Le secrétaire général de l’Association des banques du Liban (ABL), Fadi Khalaf, a tenté d’apporter des réponses à trois questions d’actualité en rapport avec la liquidité des banques, la possibilité de leur recapitalisation et leur positionnement face au principe du secret bancaire.

Les réponses de M. Fadi Khalaf s’inscrivent dans le cadre de son éditorial à paraître dans le bulletin mensuel de l’Association des banques du Liban.

1- Est-ce que les banques disposent de liquidités suffisantes pour rembourser les dépôts et s’en abstiennent délibérément?

Les placements des banques dans leur grande majorité se répartissent en quatre catégories:

– Les dépôts des banques auprès de la Banque du Liban représentaient à la mi-février près de 86,6 milliards de dollars, selon le bilan de la BDL.

– Les dépôts des banques auprès de leurs banques correspondantes représentaient au 1/31/2023 un solde négatif de 204 millions de dollars: les obligations des banques libanaises envers les banques correspondantes s’élevaient à 4,369 milliards de dollars tandis que leurs dépôts étaient de 4,165 milliards de dollars

– Le portefeuille des eurobonds, dont l’État a annoncé la cessation du paiement en mars 2020 et dont la valeur est devenue de 2,900 milliards de dollars après avoir défalqué les provisions sur les créances.

– Les prêts des banques au secteur privé en devises, qui ont diminué à 9,785 milliards de dollars au 31/01/2023.

Ces chiffres montrent sans aucun doute qu’il n’y a pas de liquidités auprès des banques, qu’il s’agisse de leurs dépôts en dollars locaux à la BDL, qui ne peuvent pas faire l’objet de retraits en espèces ou de transfert à l’étranger, ou de leurs soldes négatifs auprès de banques étrangères, ou en termes de leur portefeuille d’eurobonds qui ne sont pas liquéfiables sauf environ 6% du prix initial.

Quant aux prêts au secteur privé, malheureusement, les débiteurs les remboursent soit en livres, soit en chèques bancaires, qui sont déposés à la Banque centrale comme seule option, et reçoivent le solde du reste des dépôts auprès de celle-ci. Ce mécanisme erroné et fabriqué par l’État a conduit au remboursement d’environ 28 milliards de dollars de prêts depuis le début de la crise jusqu’à aujourd’hui, que le déposant a perdu à cause des liquidités qui étaient censées lui revenir. À partir de là, il est juste de dire que les riches d’aujourd’hui sont les créanciers d’hier. Ving-huit milliards de dollars ont été gagnés par les créanciers aux dépens des déposants en raison d’une négligence de la part de l’État, pour ne pas dire délibérément par l’État.

2- Certains croient que la solution réside chez les actionnaires des banques qui doivent recapitaliser leurs établissements sur leurs fonds propres pour remettre de l’ordre dans le secteur…

La raison sociale des banques au Liban a été associée aux noms des chefs de leurs conseils d’administration, dans la mesure où beaucoup pensaient qu’ils possédaient la banque. Certains peuvent s’étonner qu’il y ait des présidents de conseils d’administration qui ne détiennent pas plus de 10% de leurs banques, alors que le reste des apports est distribué à des actionnaires locaux et étrangers, ou à de petits porteurs qui ont acheté leurs actions via la bourse de Beyrouth. Cela classe les propriétaires de banques en quatre catégories :

– Le président et les membres du conseil d’administration, eux, n’ont peut-être pas de quoi recapitaliser à eux seuls leurs banques.

– Les gros actionnaires libanais et étrangers, dont la plupart avaient déposé l’essentiel de leur argent à la banque. Vous voyez donc aujourd’hui qu’ils ont perdu leur argent et ne sont pas prêts à reprendre le risque en investissant dans des banques dont les profits sont susceptibles d’aller dans les années à venir au Fonds de recouvrement des dépôts.

– Les petits actionnaires qui ont acheté leurs actions à la Bourse de Beyrouth et qui constituent un pourcentage important du capital de la banque. Leurs contributions se sont érodées avec la forte baisse des cours des actions bancaires, et il peut être difficile à l’heure actuelle, de les persuader d’investir à nouveau dans le secteur bancaire libanais.

3- Certains pensent que toutes les banques adhèrent au secret bancaire pour cacher leurs transferts à l’étranger…

Depuis la publication de la nouvelle loi sur le secret bancaire, le 3 novembre 2022, les banques sont confrontées à des demandes pour lever le secret bancaire de plusieurs catégories de comptes, en vertu de la fonction du titulaire du compte. N’est-il pas utile de lever le secret bancaire sur les titulaires de tous les comptes? Ainsi, les banques demandent à l’État libanais de présenter une loi revêtue du caractère de double urgence ayant un effet rétroactif sur le secret bancaire, qui permettrait à ces établissements d’accorder des informations bancaires au sujet de tous les comptes de leurs clients, au premier rang desquels se trouvent ceux qui sont en charge de leur direction, actionnaires et autres, dès la date de leur ouverture, au corps judiciaires et autres autorités. Ceci pourrait stopper la mascarade des accusations et des soupçons de blanchiment d’argent

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