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Le retour à une discipline fiscale et budgétaire demeure un vœu pieux. En soumettant au gouvernement l’avant-projet du budget 2025, le ministre sortant des Finances, Youssef el-Khalil, a une fois de plus ignoré les lois et les règlements encadrant la préparation du budget de l’État.

Début septembre, le ministre sortant des Finances, Youssef el-Khalil, a lancé un recensement fiscal visant à élargir la base des contribuables. Ce n’est pas la première initiative du grand trésorier pour lutter contre l’évasion fiscale. L’an dernier, Youssef el-Khalil avait déjà mis en place un projet similaire, en faisant appel à des étudiants universitaires rémunérés en dollars frais pour le réussir. Cependant, les résultats de ce premier recensement n’ont pas été rendus publics, laissant l’opinion dans l’ignorance. Des sources non officielles estiment que l’évasion fiscale atteindrait environ 65%.

Entre-temps, l’avant-projet du budget 2025, soumis au gouvernement pour examen, prévoit une augmentation des dépenses d’approximativement 1,8 milliard de dollars par rapport au budget 2024. Cette hausse sera supportée par les contribuables déclarés, à travers de nouveaux impôts et taxes. Il est également à noter que l’avant-projet du budget 2025 envisage de doubler les impôts directs, en misant sans justification sur une amélioration de la collecte, alors que 80% des impôts restent indirects. Cela signifie que chacun paiera le même montant à l’État plutôt que de voir les plus hauts revenus contribuer davantage.

Manque de données

En matière de discipline budgétaire, les violations des lois et des règlements se multiplient. Le ministère des Finances semble avoir fait de l’absence de clôture des comptes de l’exercice précédent une pratique courante. Depuis 2017, à cinq reprises, le ministre des Finances n’a pas soumis la clôture des comptes à la Cour des comptes avant le 15 mai, comme l’exige l’article 19 de la loi sur la comptabilité générale. En 2025, la situation reste inchangée, avec des estimations de recettes et de dépenses infondées, ce qui porte ainsi un coup dur au principe de la transparence fiscale. Dans cet ordre d’idées, on rappelle que le principal problème dans la préparation du projet de budget réside dans l’incapacité du ministère des Finances à produire et à fournir des données et indicateurs macroéconomiques fiables. À ce titre, l’agence de notation Standard & Poor’s a annoncé qu’elle ne souhaitait plus attribuer de note au Liban en raison de cette insuffisance de données.

De plus, les rapports publiés par le ministère des Finances avant 2019 étaient fondés sur les chiffres du Trésor, alors qu’ils auraient dû s’appuyer sur les données des clôtures de comptes.

Dépenses hors budget

Le budget public ne reflète pas fidèlement la taille réelle du secteur public, notamment en raison de l’absence de rapports sur les dépenses hors budget et d’une redondance au niveau de la classification budgétaire. En plus de ces distorsions, faute de cadre humain, il existe une difficulté de connaître les montants exacts des recettes pour chaque impôt.

Réformer le budget

Le modèle de budget par article utilisé au Liban est obsolète. Pour rétablir la discipline budgétaire, il est essentiel de réformer le format de la loi de finances, en adoptant un modèle par programme ou par performance. Cela permettrait de contrôler l’efficacité des dépenses, plutôt que de se limiter à la simple vérification de la manière dont elles ont été effectuées.