Dans son discours dimanche soir, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah a affirmé que la "cible principale de l’opération" de son mouvement était "la base de Glilot, la principale base de renseignement militaire israélienne". Une installation située à 110 km de la frontière libanaise qui abrite l’unité 8200, bras technologique de l’armée israélienne.

"Nous avons désigné la base de Glilot comme cible principale en raison de son rôle crucial dans les opérations de renseignement et d’assassinat en région", a souligné Hassan Nasrallah.

En réponse à l’assassinat de son plus haut chef militaire, Fouad Chokr, le 30 juillet dans une frappe israélienne, le Hezbollah a lancé une attaque dimanche à l’aube contre 11 bases militaires israéliennes. "Plus de 320 roquettes Katioucha" et "un grand nombre de drones" ont été utilisés, selon un communiqué du groupe

Une attaque qui aurait fait peu de dégâts selon Israël, mais qui démontre l’importance de la base de Glilot pour le Hezbollah.

Quartier général des renseignements militaires

La base de Glilot, située en bordure de Tel Aviv, abrite le quartier général de plusieurs unités du renseignement de l’armée, dont le siège du Mossad, le renseignement extérieur de l’État hébreu.

Elle abrite la fameuse unité 8200 (prononcée 8-200), service d’élite du renseignement israélien, spécialisé dans la cybersurveillance et la cyberguerre. Comparable à la NSA américaine, elle est subordonnée à l’Aman, le renseignement militaire israélien.

Selon plusieurs experts, les effectifs de l’unité 8200 varient entre 5 000 et 10 000 membres, dont la moitié sont actifs à tout moment, soit près de 80% des effectifs de l’Aman. Il s’agit de la plus grande formation de l’armée israélienne.

Considérée comme l’une des plus grandes installations d’écoute au monde, l’unité gère une base de SIGINT (Renseignement d’origine électromagnétique) dans le désert du Neguev qui, selon une enquête du Monde Diplomatique, serait capable de surveiller les conversations téléphoniques et internet au Moyen-Orient et en Europe. Des centres d’écoutes seraient également basés dans les ambassades israéliennes à l’étranger.

Une unité très jeune

Le service militaire obligatoire permet à l’unité de recruter des jeunes israéliens dès l’âge de 17 ans. Les compétences en mathématiques, informatique et langues étrangères dont l’arabe sont particulièrement recherchées, mais surtout la capacité à apprendre rapidement.

L’unité fournit un grand nombre de formations dans ces domaines à ses nouvelles recrues. Dans un article du journal suisse Le Temps publié en 2017, un ancien de l’unité témoigne qu’il faut s’engager "à travailler quotidiennement 18 heures par jour, sept jours sur sept".

Les jeunes recrues sont amenées à avoir des responsabilités très rapidement, grâce à un faible poids de la hiérarchie militaire, et sont poussés à travailler en équipe et à improviser pour faire avancer leurs missions. Des compétences qui seront très prisées à la fin de leur service par les entreprises de cybersurveillance et dans l’entreprenariat. À titre d’exemple, un quart des salariés du groupe israélien NSO en charge du fameux programme d’espionnage Pegasus sont issus de l’unité.

Des opérations controversées

L’unité est régulièrement pointée du doigt en raison de la cybersurveillance de millions de civils palestiniens. De nombreux cas de chantages ont été décriés, notamment envers des membres de la communauté LGBT, qui se retrouvent obligés de collaborer sous peine de voir leur orientation révélée à leur famille.

Cette surveillance de masse de la population palestinienne est dénoncée par plusieurs ONG de droits humains dont Amnesty International, qui souligne l’utilisation du système de reconnaissance faciale Red Wolf pour restreindre la liberté de mouvement des Palestiniens. "Red Wolf est un système de reconnaissance faciale utilisé par l’armée israélienne aux checkpoints de la ville d’Hébron, en Cisjordanie occupée" pointe Amnesty, ajoutant qu’il "utilise ces données biométriques pour déterminer si un individu peut passer le checkpoint".

L’unité est également suspectée d’avoir participé à la conception du virus Stuxnet à l’origine de l’infection de plusieurs ordinateurs en 2010, dont ceux hautement stratégiques des installations nucléaires iraniennes. L’un de ces plus grands fait d’armes : avoir intercepté une conversation entre le roi Hussein de Jordanie et Gamal Abdel Nasser au début de la guerre des Six Jours.

L’unité 8200 utiliserait en outre un système d’IA avancé, appelé Évangile, qui permettrait grâce à des analyses de données issues des réseaux mobiles et internet de déterminer les cibles potentielles à frapper. Une utilisation particulièrement décriée à Gaza en raison de son manque de précision et des erreurs potentielles qui impactent les civils.

L’échec du 7 octobre

Le 7 octobre, l’unité a été critiquée pour son manque d’anticipation de l’attaque du Hamas. Cet échec est considéré comme l’un des plus graves depuis la création d’Israël. En septembre, plusieurs de ses membres avaient alerté de l’opération imminente du Hamas, mais n’avait pas été pris au sérieux par leurs supérieurs.

De plus, selon la chaine israélienne Kan, l’unité 8200 n’était pas opérationnelle ce matin là, en raison d’une décision de réduire le personnel pendant la nuit et les week-ends. Une décision qui a entravé l’efficacité de la réponse Israélienne à l’attaque et le ciblage des militants du Hamas infiltrés.