Écoutez l’article

De nombreuses interrogations subsistent quant à la véritable position de la Turquie face à la guerre israélienne contre la bande de Gaza, qui se poursuit depuis le 7 octobre. Bien que la position politique turque se soit récemment durcie, d’aucuns estiment qu’elle ne reflète pas pleinement le soutien populaire turc envers la cause palestinienne. De plus, cette situation semble différente des précédentes interactions entre les dirigeants turcs et Israël, où les tensions, bien que vives, finissaient généralement par s’apaiser avec le temps.

Certains observateurs estiment que la Turquie a choisi d’intensifier progressivement ses positions envers Israël afin de préserver, dans un premier temps, sa capacité à jouer le rôle de médiateur. Ce rôle, qu’Ankara aspire souvent à endosser, pourrait renforcer sa position en tant qu’acteur régional majeur et incontournable.

Dans ce contexte, le président turc, Recep Tayyip Erdoğan, avait tenté de jouer le rôle de médiateur entre la Russie et l’Ukraine, nourrissant ainsi de grands espoirs. Toutefois, les rapports de force, la réticence de l’Occident à lui reconnaître ce rôle privilégié, ainsi que les nombreuses complexités entourant la guerre, ont entravé le succès de cette médiation, laissant la guerre se poursuivre.

Bien que la décision d’Ankara de geler les relations commerciales avec Israël n’ait pas été à la hauteur des attentes, étant donné la virulence de la rhétorique politique, elle a néanmoins marqué un tournant significatif dans l’évolution de la position officielle turque vis-à-vis de la guerre en cours à Gaza. Ce changement a été encore renforcé par l’adhésion de la Turquie à la plainte pour génocide contre Israël déposée par l’Afrique du Sud auprès de la Cour internationale de Justice.

Le président turc a même affirmé que le Hamas à Gaza représente une ligne de défense avancée pour la région de l’Anatolie, suggérant qu’il ne tolèrerait pas la chute ou l’élimination du mouvement. Une ambition qui s’est d’ailleurs révélée militairement et concrètement irréalisable après plusieurs mois de guerre, ayant fait près de 40.000 victimes, principalement des enfants, des femmes et des personnes âgées.

Les dernières escalades verbales entre Ankara et Tel Aviv ont été marquées par une déclaration du président turc affirmant: "Tout comme nous sommes intervenus en Artsakh et en Libye, nous pourrions faire de même avec eux", en référence à Israël. En réponse, le ministre israélien des Affaires étrangères, Israël Katz, a commenté sur son compte X: "M. Erdoğan suit les traces de Saddam Hussein en menaçant d’attaquer Israël. Il ferait bien de se rappeler de ce qui s’est passé là-bas et de la manière dont cela a fini."

Parallèlement, la Turquie a averti le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, qu’il pourrait connaître le même sort que le dirigeant nazi Adolf Hitler. Le ministère turc des Affaires étrangères a déclaré: "Tout comme le génocide perpétré par M. Hitler a pris fin, celui commis par M. Netanyahou connaîtra le même destin."

Il est évident qu’Ankara dispose d’un atout majeur en soutenant les factions palestiniennes contre Israël, ce qui constitue un levier de pression significatif. En effet, cette approche est la plus pragmatique pour le gouvernement turc, surtout lorsqu’on la compare à une intervention militaire directe, presque totalement exclue en raison de son irréalisme et de la réticence d’Ankara à s’engager dans une guerre contre Israël.

Cependant, la position politique turque manifeste une véritable volonté de faire pression pour obtenir un cessez-le-feu. La poursuite de la guerre, en plus de la nécessité d’arrêter les massacres de masse et le génocide, risque de plonger toute la région et le Moyen-Orient dans une situation explosive. Le parti au pouvoir en Turquie ne peut pas se permettre de négliger le soutien à la Palestine, notamment pour des considérations religieuses, surtout en ce qui concerne Jérusalem et les autres lieux saints musulmans.

Il est évident que les tensions croissantes entre la Turquie et Tel Aviv ne conduiront pas à une confrontation militaire totale, bien que les relations bilatérales puissent temporairement se détériorer. Les choses devraient progressivement rentrer dans l’ordre, compte tenu des intérêts communs en politique, économie, pétrole, gaz, échanges commerciaux, et autres domaines. Toutefois, malgré cette dynamique, la position turque semble plus avancée que celle de nombreux pays qui, en théorie, devraient être davantage concernés par le conflit. Mais, ce sont là les subtilités des calculs diplomatiques en cours.

Abonnez-vous à notre newsletter

Newsletter signup

Please wait...

Merci de vous être inscrit !