Le français au Liban est-il à son crépuscule? Faut-il tirer la sonnette d’alarme? Le français connaît-il un déclin face à la conquête de l’anglais? S’agit-il d’une relation de complémentarité ou plutôt de concurrence? Des questions que tout le monde se pose et qui suscitent un vaste débat au sein de la société libanaise. Ce qui est certain, c’est que le français n’a pas le même statut dans toutes les régions du Liban.
Au Liban-Sud, à Nabatiyeh et à Marjeyoun, le français est une langue secondaire qu’on apprend et qu’on utilise dans les établissements scolaires et au sein de l’Institut français de Nabatiyeh qui travaille pour la promotion de la langue et de la culture françaises à travers une série de services éducatifs et culturels. Durant le mois de la francophonie, l’Institut apporte sa pierre à l’édifice en organisant des événements culturels, des ateliers, des conférences, des expositions, des concours en ligne, des activités dans les écoles… Le français est considéré comme une bouffée d’oxygène dans une région où l’espace culturel est en constante régression.
Cependant, le français est en nette décroissance dans tous les domaines de la vie, surtout dans l’éducation. La majorité des élèves au Sud préfèrent suivre leur apprentissage en anglais plutôt qu’en français en raison de l’expansion mondiale de l’anglais devenu un moyen de communication global dans le domaine des affaires mais également sur les réseaux sociaux. Ces élèves estiment que l’anglais a un statut plus élevé que le français ou l’arabe car cette langue leur permet d’obtenir de meilleurs emplois au Liban et dans le monde.
Certains renoncent de plus en plus à poursuivre leurs études en français et choisissent les établissements anglophones parce que l’anglais est plus facile, les diplômes plus accessibles et les débouchés plus sûrs. De même, les élèves des écoles anglophones ne consacrent pas beaucoup de temps et d’énergie à l’étude du français. Nous assistons bel et bien à un duel franco-anglais.
Des classes francophones fermées
Ce recul du nombre d’élèves scolarisés dans les écoles et lycées francophones du Sud pousse les proviseurs et les directeurs des lycées à ouvrir des classes anglophones à la demande, sans cesse croissante, des parents et des élèves. L’apprentissage du français devient minoritaire dans l’enseignement primaire et secondaire au Sud du Liban. Tel est le cas de l’école Al-Mabarrat (École Issa Ibn Mariam) où les classes francophones ont été fermées dans le cycle préscolaire et secondaire; il ne reste que le cycle primaire et complémentaire où le nombre d’élèves francophones est en nette baisse. Le cas de cette école n’est pas unique, d’autres collèges et lycées se convertissent totalement à l’anglais, même dans le secteur public.
Cette orientation a trois principales raisons, selon l’un des parents qui a résumé la situation du français comme suit: l’attirance des jeunes pour la langue anglaise, l’importance de cette langue dans le monde professionnel et l’ouverture d’universités anglophones aux scolarités relativement abordables et sans conditions d’entrée.
Selon la mère d’un lycéen, «le français est difficile et ceci se répercute dans les résultats des élèves aux examens officiels du baccalauréat; les anglophones obtiennent des notes plus élevées que les francophones parce que les épreuves écrites en anglais exigent moins de compétences langagières que celles en français, ce qui crée un décalage dans le taux de réussite». Des parents choisissent de faciliter la tâche à leurs enfants en les scolarisant dans des établissements anglophones, renonçant ainsi à la difficulté de la langue française. Par conséquent, les cours en français sont désertés alors que ceux en anglais font salle comble.
Le déclin du français est-il inéluctable?
La francophonie continue d’assurer une belle résistance. Certains parents attachés au trilinguisme continuent de scolariser leurs enfants dans des écoles francophones pour leur permettre d’acquérir un niveau culturel et linguistique en français. Cette progression, remarquée depuis une vingtaine d’années au sein de la communauté chiite, a été favorisée par le retour massif des chiites émigrés en Afrique francophone.
Cette tranche de la population est constituée des vrais francophones au pouvoir d’achat élevé qui recherchent des établissements adéquats (Collège des Sœurs Antonines à Nabatiyeh, Lycée français de Habboush, Collège des Saints-Cœurs à Marjeyoun) pour favoriser l’éducation et le futur professionnel de leurs enfants. Cette communauté a acquis des postes dans le secteur public et privé où l’apprentissage du français est un moyen d’ascension sociale.
