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De nombreux parlementaires ont donné de la voix, dénonçant tantôt "des déficits cachés" tantôt "des déficits maquillés" dans les projets de budget 2023 (qui n’a jamais été voté) et 2024.

Le projet de budget 2024, étudié par les commissions parlementaires, prévoit un déficit de l’ordre de 17 mille milliards de livres. Ce chiffre a été contesté par de nombreux députés qui ont estimé le déficit à plus de 40 mille milliards de livres si les avances du Trésor sont calculées.

Ainsi, les budgets envoyés par le gouvernement au Parlement sont purement formels. Ils ne reflètent pas les déficits effectifs réalisés puisque les avances du Trésor n’y sont pas enregistrées.

Elles sont devenues un moyen de cacher les déficits effectifs alors que, dans la pratique, les déficits réalisés ne font que se creuser. Le cas des avances du Trésor à EDL de près de 35 milliards de dollars illustre bien les déficits "maquillés" ou "non déclarés" des budgets successifs. 

Avances du Trésor

Le gouvernement a pris le pli d’accorder à tour de bras des avances du Trésor hors budget à différents ministères et institutions étatiques, sachant bien qu’ils ne sont pas en mesure de les rembourser. Ce mécanisme est en violation flagrante de la loi de comptabilité générale en vigueur, qui stipule que les avances du Trésor ne sont accordées qu’aux entités susceptibles de les rembourser. Ainsi, ces avances du Trésor se sont transformées en des crédits sans faisabilités financières et donc non recouvrables, creusant les déficits des budgets successifs de l’État.

Par définition, rappelle-t-on, l’avance du Trésor a un caractère temporaire, elle est accordée à une entité étatique pour faire face à des besoins immédiats de trésorerie. Il est attendu que les fonds nécessaires pour la rembourser proviennent des recettes futures.

Des sommes exorbitantes

Le lundi 8 janvier, le ministre sortant des Finances, Youssef el-Khalil, a transmis au président de la commission des Finances et du Budget, Ibrahim Kanaan, à la demande de ce dernier, une liste des avances du Trésor accordées de 2020 à 2023 et une autre liste des dons faits à l’État de 2018 à 2023.

Selon Kanaan, les avances se sont élevées, rien qu’en 2023, à 31.892.584.935.913 de livres, soit 72% des dépenses légalement autorisées sur base de la règle du douzième provisoire.

Trop d’impôts

Par ailleurs, le projet de budget, transmis dans les délais constitutionnels par le gouvernement au Parlement, a prévu des augmentations substantielles des impôts et des taxes sans prendre en compte la capacité fiscale du contribuable. Le gouvernement ambitionne, à travers son projet de budget 2024, d’augmenter les recettes de l’État, de 6% du PIB en 2022 à 17% du PIB en 2024, dans l’espoir de faire baisser le ratio dette publique/PIB à 100% en 2026 et 80% en 2032.

Or, par définition, le projet de budget est établi en référence à trois critères: la croissance économique, le taux d’inflation et le PIB. Les trois éléments n’ont apparemment pas été considérés dans le projet de budget de 2024.

Ce qui fait dire que l’augmentation des charges fiscales n’a d’autre objectif que de couvrir les majorations de salaires des fonctionnaires au vu de la dévaluation de la valeur de la livre.

Pour rappel, le nombre des fonctionnaires a accusé une hausse injustifiable de 25.000 de 2017 à 2019, le total s’élevant à près de 320.000 salariés en 2019.