Nous savons maintenant que toutes les formes de l’amour ont leur origine dans la toute petite enfance et singulièrement dans la traversée des stades du développement psychosexuel. Au point qu’on a pu comparer l’état amoureux à un état de rêve, tellement sont fortement présentes les traces infantiles fantasmées de ces stades. En particulier au moment du déploiement de l’amour durant la phase œdipienne et de son association avec le désir sexuel. Celui-ci, si tout se passe bien, s’amarrera à la résolution du complexe œdipien et à l’intériorisation de l’interdit de l’inceste, ainsi qu’à l’acceptation de la castration, c'est-à-dire à l’intériorisation de la conviction que l’être humain ne peut qu’être manquant. C’est de cette résolution que dépendra le vécu de l’amour et de la sexualité chez la femme aussi bien que chez l’homme adulte.
Amour et sexualité s’exprimeront alors sous la forme d’un courant tendre qui s’alliera à un courant sexuel, selon Freud. Et la relation amoureuse adulte se caractérisera par l’alliance entre amour, tendresse et sexualité.
Lorsque Freud parle de sexualité, il ne limite pas du tout son sens à son expression génitale. Bien au contraire, il inclut dans cette notion l’origine de toutes les manifestations des sentiments affectueux. C’est pour cette raison qu’il l’accompagne toujours du terme de psycho (psychosexualité), comme on l’a vu. Pour lui, sexualité et amour (lieben en allemand) sont inséparables. Plus encore: «Nous savons depuis longtemps qu’un manque de satisfaction psychique, avec toutes ses conséquences, peut exister là même où les relations sexuelles normales ne font pas défaut.»
Lorsque, entre le sentiment tendre et la sexualité, se produit une coupure, on aboutit à un rabaissement de la vie amoureuse parce que l’autre est alors réduit à un statut d’objet, un objet de consommation avec pour but unique d’en soutirer un plaisir épisodique. C’est ce que l’expression anglaise «friends with benefits» désigne. Dans cette même lignée, on entend aujourd’hui, bien moins qu’avant, l’expression «faire l’amour». On dit plutôt: «tirer un coup» ou en arabe «عملت سكس» (j’ai fait du sexe). Certain(e)s auraient ainsi tendance à ne rechercher qu’une satisfaction éphémère issue du soulagement produit par la décharge d’un trop plein.
Certains hommes se retrouvent dans la situation où «Ils ne peuvent désirer là où ils aiment et ne peuvent aimer là où ils désirent» (Freud). Ils sont conduits à distinguer deux sortes de femmes: celles qu’ils dévalorisent, qu’ils rabaissent et qui prennent la figure de la prostituée, et celles qui sont élevées au rang de mères idéalisées. Certaines femmes s’identifient même à cette séparation masculine: elles cherchent un homme qui représente l’idéal paternel et un autre pour le plaisir sexuel. Avec, pour conséquence, dans les deux cas, le déclenchement de conflits intrapsychiques qui affectent le rapport à soi ainsi qu’aux autres. Sans oublier, pour les uns comme pour les autres, la force captivante des fantasmes dans l’acte sexuel. D’autres femmes vont même jusqu’à se reconnaître dans le modèle masculin du prédateur sexuel que certains «sexologues» cherchent à nous faire accroire, comme semble y adhérer la chanteuse Rihanna qui n’hésite pas à annoncer publiquement: «Les hommes sont comme des chasseurs, ils aiment la chasse... Et je suis comme ça aussi!»
La sexualité accompagne donc l’amour mais ne s’y réduit pas. Elle ne peut s’épanouir, par exemple, dans le culte de la performance masculine ou féminine. Le fantasme d’une érection priapique chez l’homme ou d’un orgasme constant chez la femme signale l’angoisse d’être confronté aux inévitables limites de la jouissance sexuelle et s’oppose à l’amour.
