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Une nouvelle idée portant sur la création d’un fonds de récupération des dépôts bancaires fait son chemin. Elle a pris la forme d’un projet de loi, approuvé par le gouvernement, mais qui a encore besoin d’être voté par le Parlement pour entrer en vigueur.

Le projet de loi portant sur la création d’un fonds de récupération des dépôts bancaires se base sur une taxe imposée aux agents du secteur privé qui ont remboursé leurs prêts en dollars à un taux de 1507,5 livres pour un dollar alors que la monnaie nationale battait des records à la baisse face au dollar.

Gains exceptionnels

Selon le projet de loi, les personnes visées auraient accumulé "des gains exceptionnels" en remboursant leurs prêts contractés auprès des banques en dollars à un taux de change qui n’avait aucun lien avec la réalité du marché. Tout simplement, ces gains devraient être soumis à l’impôt sur le revenu. Un impôt qui, selon la loi en vigueur, est un impôt progressif qui varie entre 4% et 25% sur les profits réalisés. Mais comment calculer "les gains exceptionnels" lorsqu’on sait que le remboursement des prêts antérieurs s’effectuait, le plus souvent, à partir d’un compte de crédit vers un compte débiteur appartenant au même déposant?

Compliqué mais jouable     

Des sources bancaires contactées par Ici Beyrouth ont indiqué que l’Association des banques au Liban n’a pas encore pris de position officielle sur la question, mais qu’elle serait favorable à tout projet dont l’objectif serait la récupération des dépôts bancaires. Interrogées sur la faisabilité du projet de loi sur le plan technique, les sources précitées affirment que sa mise en œuvre serait compliquée, mais pas impossible, et nécessiterait surtout du temps. La centrale des risques à la Banque du Liban sera mise à contribution pour déterminer les soldes des prêts au 19 octobre 2019, alors que le ministère des Finances aura un rôle de contrôle central à jouer, selon les mêmes sources, qui estiment par ailleurs qu’il n’est pas évident que les personnes taxables soient en mesure de s’acquitter dans les délais de leur dû.

Par ailleurs, un expert économique, qui a requis l’anonymat, sollicité par Ici Beyrouth, s’est inscrit en faux contre le projet le qualifiant de peu sérieux, de populiste, d’hérésie et de fruit du travail d’un gouvernement qui fait n’importe quoi. "Comment le gouvernement pourra-t-il appliquer ce projet de loi avec un effet rétroactif? Comment pourrait-il outrepasser la loi sur le secret bancaire?", s’est interrogé l’expert économique.

15 milliards de dollars

Selon les estimations du Fonds monétaire international (FMI), le total des bénéfices réalisés par les emprunteurs grâce au remboursement des prêts en chèques bancaires libellés en lollars ou en livres libanaises s’élèvent à 15 milliards de dollars. Ce chiffre n’inclut pas les profits qui auraient été réalisés après la mi-2022. Quant aux personnes qui avaient contracté des prêts personnels et de l’habitat, elles ne seront pas taxables.

Cela dit, beaucoup d’encre aura coulé d’ici à ce que les discussions du projet de loi prennent fin au Parlement d’autant que le taux d’escompte en lollars variait d’un jour à l’autre. À titre d’exemple: un emprunteur d’un million de dollars a pu rembourser son prêt par un chèque de 150 000 dollars, de 130 000 dollars ou de 120 000 dollars selon le taux d’escompte du jour.