Des centaines de manifestants se sont rassemblés jeudi matin devant le Palais de justice, alors que le Conseil supérieur de la magistrature tient une réunion consacrée aux tiraillements et divergences au sein de l’appareil judiciaire. Ce rassemblement, auquel ont appelé les familles des victimes de l’explosion au port de Beyrouth, le 4 août 2020, intervient au lendemain de la remise en liberté des 17 détenus dans l’affaire de l’explosion par le procureur de la République, Ghassan Oueidate.

Les manifestants ont réitéré leur soutien à Tarek Bitar, chargé d’instruire le dossier de l’enquête sur l’explosion, qui fait l’objet de poursuites judiciaires engagées contre lui par M. Oueidate. Les manifestants ont également dénoncé la mainmise du Hezbollah sur la justice.

Certains députés dits du changement, des Forces libanaises (FL) et du parti Kataëb se sont réunis au Palais de justice avec le ministre sortant de la Justice, Henri Khoury, à qui ils ont demandé d’intervenir à la lumière du chaos judiciaire qui frappe le pays de plein fouet. Par ailleurs, certains députés ont été molestés par les gardes du corps de M. Khoury.

Le député de Zghorta et candidat à la présidentielle, Michel Moawad, a réitéré son soutien "à la seule cause sacrée dans ce pays, celle du pouvoir judiciaire". Il a dénoncé "le système d’impunité qui conduit à davantage de répressions et à l’émergence d’un État policier".

De son côté, le député FL de Zahlé, Georges Okais, a souligné que "certains partis politiques manipulent la justice pour paralyser ce qui reste des institutions". "Seul le juge d’instruction Tarek Bitar est en charge du dossier de l’enquête sur l’explosion au port de Beyrouth", a-t-il insisté, soulignant que "les juges qui interfèrent dans ce dossier enfreignent la loi". "Le Hezbollah et le Courant patriotique libre (CPL) cherchent à entraver le cours de l’enquête. Ils ont peur que la vérité ne soit dévoilée", a encore dénoncé M. Okais.

"Nous avons le rôle et le devoir de nous tenir aux côtés des familles des victimes, sinon les milices continueront à imposer leur diktat sur le pays", a signalé le député Mark Daou. Le député Melhem Khalaf, ancien bâtonnier de Beyrouth, a appelé "les autorités religieuses à intervenir dans l’immédiat pour sauver les Libanais de cette situation lamentable". Le député de Beyrouth a interrompu jeudi le sit-in qu’il observait avec des collègues au Parlement pour protester contre la non-élection d’un président de la République. "Le Liban est entre les mains de dictatures confessionnelles, où la loi n’est pas appliquée", a-t-il martelé, soulignant que les deux entités favorables à ces dictatures sont "un juge et un responsable de la sécurité".