" Sous le contrôle des orques "
" C’est l’enfer. L’offensive a commencé, celle dont on parle depuis des semaines ", a de son côté annoncé sur Facebook le gouverneur ukrainien de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï.
" Il y a des combats à Roubijné et Popasna, des combats incessants dans d’autres villes pacifiques ", a-t-il dit, reconnaissant que Kreminna était " malheureusement sous le contrôle des orques ", le surnom péjoratif donné aux militaires russes.
Cette ville, qui comptait environ 18.000 habitants avant la guerre, se trouve à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Kramatorsk, la capitale ukrainienne du bassin houiller du Donbass.
Au moins quatre civils ont été tués dans les bombardements russes pendant qu’ils tentaient de fuir Kreminna, a poursuivi M. Gaïdaï.
Quatre autres personnes ont péri le même jour dans des frappes sur la région voisine de Donetsk, selon son gouverneur Pavlo Kyrylenko.
Marioupol
La Russie est aussi déterminée à s’emparer de Marioupol, dont les derniers défenseurs ont ignoré dimanche un ultimatum de l’armée russe qui les enjoignait de déposer les armes.
" Nos militaires y sont toujours. Ils combattront jusqu’au bout ", a quant à lui lancé le Premier ministre ukrainien Denys Chmygal.
La conquête de cette cité portuaire constituerait une victoire importante pour les Russes car elle leur permettrait de consolider leurs gains territoriaux côtiers le long de la mer d’Azov en reliant le Donbass, en partie contrôlé par leurs partisans, à la Crimée que Moscou a annexée en 2014.
Kharkiv
Dans le nord-est, la grande ville de Kharkiv a de nouveau été bombardée lundi. Bilan : au moins trois morts.
Selon le parquet régional, un homme et d’une femme ont été tués par un obus tombé en fin de matinée sur un terrain de jeux pour enfants dans un quartier d’habitation.
Dimanche déjà, au moins cinq personnes y avaient péri dans une série de frappes russes.
Dans l’ouest, des bombardements russes ont fait lundi sept morts et " onze blessées, dont un enfant ", d’après les autorités locales.
Située loin du front, près de la frontière polonaise, cette ville s’est convertie en cité-refuge pour les personnes déplacées et avait été peu visée jusqu’alors par les frappes russes.
Au total, l’armée russe assure avoir mis hors d’état dans la seule journée de lundi 16 sites militaires ukrainiens, abritant en particulier des munitions et des missiles tactiques Totchka-U.
Ces armements constituent un enjeu majeur, tant pour Moscou que pour Kiev.
Arrivée de nouvelles armes américaines
Même si leur maniement n’est pas fondamentalement différent de celui de l’artillerie dont l’armée ukrainienne est familière, ces canons utilisent des obus de 155 mm, utilisés par les pays de l’Otan, alors que l’Ukraine ne dispose encore que d’obus de 152 mm de fabrication russe.

L’effet des sanctions sur les armes russes
De leur côté, les forces russes commencent à sentir l’effet des sanctions sur leur approvisionnement en armement, notamment les missiles guidés, a indiqué le haut responsable du ministère américain de la Défense.
Les sanctions " ont eu un effet sur la capacité de Poutine à se réapprovisionner et se rééquiper, notamment dans le domaine des composants de certains de ces systèmes et de ses missiles guidés de précision ", a-t-il dit. " Cela a déjà un effet concret sur Poutine ".
" Par ailleurs, nous savons qu’ils s’efforcent de se réapprovisionner auprès de leur propre industrie de défense et qu’ils se demandent à quelle vitesse et à quel degré ils peuvent accélérer leur production d’armement ", a-t-il ajouté. " Les sanctions ont un effet sur leur capacité à le faire ".
Les armements les plus modernes utilisent des puces électroniques dont les principaux producteurs sont Taïwan et la Corée du Sud, deux pays alliés des Etats-Unis qui ont cessé d’exporter ces produits vers la Russie, conformément aux sanctions américaines décrétées après l’invasion de l’Ukraine.
L’Union européenne a quant à elle " condamné la poursuite des bombardements aveugles et illégaux de civils et d’infrastructures civiles " par Moscou. " Il ne peut y avoir d’impunité pour les crimes de guerre ", a affirmé le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.
La brigade de Boutcha distinguée par Poutine
Dans ce contexte, Vladimir Poutine a décerné lundi un titre honorifique, notamment pour son " héroïsme ", sa " ténacité " et son " grand professionnalisme ", à la 64e brigade de fusiliers motorisés.
