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À l’approche de Noël, les partitions musicales s’animent, emplissant l’air de leur esprit festif. Pour cette occasion, Ici Beyrouth vous invite, dans le premier article de cette série, à (re)découvrir trois chefs-d’œuvre de la musique d’art occidentale qui célèbrent la Nativité, éclairant la saison de leur éclat intemporel.

Aussitôt que le vent balaie les dernières feuilles rousses, la nature s’empresse à se parer de son élégant manteau blanc. Dès lors, des mélodies féeriques commencent à s’éveiller, emplissant l’atmosphère d’une douce nostalgie. Des airs qui laissent entrevoir l’approche imminente de la magie de cette saison et des chaleureuses festivités de Noël. En dépit des tragédies qui ensanglantent le monde et des vicissitudes du quotidien, la célébration de la naissance du Christ perdure, illuminant l’obscurité de ces jours de son éclat immuable. Elle offre un répit précieux, invitant les croyants à méditer sur le sens de cette incarnation divine et ainsi la manifestation de l’amour incommensurable de Dieu pour l’Homme. Au-delà des célébrations religieuses, Noël demeure une période propice à l’unité, à la solidarité, à l’amour du prochain et à la fête.

Tout au long de cette saison festive, une frénésie musicale s’empare des artères animées des villes, des nefs sacrées des églises et des prestigieuses enceintes des salles d’opéra. Qu’elle soit religieuse ou profane, artistique ou populaire, occidentale, levantine, orientaliste ou autre, la musique parvient à rassembler les voix et les cœurs au-delà des différences culturelles, instillant ainsi la joie de cette fête. À cette occasion, Ici Beyrouth vous convie à une excursion musicale à la (re)découverte des grands classiques de Noël. Des chefs-d’œuvre intemporels des maîtres de la musique d’art occidentale aux mélodies captivantes des chansons populaires, allant des airs traditionnels aux compositions contemporaines, ces harmonies continuent d’illuminer l’Avent et les célébrations de la Nativité de leurs couleurs rutilantes.

Dans le premier article de cette série en deux volets, on mettra en lumière trois chefs-d’œuvre de la musique d’art occidentale spécialement conçus pour la période de Noël: deux pièces de l’époque baroque et un ballet de l’époque romantique. Il est toutefois crucial de souligner que d’autres pièces monumentales liées à Noël revêtent également une importance tout aussi significative, à titre non exhaustif: la Messe de minuit pour Noël, H.9 de Marc-Antoine Charpentier (1643-1704), L’Enfance du Christ, opus 25 d’Hector Berlioz (1803-1869), l’Oratorio de Noël, opus 12 de Camille Saint-Saëns (1835-1921) et Noël des enfants qui n’ont plus de maison de Claude Debussy (1862-1918).

Concerto pour la nuit de Noël d’Arcangelo Corelli

Commandée par le cardinal Pietro Ottoboni, le Concerto grosso en sol mineur, opus 6 no. 8, d’Arcangelo Corelli (1653-1713) a été composée aux alentours de 1690, mais ne fut éditée qu’à titre posthume en 1714 à Amsterdam par Estienne Roger, l’un des grands éditeurs et imprimeurs de l’époque, notamment des œuvres de Tomaso Albinoni (1671-1751) et d’Antonio Vivaldi (1678-1741). Ce concerto " fatto per la notte di Natale" ("fait pour la nuit de Noël"), comme on peut le lire sur la partition, est un concerto grosso d’église en six mouvements. Il consiste donc à faire dialoguer un groupe de solistes, dit le concertino, en l’occurrence deux violons et un violoncelle, et un orchestre d’accompagnement plus vaste, dit le ripieno. Caractérisée par une écriture harmonique simple et dépourvue de toute fioriture, cette pièce baroque accorde une place prépondérante à l’imagination, évoquant l’enfant divin radieux dans l’étable sombre, les bergers venus saluer l’arrivée du Messie et le chant des anges. Le cinquième mouvement, Allegro, se fond gracieusement dans la lente pastorale du sixième et dernier mouvement, Largo, transportant l’auditeur au cœur du cadre champêtre de la naissance de Jésus-Christ, avec de subtiles références aux bergers et aux troupeaux près de Bethléem.

Dans la vidéo ci-dessous, l’Orchestre du Théâtre de La Fenice interprète le Concerto grosso en sol mineur, opus 6 no. 8, d’Arcangelo Corelli, sous la direction de Gianluca Capuano.