Aimer, c’est être concerné par la totalité de l’être de l’autre, par l’au-delà de l’apparent, alors que la sexualité s’oriente vers le corps-objet de l’autre. «Quand on aime, il ne s’agit pas de sexe», énonce Lacan. Ce qui n’exclut pas qu’il y en ait! Et Gabriel Garcia Marquez abonde dans ce sens: «Le sexe c’est la consolation quand l’amour ne suffit pas»! Tout en ayant à l’esprit que la pulsion sexuelle chez l’être humain est d’emblée soumise à l’histoire personnelle de chacun, ainsi qu’aux normes socioculturelles, et n’existe pas à l’état primaire comme chez les animaux. Il n’y a pas d’instinct chez l’être humain.
Souvenons-nous qu’il ne faut pas confondre désir et besoin. F. Dolto donne cette belle définition: «Le désir, c’est quelque chose qui est toujours nouveau, qui ne se répète pas. C’est une question de plaisir à trouver dans ce que l’on fait, avec les gens avec qui on le fait». Alors que le besoin se satisfait par sa consommation concrète, le désir, au sens psychanalytique, renvoie un sujet à son propre manque. Il le pousse à rencontrer un autre et à le reconnaître dans son altérité, dans son statut d’objet impossible à consommer et qui ne peut être réduit à un double narcissique de soi. Dans ce sens, le désir véritable amènera l’autre, s’il y est disposé, à renoncer au fantasme de la possessivité et de la domination.
Revenons, encore une fois, au Banquet. Pour Platon, nous le savons, être amoureux c’est découvrir son manque. En d’autres termes, Il ne peut y avoir d’amour et de désir que sur fond de perte, autrement dit: désir «de ce qu’on n’a pas, de ce qu’on n’est pas, de ce dont on manque». Être amoureux d’une personne et la désirer, c’est être mû par l’espoir insensé que l’autre comblera peu ou prou ce manque. Tant que ce manque sera là, amour et désir l’accompagneront. En paraphrasant B. Spinoza on pourrait dire: ce n’est pas parce qu’un objet est aimable que je le désire, c’est parce que je le désire qu’il devient aimable.
Laissons le mot de la fin à Woody Allen, dans le film A Midsummer Nights Dream, dont l’humour, du moins dans cet extrait, dénote un sage discernement:
«– Confondez-vous amour et sexe? – Non, pour moi l’amour va profond, le sexe seulement à quelques centimètres!»
Amour et sexualité s’exprimeront alors sous la forme d’un courant tendre qui s’alliera à un courant sexuel, selon Freud. Et la relation amoureuse adulte se caractérisera par l’alliance entre amour, tendresse et sexualité.
Lorsque Freud parle de sexualité, il ne limite pas du tout son sens à son expression génitale. Bien au contraire, il inclut dans cette notion l’origine de toutes les manifestations des sentiments affectueux. C’est pour cette raison qu’il l’accompagne toujours du terme de psycho (psychosexualité), comme on l’a vu. Pour lui, sexualité et amour (lieben en allemand) sont inséparables. Plus encore: «Nous savons depuis longtemps qu’un manque de satisfaction psychique, avec toutes ses conséquences, peut exister là même où les relations sexuelles normales ne font pas défaut.»
Lorsque, entre le sentiment tendre et la sexualité, se produit une coupure, on aboutit à un rabaissement de la vie amoureuse parce que l’autre est alors réduit à un statut d’objet, un objet de consommation avec pour but unique d’en soutirer un plaisir épisodique. C’est ce que l’expression anglaise «friends with benefits» désigne. Dans cette même lignée, on entend aujourd’hui, bien moins qu’avant, l’expression «faire l’amour». On dit plutôt: «tirer un coup» ou en arabe «عملت سكس» (j’ai fait du sexe). Certain(e)s auraient ainsi tendance à ne rechercher qu’une satisfaction éphémère issue du soulagement produit par la décharge d’un trop plein.