Or l’Ukraine a affirmé que les forces russes et notamment cette unité avaient commis un massacre de civils à Boutcha, dans la périphérie de Kiev.
Soldats britanniques
En Russie toujours, la télévision publique (VGTRK) a diffusé lundi une vidéo montrant deux Britanniques, Shaun Pinner et Aiden Aslin, faits prisonniers dans les combats en Ukraine.
Les traits tirés, ils s’adressent au Premier ministre Boris Johnson dont ils attendent qu’il négocie leur libération contre celle de Viktor Medvedtchouk, un riche homme d’affaires ukrainien proche de Vladimir Poutine récemment arrêté en Ukraine.
Kiev a pour sa part diffusé une vidéo de M. Medvedtchouk dans laquelle il dit vouloir être échangé " contre les défenseurs de Marioupol et ses habitants ".
Selon sa famille, Shaun Pinner n’est " ni un volontaire ni un mercenaire, mais sert officiellement dans l’armée ukrainienne ". Après avoir naguère été dans l’armée britannique, il s’était installé en Ukraine où il avait épousé une Ukrainienne.
Zelensky espère obtenir le statut de candidat à l’UE
Sur le front diplomatique, le président Zelensky a dit lundi espérer obtenir pour son pays " dans les semaines à venir " le statut de candidat à l’adhésion à l’UE, remerciant Bruxelles de sa rapidité.
" Nous sommes véritablement convaincus que cette procédure sera enclenchée dans les semaines à venir ", a assuré le président, estimant que ce serait là " un signal important " pour l’amitié entre Kiev et Bruxelles. " Nous sommes persuadés que nous serons soutenus dans ce travail ".
Selon lui, " les Ukrainiens sont unis derrière cet objectif : se sentir les égaux des autres Européens, faire partie de l’Union européenne ".
" C’est un honneur de recevoir de @ZelenskyyUa les réponses au questionnaire de la @Commission européenne, remises par @vonderleyen il y a seulement 10 jours ", a de son côté commenté l’ambassadeur Matti Maasikas dans un message sur son compte Twitter.
" Une nouvelle étape sur le chemin de l’Ukraine vers l’UE ", a-t-il souligné. " Des temps extraordinaires requièrent des mesures extraordinaires et une vitesse extraordinaire ", a-t-il ajouté.
Ce questionnaire sert de base aux négociations d’adhésion. Il avait été confié à Volodymyr Zelensky par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, au cours de sa récente visite à Kiev.
La Commission européenne doit désormais vérifier le respect par l’Ukraine des critères pour l’adhésion à l’UE et soumettre une recommandation aux Etats membres.
L’intégration à l’Union européenne est à cet égard un processus au long cours pour rapprocher la législation du pays candidat du droit européen.
Cela suppose en effet des négociations complexes sur de nombreux sujets et des critères difficiles à respecter pour un pays en guerre, comme la stabilité politique et une économie de marché viable.
Il faut en outre l’accord unanime des 27 pays membres. Or ceux-ci sont divisés sur la question d’une future adhésion de l’Ukraine.
Huit pays -République tchèque, Lettonie, Lituanie, Estonie, Bulgarie, Pologne, Slovaquie et Slovénie– ont appelé, dans une lettre ouverte, à ouvrir les discussions sur une adhésion de cette ex-république soviétique, envahie par la Russie le 24 février.
Mais un tiers des Etats-membres, dont la Belgique, les Pays-Bas, l’Italie et l’Espagne, sont quant à eux plus " réservés ", selon une source diplomatique contactée par l’AFP.
Biden ne prévoit pas d’aller en Ukraine
" Si quelqu’un venait à y aller, nous ne le dirions pas d’ici ", a aussi fait savoir la porte-parole du président américain.
Dans un entretien à CNN diffusé dimanche, Volodymyr Zelensky avait dit souhaiter la venue en Ukraine de Joe Biden.
" Je pense qu’il viendra ", " mais la décision lui revient, bien entendu, cela dépend de la situation sécuritaire ", a-t-il précisé. " Mais je pense qu’il est le dirigeant des Etats-Unis et pour cela, il devrait venir voir. "
La porte-parole de la Maison Blanche a par ailleurs confirmé lundi que les Etats-Unis espéraient une réouverture prochaine de leur ambassade à Kiev, sans évoquer un quelconque calendrier.
" C’est certainement notre objectif. Il est évident qu’il est important d’avoir une présence diplomatique sur place ", a déclaré Jen Psaki.
AFP