Oratorio de Noël de Jean-Sébastien Bach

L’Oratorio de Noël, BWV 248 de Jean-Sébastien Bach (1685-1750) est une titanesque œuvre musicale baroque, d’une durée approximative de deux heures et demie, qui célèbre le temps de Noël. Composé en 1734, ce chef-d’œuvre bachien est l’un des trois oratorios composés par le Cantor de Leipzig, les deux autres étant ceux de Pâques (BWV 249) et de l’Ascension (BWV 11). C’est un ensemble de six cantates, chacune conçue pour un jour précis du temps de Noël: les trois jours de fête (25, 26 et 27 décembre), le jour de l’an (1er janvier), le premier dimanche de l’année et l’Épiphanie (6 janvier). En fait, Jean-Sébastien Bach explore différents épisodes de la Nativité, allant du recensement de Bethléem et l’annonce de la naissance de Jésus à l’Épiphanie, en passant par l’annonciation aux bergers, la circoncision du Christ et l’arrivée des Rois mages. La richesse harmonique, la profondeur spirituelle et la maîtrise contrapuntique du maître allemand se manifestent pleinement et admirablement dans cette œuvre mystique. L’Oratorio de Noël capture l’esprit de l’époque baroque avec ses chorals lumineux, ses arias expressives et ses récitatifs narratifs, et crée une majestueuse fresque biblique de l’Incarnation.

Dans la vidéo ci-dessous, l’ensemble Netherlands Bach Society, sous la houlette du violoniste japonais Shunske Sato, propose une lecture passionnante de la première cantate de l’Oratorio de Noël de Jean-Sébastien Bach.

Dans un entretien exclusif accordé à Ici Beyrouth, le musicologue français Gilles Cantagrel l’un des plus grands experts internationaux de Jean-Sébastien Bach et l’auteur du célèbre ouvrage de 1665 pages, Les Cantates de J.-S. Bach, paru aux éditions Fayard en 2010, souligne que, dans l’Oratorio de Noël, l’incarnation de Dieu en Jésus-Christ est envisagée dans le contexte de la Rédemption, qui ne s’accomplira que par le sacrifice de la Croix. Il demeure dès lors inconcevable de dissocier la Nativité, la Passion et la Résurrection au sein de cette œuvre consacrée à Noël.

Casse-Noisette de Piotr Ilitch Tchaïkovski

Casse-Noisette, opus 71 est un ballet-féerie en deux actes dont la musique a été composée entre 1891 et 1892 par Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893). Il figure parmi les trois grands ballets du compositeur russe, aux côtés du Lac des cygnes, opus 20 et de La Belle au bois dormant, opus 66. Le livret reprend le thème de la version française d’Alexandre Dumas père, du conte fantastique d’Ernst Theodor Amadeus Hoffmann, intitulé Casse-Noisette et le roi des souris. L’histoire commence la veille de Noël. Clara Stahlbaum, une petite fille allemande, reçoit en cadeau un casse-noisette en forme de soldat de la part de son oncle Drosselmeyer. Elle se réveille en pleine nuit et se dirige au salon pour jeter un coup d’œil sur non nouveau jouet. L’horloge sonne minuit. C’est à ce moment-là que l’intrigue prend un tournant fantastique. Clara entend des grattements de souris et tente de s’échapper, mais celles-ci l’en empêchent. Et subitement, tous les objets semblent s’animer et changer de taille. C’est à ce moment que le casse-noisette prend vie, se transformant en prince charmant, et emmène Clara dans une aventure féerique dans son royaume… celui des friandises.

Le compositeur russe est merveilleusement parvenu à saisir l’esprit de la féerie de Noël à travers une partition musicale imprégnée de riches et audacieuses couleurs harmoniques, caractéristiques du postromantisme russe. L’utilisation du célesta, un instrument de musique contemporain de son époque, a ajouté à l’ensemble une touche de magie et de douceur enfantine. Cette subtilité musicale transparaît particulièrement dans l’élégante Marche (Acte I, Scène 2), la fameuse Valse des fleurs (Acte II, Scène 13), l’émouvant Andante maestoso et la pointilleuse Danse de la fée dragée de Pas de deux (Acte II, Scène 14).

Dans la vidéo ci-dessous, le maestro Valery Gergiev et l’Orchestre du Théâtre Mariinsky remettent à l’honneur ce ballet fantastique.

 

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