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Au lendemain du lancement de l’opération "Déluge d’Al-Aqsa" par le Hamas contre Israël, samedi, les Libanais gardent les yeux rivés sur les développements inédits dans la bande de Gaza, craignant que le Liban ne soit rattrapé par le cycle de violence.

Les échanges de tirs qui ont lieu entre le Hezbollah et Israël à Chebaa dimanche matin ont renforcé ces craintes.

"Il y a sûrement un risque d’escalade au Liban", estime Farès Souhaid, président du Conseil national pour la levée de l’occupation iranienne au Liban, relevant toutefois que le Hezbollah et l’Iran ne semblent pas avoir jugé nécessaire pour l’instant que le Liban entre dans la bataille.

"Le pays est à découvert", souligne M. Souhaid à Ici Beyrouth, notant une grande différence entre la situation politique aujourd’hui au Liban et celle qui a prévalu en 2006.

"Lorsque le Hezbollah avait enlevé, à la frontière sud, deux soldats israéliens en juillet 2006, déclenchant une guerre avec Israël, il y avait au Liban un président de la République et il y avait surtout le gouvernement de Fouad Siniora, auquel le Hezbollah participait et qui se réunissait tous les soirs au Sérail pour prendre des décisions", rappelle l’ancien député.

Il précise dans ce cadre que c’est le gouvernement Siniora qui avait à l’époque coordonné avec les parties internationales jusqu’au vote de la résolution 1701 de l’ONU et la fin des actions de violence.

"Aujourd’hui, le pays est à découvert, sans président, sans véritable gouvernement et la seule partie qui décide du sort du Liban est le Hezbollah, qui est dans le giron iranien", explique M. Souhaid, qui appelle les hommes politiques, la société civile et les médias "à créer un climat défavorable à toute aventure que le Hezbollah ou l’Iran s’apprêterait à lancer à partir du Liban".

Dynamique de dialogue régionale

Pour M. Souhaid, la région se trouve actuellement à un grand tournant et chaque pays tente d’affiner sa position.

"Israël a commencé à améliorer ses relations avec le monde arabe et a établi récemment des relations diplomatiques avec le Maroc et les Émirats arabes unis ", souligne-t-il, ajoutant: "Israël continue à négocier, par l’intermédiaire des États-Unis, avec l’Arabie saoudite, le pays arabe et musulman le plus important dans la région. Il est clair qu’une entente saoudo-israélienne changera toute la donne."

Selon l’ancien secrétaire général du 14 Mars, "l’Iran essaie de s’assurer une place dans cette dynamique de dialogue régionale, surtout que Téhéran est dans une situation de faiblesse, en raison des mouvements internes de protestation et des sanctions économiques".

La place, dans cette dynamique, échappe cependant toujours à l’Iran, "même si Téhéran a mis la main sur quatre pays arabes, à savoir le Yémen, l’Irak, la Syrie et le Liban, et intervient au niveau palestinien", selon M. Souhaid.

"L’Iran a usé de tous les moyens: il a contribué à délimiter les frontières maritimes entre le Liban et Israël par le biais du Hezbollah, il s’est présenté comme le garant du forage offshore dans le bloc 9, il a essayé de garder en main la carte maîtresse au niveau de la présidence de la République, il maintient Bachar el-Assad à la tête de la Syrie, il est présent en Irak, au Yémen, à Jenine et dans le camp palestinien de Aïn el-Héloué, mais tout cela n’a pas suffi", ajoute-t-il.

L’enjeu Gaza

C’est pour cette raison que ce qui se passe à Gaza représente un enjeu de taille pour l’Iran. "Le Hamas n’est pas une organisation pro-iranienne, mais Téhéran a une influence sur ce mouvement palestinien. Aussi, toute action menée par le Hamas peut aboutir à une amélioration des conditions de négociations de l’Iran", souligne M. Souhaid.

À ses yeux, "les grandes pertes infligées par le Hamas à Israël font que le Hezbollah et l’Iran n’ont pas encore jugé nécessaire d’impliquer le Liban dans la bataille". "Mais le Hezbollah reste aux aguets", avertit-il.

Selon M. Souhaid, l’escalade extrême de violence entre Israël et Hamas entraînera le vote, en Conseil de sécurité, d’une résolution semblable à la 1701. Le cas échéant, "le Hamas sera le champion de la victoire diplomatique et se consacrera comme l’unique interlocuteur palestinien, à la place de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), qui sortira affaiblie de la bataille", prévoit l’ancien député de Jbeil. Parallèlement, toujours selon son analyse, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, sortira également renforcé, car il aura eu recours à une grande violence.

Quant à l’Iran, il profitera également de la situation, selon lui, car il "aura amélioré ses conditions de négociation avec les États-Unis".

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