Broken Keys: Sortie libanaise tant attendue…
Jeudi 28 avril, le long-métrage inspiré de faits réels “Broken Keys”, mondialement salué, sort dans les salles au Liban. Retour sur une œuvre choc à ne pas manquer.

En 2014, dans un quartier occupé par l’État islamique (EI), Karim rêve d’une carrière de pianiste. Il souhaite fuir ce monde, où la musique est bannie, pour l’Europe. Mais son chemin s’avère semé d’embûches... Dans les rues dévastées de sa ville, où les quelques habitants restés luttent pour survivre au milieu des décombres, son piano est détruit par un voisin devenu terroriste. Commence alors le long calvaire de Karim pour le réparer. Une ode à la liberté pour toutes celles et ceux qui résistent en Syrie ou ailleurs en ces temps de grande barbarie.



Premier film tourné à Mossoul après la chute de l’EI

Né à Beyrouth en 1987, Jimmy Keyrouz est un réalisateur et scénariste libano-mexicain. Il obtient une maîtrise en écriture de scénarios et réalisation de l’Université Columbia à New York. En 2016, il réalise un court métrage, Nocturne in Black, présenté en première au Telluride Film Festival. Avec Broken Keys, son premier long-métrage, il signe une véritable prouesse cinématographique, compte tenu de son âge et des circonstances du tournage.

Le réalisateur Jimmy Keyrouz lors de la première du film, le 25 avril au Grand Cinémas ABC Ashrafieh (Crédits : Nada Ghosn)

Interviewé par Ici Beyrouth, le réalisateur explique: «Le scénario présentait déja de multiples défis avec des scènes d’action complexes, de nombreux lieux de tournages et beaucoup d’acteurs. Nous avions besoin de grandes villes détruites et il nous était impossible de reconstituer cela en studio. Nous avons donc tourné à Mossoul, en Irak, dans les derniers quartiers où l’État islamique a combattu. Une grande partie de la ville avait complètement disparu sous les décombres. Nous pouvions même sentir l'odeur des cadavres sous les débris... Broken Keys est le premier film tourné à Mossoul après la chute de l’État islamique.»

À son retour au Liban, l’équipe est prise dans la Révolution du 17 octobre 2019 qui a éclaté deux jours avant son arrivée. «Nous avons suspendu le tournage pour nous joindre aux manifestations. Quelques semaines plus tard, nous avons décidé de reprendre, mais l'effondrement des banques et le contrôle des capitaux nous ont beaucoup compliqué la tâche. Pour finir, la pandémie du Covid-19 s’est répandue dans le monde alors que nous étions en plein montage avec Paris...»




Il aura ensuite fallu deux ans pour que le film sorte. Il est en compétition officielle au Festival de Cannes en 2020, mais le palmarès est annulé dans le cadre des restrictions sanitaires. Le Dernier piano (titre français) aurait sans doute été primé, vu les critiques élogieuses dont il fait l’objet depuis sa sortie nationale en France, le 13 avril.

Le pouvoir de la musique

Rares sont les films de fiction qui mettent en scène la guerre en Syrie et les crimes de Daech. Produit par Ezekiel Film Production, fondée par Antoun Sehnaoui, Broken Keys a été sélectionné dans la catégorie film libanais pour le meilleur long-métrage étranger à la 93e cérémonie des Oscars. Une sortie prochaine est ainsi prévue aux États-Unis, puis au Moyen-Orient.

L’acteur Tarek Yaacoub (Karim) dans Broken Keys (Crédits : Ezekiel Film)

«Le film raconte l’histoire d’un jeune homme qui fait tout pour garder le peu d’espoir restant. En jouant de la musique, il s’efforce de rappeler à son entourage qu’il y a toujours de belles choses dans la vie pour lesquelles il faut se battre», poursuit Jimmy. La bande originale, signée par le compositeur oscarisé Gabriel Yared, donne toute sa force à ce film-manifeste sur le pouvoir de l’art et de la musique en temps de crise.

« La situation de Karim, le personnage principal, est très similaire à la plupart des jeunes au Liban, ainsi que tous ceux qui tentent de préserver leurs rêves et leurs ambitions. Malgré la situation catastrophique, Karim ne baisse pas les bras. Il combat jusqu'au bout », conclut-il. Broken Keys nous donne avant tout à voir la réalité, proclamant l’échec de toutes ces idéologies mortifères qui tentent, partout dans le monde, de nous écraser.

À droite, l’actrice Sara Abi Kanaan (Maya) ; à gauche Adel Karam (Tarek) lors de la première du film, le 25 avril au Grand Cinémas ABC Ashrafieh (Crédits : Nada Ghosn)
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