Le rapport trimestriel de Bank Audi tire la sonnette d’alarme en soulignant la spirale inflationniste dans laquelle est pris le Liban. Celle-ci aggrave davantage les conditions générales de la crise et met en péril un nombre incommensurable de ménages.

Alors que le monde entier a connu une hausse notable de l’inflation cette année, en raison de l’augmentation des prix du pétrole et des denrées alimentaires liée à la guerre russo-ukrainienne, l’inflation libanaise affiche des taux à trois chiffres, relève le rapport de Bank Audi.

Il faut dire que la levée des subventions sur la plateforme pétrolière et sur les produits pharmaceutiques a eu ses effets multiplicateurs directs sur l’inflation domestique. Aussi est-il important de noter que la dépréciation du taux de change de la livre libanaise sur le marché noir a été le principal facteur inflationniste.

Pas encore d’hyperinflation

L’inflation cumulée s’est élevée à 825% entre septembre 2019 et mars 2022, suite à une inflation de 107% entre septembre 2019 et septembre 2020, de 171% entre septembre 2020 et septembre 2021 et de 65% entre septembre 2021 et mars 2022, selon les chiffres fournis par l’Institut de consultation et de recherche (CRI). Bien que les chiffres soient considérablement élevés, le Liban n’a pas encore atteint techniquement une hyperinflation. Par définition, il y a hyperinflation lorsque le taux d’inflation dépasse 50% en un mois ou 1000% en un an, d’après les normes internationales. L’une des principales raisons pour laquelle le Liban n’a pas encore atteint l’hyperinflation est l’augmentation limitée du coût du facteur de production le plus important, à savoir l’emploi, aucune révision officielle des salaires  n’ayant eu lieu dans le pays au stade actuel, indique le rapport de Bank Audi.

Sur deux ans et demi, entre septembre 2019 et mars 2022, la plus forte augmentation des prix a été enregistrée dans la catégorie “Habillement” (1433%), les “Biens de consommation durables” (1161%), suivie par la catégorie “ Alimentation et boissons “ (1113%), “ Transports et télécommunications” (1041%), “Logement” (700%), “ Loisirs “ (424%), “Autres biens et services” (339%), la santé (344%) et l’éducation (92%).

Injection de 500 millions de dollars par mois

Pour l’avenir, la levée des subventions étant désormais en place, les perspectives d’inflation sont totalement liées aux perspectives de taux de change, qui sont à leur tour liées à la gestion politico-économique du pays, note le rapport de Bank Audi. Les effets de la circulaire 161 de la Banque centrale, visant à juguler la montée de la valeur du dollar face à la livre, sont limités. Les raisons sont multiples, parmi lesquelles figure le montant des réserves en devises étrangères de la BDL, qui s’élèvent actuellement à 11 milliards de dollars et qui s’épuisent d’environ 500 millions de dollars par mois. Parallèlement, le marché monétaire a souffert d’une grave pénurie de liquidités en monnaie locale cette année, ce qui a porté le coût des liquidités en livres à des niveaux sans précédent, proches de 30%.

En deux mots comme en mille, si l’équilibre entre le stock de LL et le stock de dollars américains n’est pas plus ou moins rétabli, le taux de change risque de s’envoler à nouveau dans le futur proche et de retrouver sa volatilité.