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- L’éditorial – La Jordanie, un paramètre du scénario gagnant-gagnant
C’est un nouveau type de guerre auquel nous assistons désormais au Moyen-Orient. Parallèlement aux assassinats soigneusement ciblés par voie aérienne, les intentions belliqueuses à plus grande échelle sont dévoilées à l’avance, souvent dans les médias, et font même l’objet de tractations en coulisses pour en limiter les contours afin d’éviter ou de restreindre les dégâts. Le timing, de surcroît, est pratiquement indiqué en amont grâce à l’adoption de mesures pratiques, telles que la fermeture des espaces aériens. Ce fut notamment le cas en janvier dernier lors de la première riposte américaine et britannique aux attaques des Houthis en mer Rouge.
C’est dans ce contexte que s’est inscrite, dans la nuit de samedi, l’attaque iranienne contre Israël, dont l’impact réel sur le terrain a été dérisoire par rapport aux moyens offensifs mis en œuvre. Comment pouvait-il en être autrement lorsque les pays voisins de l’Iran ont été informés de la frappe 72 heures à l’avance, comme l’a précisé dimanche le chef de la diplomatie iranienne? Une indication confirmée par le cabinet du Premier ministre israélien qui a relevé que Tel-Aviv avait été informé de l’opération par… Téhéran!
Cette attaque ressemblait ainsi davantage à un scénario de type gagnant-gagnant («a win-win situation», comme diraient les Anglo-saxons). L’Iran a sauvé la face et cherché à rappeler, une fois de plus depuis le 7 octobre, sa volonté de se positionner comme puissance régionale prépondérante. L’armée israélienne a redoré son blason en réaffirmant son efficacité et sa supériorité technologique en termes, notamment, de défense aérienne, et, sur le plan politique, Israël bénéficie de nouveau d’un fort soutien international. Quant au président Joe Biden, à quelques mois de l’élection présidentielle, il a pris soin de mettre l’accent sur sa ferme détermination à sauvegarder la sécurité d’Israël. Même la Jordanie a réussi à marquer des points en contribuant à faire face à l’attaque des Gardiens de la Révolution iranienne.
Le nouvel élément dans les développements de la nuit dernière aura été précisément l’entrée en jeu de la Jordanie dans le dispositif de défense occidental. La République islamique a rapidement réagi, alors que les attaques étaient en cours, proférant des menaces directes contre Amman. Mais, pour le royaume jordanien, il était vital de choisir son camp et la conjoncture présente imposait le choix qu’il a fait. Depuis l’opération sanglante du 7 octobre dernier, la Jordanie est en effet la cible de tentatives soutenues de déstabilisation menées par le camp iranien. Des sources jordaniennes responsables indiquaient dimanche que depuis le déclenchement de la guerre entre Israël et le Hamas, l’Iran a demandé avec insistance à Amman de s’impliquer dans le conflit, ce que le royaume hachémite a refusé.
Sous le couvert d’un large trafic de stupéfiants effectué par des gangs armés, la situation à la frontière jordano-syrienne s’est progressivement dégradée, d’autant que cette contrebande s’accompagnait également d’un trafic d’armes. La tension allait crescendo et des accrochages étaient signalés le long de la frontière. Ces tentatives de déstabilisation ont éclaté au grand jour lorsqu’une série de manifestations populaires massives a été organisée dans la capitale sous le prétexte d’exprimer un mouvement de solidarité avec la population de Gaza. La manœuvre n’a trompé personne, et nombre d’observateurs et d’analystes ont récemment mis en garde contre la gravité de la situation en Jordanie. Le vice-Premier ministre et ministre jordanien des Affaires étrangères, Aymane Safadi, n’a d’ailleurs pas manqué, dimanche, de souligner que son pays «continuera d'adopter toutes les mesures nécessaires pour préserver sa sécurité et sa souveraineté».
Le royaume hachémite pourrait bien jouer en quelque sorte sa survie sous le poids de l’extension croissante, à de nouveaux territoires, de la politique expansionniste des Gardiens de la Révolution iranienne. Ceux-ci pourraient exploiter sur ce plan une réalité souvent oubliée, à savoir que pas moins de la moitié de la population jordanienne est d’origine palestinienne.
Dans un tel contexte, le pouvoir à Amman se devait de se positionner sans équivoque de manière à s’assurer le soutien sécuritaire et politique du seul camp susceptible de garantir sa pérennité, le camp occidental…
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