Pourquoi choisir le français comme langue d’éducation? Ce parent d’une élève en cycle complémentaire «veut donner la même chance à ses enfants de baigner dans la culture française et d’être trilingues». L’attachement des familles libanaises francophones à ce système scolaire présente encore une opportunité dans cette région. Le Collège des Sœurs des Saints-Cœurs à Marjeyoun, reconnu pour son niveau d’excellence et qui scolarise 300 à 400 élèves francophones, dispense un bon pourcentage d’heures en anglais, langue qui occupe une place importante dans l’emploi du temps des élèves.
Le trilinguisme, un atout
Selon Sœur Hiam Habib, directrice du collège, «cette concurrence ne mettra pas en danger l’identité francophone de l’institution qui revendique fort son trilinguisme qui est un atout». Elle cite le témoignage d’un parent d’élève «qui demande à protéger et honorer la langue française parce qu’elle est un bien précieux et qu’elle donne toutes les chances de réussite à ses enfants même si, dans son entourage, plus personne n’utilise le français». Il considère cette langue comme un nouvel horizon et un passeport pour un avenir meilleur. «Tout est compliqué», ajoute un professeur de français du Lycée public de Khiyam, «les professeurs doivent faire preuve de courage pour surmonter les défis afin d’ancrer l’apprentissage du français dans cette région, ce qui n’est pas simple». Yara, une élève en baccalauréat, inscrite au Lycée public de Marjeyoun, affirme que le français l’a aidée à renforcer sa personnalité; elle rêve d’aller en France pour poursuivre ses études universitaires et de revenir au Liban pour appliquer ce qu’elle a appris. Cela annonce un avenir optimiste, où les jeunes veulent prendre le meilleur des deux cultures, des deux mondes, pour édifier un pays à l’atmosphère plus respirable.
Comment se dessine le futur francophone au Liban et surtout au Sud? La francophonie est ancrée dans la vie des Libanais. Sans entrer dans les chiffres et les pourcentages de la francophonie au niveau scolaire et universitaire, il ne fait aucun doute que le français est une langue aimée par les Libanais francophones et même par ceux qui ne le sont pas. Nous devons défendre la francophonie avec acharnement. Les Libanais ont toujours été d’ardents bâtisseurs de la francophonie et en resteront les fervents défenseurs.
Au Liban-Sud, à Nabatiyeh et à Marjeyoun, le français est une langue secondaire qu’on apprend et qu’on utilise dans les établissements scolaires et au sein de l’Institut français de Nabatiyeh qui travaille pour la promotion de la langue et de la culture françaises à travers une série de services éducatifs et culturels. Durant le mois de la francophonie, l’Institut apporte sa pierre à l’édifice en organisant des événements culturels, des ateliers, des conférences, des expositions, des concours en ligne, des activités dans les écoles… Le français est considéré comme une bouffée d’oxygène dans une région où l’espace culturel est en constante régression.
Cependant, le français est en nette décroissance dans tous les domaines de la vie, surtout dans l’éducation. La majorité des élèves au Sud préfèrent suivre leur apprentissage en anglais plutôt qu’en français en raison de l’expansion mondiale de l’anglais devenu un moyen de communication global dans le domaine des affaires mais également sur les réseaux sociaux. Ces élèves estiment que l’anglais a un statut plus élevé que le français ou l’arabe car cette langue leur permet d’obtenir de meilleurs emplois au Liban et dans le monde.
Certains renoncent de plus en plus à poursuivre leurs études en français et choisissent les établissements anglophones parce que l’anglais est plus facile, les diplômes plus accessibles et les débouchés plus sûrs. De même, les élèves des écoles anglophones ne consacrent pas beaucoup de temps et d’énergie à l’étude du français. Nous assistons bel et bien à un duel franco-anglais.
Des classes francophones fermées
Ce recul du nombre d’élèves scolarisés dans les écoles et lycées francophones du Sud pousse les proviseurs et les directeurs des lycées à ouvrir des classes anglophones à la demande, sans cesse croissante, des parents et des élèves. L’apprentissage du français devient minoritaire dans l’enseignement primaire et secondaire au Sud du Liban. Tel est le cas de l’école Al-Mabarrat (École Issa Ibn Mariam) où les classes francophones ont été fermées dans le cycle préscolaire et secondaire; il ne reste que le cycle primaire et complémentaire où le nombre d’élèves francophones est en nette baisse. Le cas de cette école n’est pas unique, d’autres collèges et lycées se convertissent totalement à l’anglais, même dans le secteur public.