Certains hommes se retrouvent dans la situation où «Ils ne peuvent désirer là où ils aiment et ne peuvent aimer là où ils désirent» (Freud). Ils sont conduits à distinguer deux sortes de femmes: celles qu’ils dévalorisent, qu’ils rabaissent et qui prennent la figure de la prostituée, et celles qui sont élevées au rang de mères idéalisées. Certaines femmes s’identifient même à cette séparation masculine: elles cherchent un homme qui représente l’idéal paternel et un autre pour le plaisir sexuel. Avec, pour conséquence, dans les deux cas, le déclenchement de conflits intrapsychiques qui affectent le rapport à soi ainsi qu’aux autres. Sans oublier, pour les uns comme pour les autres, la force captivante des fantasmes dans l’acte sexuel. D’autres femmes vont même jusqu’à se reconnaître dans le modèle masculin du prédateur sexuel que certains «sexologues» cherchent à nous faire accroire, comme semble y adhérer la chanteuse Rihanna qui n’hésite pas à annoncer publiquement: «Les hommes sont comme des chasseurs, ils aiment la chasse... Et je suis comme ça aussi!»
La sexualité accompagne donc l’amour mais ne s’y réduit pas. Elle ne peut s’épanouir, par exemple, dans le culte de la performance masculine ou féminine. Le fantasme d’une érection priapique chez l’homme ou d’un orgasme constant chez la femme signale l’angoisse d’être confronté aux inévitables limites de la jouissance sexuelle et s’oppose à l’amour.
Aimer, c’est être concerné par la totalité de l’être de l’autre, par l’au-delà de l’apparent, alors que la sexualité s’oriente vers le corps-objet de l’autre. «Quand on aime, il ne s’agit pas de sexe», énonce Lacan. Ce qui n’exclut pas qu’il y en ait! Et Gabriel Garcia Marquez abonde dans ce sens: «Le sexe c’est la consolation quand l’amour ne suffit pas»! Tout en ayant à l’esprit que la pulsion sexuelle chez l’être humain est d’emblée soumise à l’histoire personnelle de chacun, ainsi qu’aux normes socioculturelles, et n’existe pas à l’état primaire comme chez les animaux. Il n’y a pas d’instinct chez l’être humain.
Souvenons-nous qu’il ne faut pas confondre désir et besoin. F. Dolto donne cette belle définition: «Le désir, c’est quelque chose qui est toujours nouveau, qui ne se répète pas. C’est une question de plaisir à trouver dans ce que l’on fait, avec les gens avec qui on le fait». Alors que le besoin se satisfait par sa consommation concrète, le désir, au sens psychanalytique, renvoie un sujet à son propre manque. Il le pousse à rencontrer un autre et à le reconnaître dans son altérité, dans son statut d’objet impossible à consommer et qui ne peut être réduit à un double narcissique de soi. Dans ce sens, le désir véritable amènera l’autre, s’il y est disposé, à renoncer au fantasme de la possessivité et de la domination.
Revenons, encore une fois, au Banquet. Pour Platon, nous le savons, être amoureux c’est découvrir son manque. En d’autres termes, Il ne peut y avoir d’amour et de désir que sur fond de perte, autrement dit: désir «de ce qu’on n’a pas, de ce qu’on n’est pas, de ce dont on manque». Être amoureux d’une personne et la désirer, c’est être mû par l’espoir insensé que l’autre comblera peu ou prou ce manque. Tant que ce manque sera là, amour et désir l’accompagneront. En paraphrasant B. Spinoza on pourrait dire: ce n’est pas parce qu’un objet est aimable que je le désire, c’est parce que je le désire qu’il devient aimable.
Laissons le mot de la fin à Woody Allen, dans le film A Midsummer Nights Dream, dont l’humour, du moins dans cet extrait, dénote un sage discernement:
«– Confondez-vous amour et sexe? – Non, pour moi l’amour va profond, le sexe seulement à quelques centimètres!»
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