Nadal insatiable, increvable, imbattable
Les années passent, les blessures se multiplient, les douleurs s'amplifient, mais à Roland-Garros Rafael Nadal reste Rafael Nadal: l'Espagnol a repoussé les limites statistiques en décrochant son 14e titre sur la terre battue parisienne, son 22e trophée du Grand Chelem. Mais le reverra-t-on en tournoi ?

"Je n'ai pas les mots pour dire ce que je ressens. Je n'aurais jamais pensé être compétitif à 36 ans, ni même (il y a quelques mois) être en mesure de jouer ici une fois de plus", a déclaré Nadal en référence à son pied gauche douloureux après avoir battu le Norvégien Casper Ruud 6-3, 6-3, 6-0.

Il a d'ailleurs reconnu qu'il ne pouvait pas continuer de jouer avec cette douleur et qu'il n'avait pas l'intention d'essayer de le faire si aucune solution pérenne n'était trouvée.

"J'ai été capable de jouer pendant ces deux semaines grâce à des injections dans les nerfs pour endormir le pied. J'ai joué sans douleur, mais aussi sans aucune sensation ni sensibilité", a-t-il expliqué en soulignant que cette procédure n'abîmerait pas son pied mais pouvait provoquer d'autres blessures en raison de l'absence de sensation.

"C'est un risque que je voulais prendre pour jouer ici, pas un risque que je veux prendre dans le futur. C'était un +one shot+", a-t-il assuré en affirmant qu'il n'irait à Wimbledon (27 juin-11 juillet) qu'à condition qu'un autre traitement sans injections d'anesthésiques, qu'il va entreprendre "la semaine prochaine", réussisse à créer la quasi-absence de sensation de façon permanente.

Le roi et le seigneur

En attendant, oubliée la défaite en demi-finales l'an dernier ! À tout seigneur tout honneur, c'est sous les yeux du roi d'Espagne Felipe VI que le maître de la terre battue a reçu sa 14e Coupe des Mousquetaires en son royaume du court Philippe-Chatrier.

Et ce nouveau sacre a été accueilli par une salve de messages de félicitations.

"Félicitations pour cet exceptionnel résultat! Il prouve simplement que le travail, la passion et l'attitude +ne jamais abandonner+ peut vraiment mener loin. Tu y as consacré ton temps, ton coeur et ton âme et ta persévérance t'a porté vers ce 14e titre", a tweeté le Grec Stefanos Tsitsipas, finaliste l'an dernier.

"Simplement incroyable", a posté le nouveau phénomène du tennis espagnol Carlos Alcaraz.

"14 Roland-Garros, c'est de loin le plus grand exploit du sport professionnel", a estimé de son côté le joueur américain Tennys Sandgren.


Malgré un corps désormais peu fiable (sa douleur chronique au pied gauche peut à tout moment se réveiller et lui coûter le match), le N.5 mondial a traversé cette année un tableau particulièrement relevé et exténuant avec notamment un 8e de finale de cinq sets et 4h21 contre Félix Auger-Aliassime, puis un quart de quatre sets et 4h12 contre Novak Djokovic et une demie de 3h13 pour... même pas deux sets contre Alexander Zverev qui a abandonné sur une terrible blessure à la cheville droite.

Dimanche, dès les premiers échanges, les joueurs ont annoncé la couleur: comme prévu, ce serait bien un match de bûcherons entre deux spécialistes de la terre battue.

Le phénomène Nadal

Mais dans ce domaine, le monde du tennis n'a jamais rien vu de mieux que le phénomène Nadal: 473 victoires pour 46 défaites soit 91% de réussite et même 112 victoires pour 3 défaites à Roland-Garros soit 97,5% de réussite.

Ruud, qui jouait sa toute première finale de Grand Chelem, n'a pas réussi à pousser son idole dans ses limites physiques entraperçues durant la demie avortée contre Zverev.

De temps à autre, il a réussi des exploits (16 coups gagnants contre 37 pour Nadal) qui, conjugués à quelques fautes directes de Nadal (18 contre 26 pour Ruud), lui ont permis de ne pas sombrer.

Mais l'Espagnol était venu chercher le trophée: il a mis une main sur la Coupe au premier set, l'a agrippée au deuxième et l'a soulevée au troisième. Il n'y avait rien à faire pour le Norvégien. Pour preuve ce 11 jeux à 0 infligé par l'Espagnol qui était mené 3-1 dans le deuxième set et n'a plus laissé le moindre jeu à Ruud.

"Aujourd'hui, j'ai bien senti ce que c'était que de t'affronter en finale...", lui a lancé le Norvégien en recevant son propre trophée de finaliste.

Après l'inimaginable titre en Australie où il s'était imposé en janvier après six mois d'arrêt pour soigner son pied puis un covid, Nadal a réalisé l'improbable à Roland-Garros en s'imposant malgré une préparation d'autant plus réduite que la douleur au pied l'a empêché de dépasser les 8es de finale à Rome, le seul tournoi sur terre joué avant de venir à Paris.

"C'est fou ce qui m'arrive cette année. Sans ma famille et mes proches, j'aurais déjà pris ma retraite", a-t-il reconnu.

Désormais ouvertement en bagarre avec son corps, Rafa reviendra-t-il à Roland-Garros ? Le reverra-t-on même en tournoi ?
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