Cette orientation a trois principales raisons, selon l’un des parents qui a résumé la situation du français comme suit: l’attirance des jeunes pour la langue anglaise, l’importance de cette langue dans le monde professionnel et l’ouverture d’universités anglophones aux scolarités relativement abordables et sans conditions d’entrée.
Selon la mère d’un lycéen, «le français est difficile et ceci se répercute dans les résultats des élèves aux examens officiels du baccalauréat; les anglophones obtiennent des notes plus élevées que les francophones parce que les épreuves écrites en anglais exigent moins de compétences langagières que celles en français, ce qui crée un décalage dans le taux de réussite». Des parents choisissent de faciliter la tâche à leurs enfants en les scolarisant dans des établissements anglophones, renonçant ainsi à la difficulté de la langue française. Par conséquent, les cours en français sont désertés alors que ceux en anglais font salle comble.
Le déclin du français est-il inéluctable?
La francophonie continue d’assurer une belle résistance. Certains parents attachés au trilinguisme continuent de scolariser leurs enfants dans des écoles francophones pour leur permettre d’acquérir un niveau culturel et linguistique en français. Cette progression, remarquée depuis une vingtaine d’années au sein de la communauté chiite, a été favorisée par le retour massif des chiites émigrés en Afrique francophone.
Cette tranche de la population est constituée des vrais francophones au pouvoir d’achat élevé qui recherchent des établissements adéquats (Collège des Sœurs Antonines à Nabatiyeh, Lycée français de Habboush, Collège des Saints-Cœurs à Marjeyoun) pour favoriser l’éducation et le futur professionnel de leurs enfants. Cette communauté a acquis des postes dans le secteur public et privé où l’apprentissage du français est un moyen d’ascension sociale.
Pourquoi choisir le français comme langue d’éducation? Ce parent d’une élève en cycle complémentaire «veut donner la même chance à ses enfants de baigner dans la culture française et d’être trilingues». L’attachement des familles libanaises francophones à ce système scolaire présente encore une opportunité dans cette région. Le Collège des Sœurs des Saints-Cœurs à Marjeyoun, reconnu pour son niveau d’excellence et qui scolarise 300 à 400 élèves francophones, dispense un bon pourcentage d’heures en anglais, langue qui occupe une place importante dans l’emploi du temps des élèves.
Le trilinguisme, un atout
Selon Sœur Hiam Habib, directrice du collège, «cette concurrence ne mettra pas en danger l’identité francophone de l’institution qui revendique fort son trilinguisme qui est un atout». Elle cite le témoignage d’un parent d’élève «qui demande à protéger et honorer la langue française parce qu’elle est un bien précieux et qu’elle donne toutes les chances de réussite à ses enfants même si, dans son entourage, plus personne n’utilise le français». Il considère cette langue comme un nouvel horizon et un passeport pour un avenir meilleur. «Tout est compliqué», ajoute un professeur de français du Lycée public de Khiyam, «les professeurs doivent faire preuve de courage pour surmonter les défis afin d’ancrer l’apprentissage du français dans cette région, ce qui n’est pas simple». Yara, une élève en baccalauréat, inscrite au Lycée public de Marjeyoun, affirme que le français l’a aidée à renforcer sa personnalité; elle rêve d’aller en France pour poursuivre ses études universitaires et de revenir au Liban pour appliquer ce qu’elle a appris. Cela annonce un avenir optimiste, où les jeunes veulent prendre le meilleur des deux cultures, des deux mondes, pour édifier un pays à l’atmosphère plus respirable.
Comment se dessine le futur francophone au Liban et surtout au Sud? La francophonie est ancrée dans la vie des Libanais. Sans entrer dans les chiffres et les pourcentages de la francophonie au niveau scolaire et universitaire, il ne fait aucun doute que le français est une langue aimée par les Libanais francophones et même par ceux qui ne le sont pas. Nous devons défendre la francophonie avec acharnement. Les Libanais ont toujours été d’ardents bâtisseurs de la francophonie et en resteront les fervents défenseurs.
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