Dans un message adressé au peuple libanais à l’occasion de la fête de Noël, le patriarche maronite a mis en garde contre "un plan visant le Liban" avec pour objectif de "créer une vacance à la première magistrature conjuguée à une vacance constitutionnelle".

Le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, a mis en garde samedi contre "un plan visant le Liban". "Toutes les données politiques montrent qu’il existe un plan contre le Liban visant à créer une vacance à la première magistrature conjuguée à une vacance constitutionnelle, ce qui complique encore plus l’élection d’un président", a constaté Mgr Raï, affirmant que "la priorité est à l’élection d’un président de la République".

"Certaines parties politiques n’ont-elles pas entravé la formation d’un gouvernement avant la fin du sexennat de Michel Aoun, bien qu’elles étaient conscientes du fait que le gouvernement actuel était démissionnaire et ne peut qu’expédier les affaires courantes, ce qui n’allait pas manquer de rendre son rôle problématique?" s’est interrogé Mgr Raï, dans une allusion à peine voilée à l’attitude obstructionniste du chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil. "Un blocage délibéré de l’élection du président a été provoqué pour que le Liban soit dépourvu de tout pouvoir légal, a-t-il ajouté dans un message adressé aux Libanais à l’occasion de la fête de Noël. Nous demandons aux commanditaires de ce plan, que voulez-vous? Pourquoi voulez-vous vous venger du Liban? Pourquoi voulez-vous détruire l’État libanais?"

"Quoi qu’il en soit, la priorité reste à l’élection d’un président, a encore insisté Mgr Raï. Il n’existe pas un pays dans le monde sans président. Ceux qui empêchent l’élection d’un président pour tout le Liban empêchent la résurrection du Liban." Et d’affirmer que "le patriarcat maronite est déterminé à poursuivre son combat au Liban et auprès des communautés arabe et internationale pour accélérer" l’élection d’un chef de l’État. Mais, a-t-il souligné, "les conflits régionaux entravent ces efforts, parce que certaines parties veulent un président qui serve leurs intérêts et leur projet, et non ceux du Liban". "Ce que nous ne permettrons pas, parce que le Liban n’est pas la propriété d’une faction", a encore martelé Mgr Raï, dans une allusion au Hezbollah

Résister dans l’espérance

Mgr Raï s’en est par ailleurs pris aux hommes politiques qui ont "déçu" la population. "Notre peuple vit dans la détresse à tous les niveaux, matériel, moral et spirituel" et "en veut aux responsables politiques, notamment à ceux qui ont pillé son argent et en fassent assumer la responsabilité à d’autres, mais aussi à ceux qui privent notre État d’un président à des fins personnelles, communautaires et étrangères", a-t-il poursuivi. "Tout cela nous pousse à résister dans l’espérance", a noté Mgr Raï.

Le patriarche a par ailleurs critiqué les responsables qui laissent le peuple à son propre compte, alors que la crise économique ne fait qu’empirer. "L’enquête dans l’explosion au port" de Beyrouth, le 4 août 2020, "attend l’appareil judiciaire, et la justice attend la fin des tiraillements politiques et sectaires", a-t-il dénoncé. Et de poursuivre: "Un crime politique a été commis dans le village du Liban-Sud, al-Aqabiya, et un Casque bleu irlandais a été assassiné, comme s’il s’agissait d’un incident isolé. Dans les prisons libanaises, des détenus des différentes communautés attendent d’être jugés et dans les tribunaux des dossiers sont empilés depuis des années, alors les juges font la grève et les responsables politiques n’en ont cure."

Pour le patriarche, la crise actuelle qu’endurent les Libanais est "différente des précédentes", en ce sens qu’elle puise sa source en dehors du Liban et de la légalité. "Ceux qui rejettent le système, l’identité et les spécificités du Liban ne présentent aucun projet constitutionnel qui dévoile leurs intentions", a lancé Mgr Raï. Et de conclure: "Les informations rapportées au sujet de leur projet ne sont pas conformes aux composantes libanaises et ne tiennent compte que de leurs propres intérêts. Aucune partie n’a présenté un projet national plus propice que le projet libanais. Si nous insistons pour la tenue d’une conférence internationale pour le Liban sous le parrainage des Nations unies et les pays amis, c’est pour garder le Liban à l’abri des conflits armés, mais aussi parce que nous avons perdu espoir dans les responsables libanais."