Saeed Roustayi : « En Iran, beaucoup de lignes rouges » …
Pour les réalisateurs iraniens qui souhaitent tourner des films, l’Iran est loin d’incarner le pays de la liberté d’expression. La censure y est féroce et ceci les oblige à contourner de nombreuses lignes rouges afin d’éviter d’être sérieusement inquiétés. Saeed Roustayi, le jeune prodige du cinéma iranien, s’épanche sur ces nmbreuses difficultés rencontrées par les cinéastes et les acteurs.



Celui qui incarne la nouvelle garde du cinéma iranien raconte la difficulté de réaliser des films dans son pays, où la censure est la règle. Censure que les réalisateurs doivent apprendre à gérer s’ils veulent continuer à travailler. « En Iran, il y a des lignes rouges et elles sont nombreuses… il ne faut pas les dépasser si les réalisateurs veulent tourner des films » confie Saeed Roustayi, 32 ans, qui a fait ses débuts en compétition à Cannes avec Les frères de Leïla. Après le succès de son polar La loi de Téhéran (2021) sur le business de la drogue et sa répression par le régime des mollahs, il revient avec un film-fleuve sur une famille au bord de l’implosion.

Mi-mai, des cinéastes et acteurs iraniens, dont les réalisateurs primés Jafar Panahi et Mohammad Rasoulof, ont dénoncé l’arrestation de plusieurs de leurs collègues en Iran. Interrogé sur ces arrestations, Saeed Roustayi explique ne pas connaître les tenants et les aboutissants de cette affaire, mais ne se montre pas surpris pour autant : « Vous pouvez très facilement être arrêtés si vous ne respectez pas ces lignes rouges ».

« Pour pouvoir tourner en Iran, vous avez d’abord besoin d’un permis. L’obtention de ce permis est un processus. Lorsque vous finissez par l’obtenir, vous pouvez commencer à tourner. Mais il vous faudra demander un autre permis pour le distribuer dans les salles de cinéma », détaille-t-il.
Une censure qui s’exerce donc à deux niveaux : la première permet au gouvernement de « valider » le scénario et la seconde de « vérifier » que le contenu du film est conforme à ses exigences. Si cela venait à ne pas être le cas, le gouvernement demandera des « changements ». Si le réalisateur refuse ces règles, le film ne sera pas diffusé dans le pays.


« Pour mon précédent film, il m’a fallu près d’un an pour obtenir le premier permis », raconte-t-il.
Encore aujourd’hui, le cinéaste n’a pas la certitude que Les frères de Leïla pourra être diffusé en Iran. S’il a obtenu le premier permis de la part du gouvernement d’Hassan Rohani, rien ne lui assure que la nouvelle présidence conservatrice, incarnée par Ebrahim Raïssi, va lui accorder le permis pour la diffusion. Face à cette censure, « beaucoup de directeurs font le choix de ne plus demander le permis de diffusion et font ce qu’ils appellent des films clandestins (...) qu’ils envoient à l’étranger », rapporte-t-il. Dans ces conditions, a-t-il déjà pensé quitter son pays ? « Non, rétorque-t-il sans sourciller. C’est là où nous avons nos racines. C’est notre pays, c’est chez nous ».

Révélé par son deuxième film La loi de Téhéran- le premier n’est jamais sorti en France - qui a été un succès public et critique, Saeed Roustayi, réalise ses premiers courts-métrages à l’âge de 15 ans, avant d’intégrer une école de cinéma.

« Pour moi, le plus important est de raconter une histoire (...) ensuite et seulement ensuite vient le contenu. S’il peut être humaniste et rendre hommage à la classe sociale d’où je viens, tant mieux », dit-il. « Ma première intention et ma première passion est de faire des films », insiste-t-il.

À la question de savoir quel est le film qui l’inspire le plus, un seul titre lui vient en tête en guise de réponse : Le Trou (1960) de Jacques Becker, sur des détenus préparant leur évasion. La raison ? Le trentenaire ne le dira pas…

Avec AFP
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