Ici Beyrouth a organisé mardi soir son premier débat autour du thème " Un président, pour quelle République ? ", avec comme intervenants le député Georges Okais, l’ancien député Farès Souhaid et l’ancien député et ministre Ahmad Fatfat. Cette initiative constitue le coup d’envoi des " Rencontres d’Ici Beyrouth ", dont le but est d’engager tous les mois un débat en profondeur, en présence de personnalités éminentes, sur un grand thème en rapport ou non avec l’actualité chaude.

Michel Touma, directeur de la rédaction d’Ici Beyrouth et modérateur du débat, a inauguré l’évènement dans la sobriété en rendant hommage à la jeunesse iranienne qui se soulève pour la liberté depuis la mort de Mahsa Amini, jeune femme de 22 ans décédée après avoir été arrêtée par la police des mœurs iranienne pour " port de vêtements inappropriés ".

L’ancien secrétaire général du 14 Mars, Farès Souhaid, a ensuite pris la parole pour dénoncer l’alliance des minorités et défendre les accords de Taëf. Affirmant que la République de Taëf doit être maintenue, M. Souhaid a expliqué en substance que cela était d’autant plus vrai qu’il serait dangereux de s’aventurer à opter pour un modèle alternatif inconnu dans ce contexte mouvementé et dominé par la mainmise du Hezbollah sur les institutions. L’ancien député a également déclaré que " la convivialité islamo-chrétienne repose sur deux piliers : la liberté et la justice " et que les atteintes portées par le Hezbollah à ces deux notions fondamentales menacent sérieusement le vivre-ensemble.

Le député Georges Okais (membre du bloc des Forces libanaises) a ensuite présenté son intervention dans laquelle il a notamment souligné qu’un président idéal exigerait immédiatement, entre autres, le désarmement du Hezbollah et la mise en place d’une lutte contre la corruption à travers deux éléments-clé : la justice et le gouvernement digital. Démontrant que le premier souhait serait difficile à réaliser sans solution internationale et qu’établir des réformes n’en est pas moins ardu tant que le Hezbollah est armé, M. Okais a appelé à un rassemblement de professionnels capables d’élaborer une loi sur la décentralisation " non pas poussée, mais aigüe ". Celle-ci aurait, dans l’esprit de ce législateur, trois niveaux :  le caza, le gouvernorat (mouhafazat), et l’État central. Pour le député Okais, une telle loi serait totalement conforme à la Constitution et particulièrement aux accords de Taëf, dont il aurait fallu sérieusement appliquer les dispositions relatives à la décentralisation dès 1990.

Enfin, si l’ancien député Ahmad Fatfat divergeait quant à l’étendue de cette décentralisation, il n’en a pas moins insisté sur l’importance cruciale d’appliquer les accords de Taëf, dont de très nombreuses dispositions ont été " jetées aux oubliettes ". À titre d’exemples, M. Fatfat a cité l’élaboration d’un Sénat (qui n’a pas eu lieu), le retrait de la présence officielle et militaire syrienne qui devait se faire dans les deux ans après la signature de l’accord et qui s’est faite 15 ans plus tard (le 26 avril 2005), mais aussi le programme de développement qui aurait permis de financer municipalités et unions de municipalités, et qui est resté lettre morte.

Le débat s’est conclu par de longs échanges des intervenants avec l’assistance. Il s’inscrit dans la profonde conviction d’Ici Beyrouth qu’il est constructif d’initier des échanges de haut niveau sur les grands dossiers qui se trouvent au cœur du débat national.