Budget 2025: une remise en question des chiffres

Quel avenir pour le secteur public en général et pour le projet de budget 2025 en particulier, face à la perspective d'une guerre prolongée?  

À moins qu’un miracle diplomatique ne se produise, les actes de guerre se poursuivront jusqu’à l’année prochaine, affirment plusieurs sources concordantes. Dans ce contexte, les prévisions des organismes économiques font état d’un PIB de 12 milliards de dollars pour 2025, bien inférieur à celui de Gaza et de la Cisjordanie. Avec un tel PIB, atteindre les 4,6 milliards de dollars de recettes prévues dans le projet de budget 2025, basé sur un PIB estimé à 27 milliards de dollars, semble hors de question. Dans l'hypothèse d'une fin des hostilités en décembre 2024, le PIB chuterait à 17 milliards de dollars.

Les finances publiques

Les revenus du Trésor, qui avaient commencé à croître de manière positive au cours des huit premiers mois de 2024, ont subi un coup d’arrêt en septembre, avec une baisse confirmée en octobre. Entre janvier et août 2024, le Trésor a enregistré un excédent de plus de 650 millions de dollars en devises, grâce à des recettes de 2,7 milliards de dollars et des dépenses avoisinant le milliard de dollars.

Cet excédent, considéré satisfaisant, a poussé l’État à approuver des augmentations progressives pour les fonctionnaires en activité ainsi que pour les retraités. Ces augmentations incluent des indemnités sociales équivalant à quatre fois le salaire de base de 2019, en plus d’une somme forfaitaire de vingt millions de livres, à verser en deux paiements d’ici la fin de 2024. Le coût de ces augmentations s’élèverait ainsi à environ 40 millions de dollars par mois alors que la masse salariale du secteur public passe de 120 millions de dollars à près de 160 millions de dollars en rythme mensuel.

BDL et déplacés

Cet excédent, que la Banque du Liban (BDL) comptait utiliser pour renforcer ses réserves en devises étrangères, a été partiellement employé par l’État pour soutenir les déplacés et financer les soins médicaux des blessés.

Malgré cela, le ministère des Finances a annoncé, lundi, dans un communiqué, avoir finalisé toutes les procédures liées au versement des salaires, pensions et augmentations récemment approuvées pour les employés du secteur public, civils et militaires, y compris les retraités et l’ensemble des corps militaires. Ce dossier a été transmis à la BDL, qui se charge à son tour de transférer les fonds aux bénéficiaires par le biais de banques privées.

Si cette opération demeure possible pour le Trésor fin octobre, la situation risque cependant de se compliquer dans les mois à venir, soulevant un risque de solvabilité pour l’État. En parallèle, le secteur privé, pour s’acquitter des taxes et impôts, doit générer des bénéfices. Or, les secteurs productifs traversent de graves difficultés: le tourisme est à l’arrêt, le commerce subit une crise avec une baisse de 80% et les exportations industrielles pourraient chuter à un milliard de dollars, soit une diminution de 70%. La consommation de dérivés pétroliers aurait chuté de 35% depuis le début des hostilités, un indice probant de la baisse de l’activité dans le pays ainsi que du transport illégal de carburant vers la Syrie.

La livre libanaise

Par ailleurs, des sources proches de la Banque centrale continuent de rassurer quant à la stabilité du taux de change de la livre face au dollar, affirmant que l'institution maîtrise la masse monétaire en livres en circulation, estimée à environ 53 mille milliards de livres. Cependant, bien que ses réserves en devises étrangères aient connu une progression lente mais régulière depuis août 2023, elles ont amorcé un déclin il y a plusieurs mois. Dans ce contexte, il convient de préciser que la BDL a puisé dans ses réserves en devises fortes pour verser d’un coup les trois mensualités en dollars aux déposants concernés par les circulaires 158 et 166.

C’est un secret de Polichinelle qu’au Liban, l’avenir nous réserve souvent des surprises, pas toujours agréables.

 

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