soit unie".
Vous évoquez un mécontentement au sein de gouvernement, c'est-à-dire ?


"Le gouvernement ne permet pas que les gens donnent leur avis de façon aussi catégorique. Je vous parle de l'atmosphère qui règne dans cet environnement et des interactions que l'on a quand on est haut fonctionnaire. On voit passer des commentaires, on entend des réactions. On ressent des choses et on se dit : je ne suis pas le seul.

Le gouvernement parvient à apaiser ces mécontentements grâce aux trois P : prison, prébendes et persuasion. La persuasion n'est pas beaucoup utilisée. Les avantages par prébendes il n'y en a pas parce qu'il n'y a plus de coopération (économique) avec le Venezuela. Donc ce qui est utilisé, c'est la prison.  Des fonctionnaires se voient retirer leur passeport, et cela a été renforcé après ce qu'il s'est passé avec moi".
Qui a le pouvoir, Daniel Ortega ou son épouse ?

"Au quotidien, Rosario Murillo est celle qui est en première ligne. Mais quand il s'agit de décisions de la plus haute importance, le président a le dernier mot".
Quel est votre statut actuel aux États-Unis ?

"J'ai demandé l'asile. Dans mon pays j'ai été désigné comme un traître à la patrie (...) si je rentre, m'attend une cellule dans la prison d'El Chipote (où sont emprisonnés les opposants)".
Qu'attendez-vous du gouvernement de Joe Biden ?

"Nous demandons l'extension d'un statut de protection temporaire pour les Nicaraguayens qui fuient leur pays. Qu'on leur permette de gagner leur vie honnêtement, parce que la "migra" (autorité migratoire américaine) peut les renvoyer dans un régime de terreur".

AFP

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