L’écrivain et universitaire Antoine Compagnon, l’un des grands spécialistes de la littérature française et de l’oeuvre de Marcel Proust, a été élu jeudi à l’Académie française, a annoncé l’institution.

M. Compagnon, 71 ans, a obtenu 14 voix, contre 12 pour le linguiste Jean Pruvost, et une pour Carolina Steiner, candidate multirécidiviste.

L’élection est l’une des plus serrées depuis ces dernières années, avec des candidats difficiles à départager, entre un universitaire unanimement reconnu dans le monde des lettres, et un lexicographe qui souhaite apporter une compétence dont l’Académie manque cruellement selon ses critiques.

" Cela ferme un cercle, c’est une conclusion à une carrière ", a-t-il déclaré à l’AFP.

" J’espère apporter la compétence de quelqu’un professeur depuis maintenant 47 ans je crois, auteur d’un certain nombre de livres, mêlé à l’école dans ses différents aspects, et linguiste à l’origine, passé à la littérature. Ce qui m’intéresse, c’est que les jeunes générations puissent encore lire les longues phrases de Proust. Car on peut craindre que moi-même je n’arrive plus, à trop écrire des SMS ", a-t-il plaisanté.

Français natif de Bruxelles en 1950, M. Compagnon est l’un des grands experts de Marcel Proust. Il a consacré au romancier un essai, " Proust entre deux siècles " (1989), où il estime que " deux ombres ne quittent jamais " cet écrivain, celle du dramaturge Jean Racine et du poète Charles Baudelaire.

Il fut professeur au Collège de France pendant 15 ans (2006-2021). Ses cours, qui faisaient salle comble, furent consacrés toujours à Proust, mais aussi à Montaigne, Stendhal ou Baudelaire.

Les deux dernières années de cours, sur le thème " Fins de la littérature ", ont donné lieu à son dernier ouvrage en date, " La Vie derrière soi " (2021), un essai sur les " crépuscules en littérature, qu’il s’agisse de la fin de l’auteur, de son œuvre ou d’un personnage ".

Ce fils d’un militaire français et d’une noble belge s’était d’abord orienté vers des études scientifiques, Polytechnique et Ponts et chaussées, avant de bifurquer vers les lettres, où il obtint un doctorat. Il fut l’un des disciples du linguiste Roland Barthes.

L’universitaire prend le fauteuil 35, précédemment occupé par le chirurgien et chercheur Yves Pouliquen, décédé en février 2020, mais aussi par le général Weygand, le maréchal Joffre ou le zoologue Georges Cuvier.

L’élection de M. Compagnon permet de monter à 35 sièges d’immortels pourvus sur 40.

Dans un entretien sur la chaîne de télévision LCI, la secrétaire perpétuelle de l’Académie, Hélène Carrère d’Encausse, a glissé qu’elle rêvait, pour l’un de ces fauteuils vacants, d’une candidature du romancier Michel Houellebecq.

" Non seulement ça aurait de l’allure, mais ce serait quelque chose que je souhaite de tout mon coeur. J’aimerais que Michel Houellebecq entende cet appel ", a-t-elle déclaré. Interrogé pour savoir si elle en avait parlé avec lui, elle a répondu: " il y a deux ou trois ans. Mais je ne désespère pas ".

" Houellebecq, pour moi, c’est un peu comme Victor Hugo: un auteur total (…) Il voit très bien, je dirais, le désastre dans lequel nous nous avançons ", a-t-elle ajouté.

L’écrivain avait évoqué cette éventualité à l’occasion de la parution de " Soumission " en janvier 2015, où Mme Carrère d’Encausse avait déjà fait part de cette envie de recevoir sa candidature. Il avait alors commenté: " Je pense que je pourrais être utile sur certains mots. J’aurais des opinions. Oui, éventuellement, je pourrais être un candidat valable ".

©️ AFP

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