Lettres à Beyrouth, juste après (7) : En attendant le Vent. (V.)
Pas de point fixe.
Nous sommes des corps en mouvement.
Comme dans une fourmilière. On s’affaire, occupe nos jours, nos nuits, nos heures, nos second(e)s. Tout bouge sans but au chant des sirènes (du port) ou des cigales. Tout. Ou des parties de nous.
Le bras (gauche) bronzé en attendant cinq heures devant les stations d’essence. Le bras (gauche) bronzé en attendant les clients de région en région (ceux qui « non merci ») ou les voyageurs de retour pour une saison, pour une moisson, pour un champ de blé. Pour s’assurer que c’est bien ici « chez nous ». Et qu’on est bien « heureux et honoré » d’être accueilli. Peut-être finira-t-on par en finir de repartir... avec nos bouts de nous. Les bras qui se tendent pour porter ceux qui s’affalent dans la rue, dans une manifestation, une « révolte », une Révolution... ou dans le (même) fauteuil du dimanche. Les poings menaçants. V. For Vendetta. Les yeux (mi) clos. Et puis la joue gauche (bronzée). Et puis la droite. Et les claques familières, familiales, que l’on dévisage maintenant, sans broncher. Chaque jour un hand stand abracadabrant. Chez nous, on salue le soleil. Et il brûle. Fort. Salut. Un signe. De la main. Et des doigts. Quand ils osent encore se croiser. Pour un reste de chaleur. Humaine. Déshumanisée. Au milieu d’une autoroute vide, au bout du tunnel, « just married » ! Y en a qui osent encore les limousines blanches (en fresh fresh dollars... exciting!) les films à l’eau de rose et les alliances au doigt. Les doigts, les Freudiens d’abord, et puis nos index, ceux qu’on a tant levés pour prendre la permission de parler, ceux qui effleurent, touchent, tiennent, retiennent, lâchent, écrivent. Nous sommes des bras, des poings, des mains, des doigts, des bouts... de nous, de tout.
Nous sommes des corps en mouvement.
Nous sommes des cœurs en mouvement.
Dans notre petit pays en mode CPR (ou PCR à 100, 0000000000, 0000, 000 LL et j’en passe -pour les zéros-) nos bras sont d’une même trempe... et nos mains serrent fort encore le même cèdre, ou, au fond du jardin, celui des 40 jours, le même olivier.
Qu’importe la chaleur.
Qu’importe le feu.

Et tout ce qui brûle.
Nous sommes de ceux qui sont éternels.
Nous sommes de ceux qui ne lâchent pas... en attendant le Vent (du Sud... ou du Nord... tout se rejoint.)
Beyrouth.

 

 
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