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Le tintamarre du régime iranien cachait en réalité l’anxiété et les incertitudes d’un régime aux abois qui n’a plus d’autre issue à ses crises enchevêtrées que d’étendre le feu à l’ensemble du Moyen-Orient. La déclaration de guerre du 7 octobre 2023 et ses effets désastreux ont mis à nu le caractère fallacieux de ses engagements auprès de ses proxies (Hamas, Hezbollah et consorts), l’inaptitude de son logiciel guerrier, les fragilités structurelles d’un régime politico-religieux entièrement délégitimé, les inconséquences des présumées alliances stratégiques avec les nouveaux acteurs de la guerre froide, l’isolement sur la scène internationale et les condamnations conjuguées des démocraties occidentales et de l’ONU. Ses illusions optiques sont notoires surtout lorsqu’il essayait de se projeter à partir de conflits mal conçus et mal gérés.

Sur les trois cents missiles lancés sur l’ensemble du territoire israélien, 99/100 ont été interceptés ou sont tombés en territoire jordanien. En contrepartie, ses mandataires (le Hamas et le Hezbollah) poursuivent des combats aussi futiles que meurtriers qui ont mené à la ruine de Gaza, à la destruction des villages frontaliers du Liban-Sud et à la désolidarisation des populations civiles qui ont eu à subir les conséquences dévastatrices des entreprises guerrières des six derniers mois. Les impasses du Hamas sont désormais évidentes, alors que le Hezbollah n’a plus que le recours habituel au terrorisme aveugle pour exorciser le rejet dont il est l’objet. Le régime iranien n’a d’autre entrée en scènes régionales et internationales que les stratégies emboîtées de la terreur, du chaos institutionnalisé, des conflits gelés et des guerres civiles.

La destruction du quartier général des Gardiens de la révolution qui pilotent la politique de subversion au Proche-Orient était l’épreuve de vérité qui permettait de tester la crédibilité des projections militaires iraniennes et leurs limites. Les limites avérées sont la contrepartie d’une stratégie d’endiguement adroitement mise au point par les États Unis, la Grande Bretagne et la France. Les Israéliens ont associé la stratégie du dôme de fer à la politique du "containment" minutieusement ficelée par l’alliance tripartite en vue de défaire la toile d’araignée tissée par l’Iran. Les dernières évolutions vont infléchir la dynamique des conflits en cours, tant au niveau politique que militaire. Les Israéliens sont tenus de changer leur parcours vers plus de coordination avec l’alliance, ce qui en d’autres termes implique un changement de cabinet au profit d’une coalition libérée des hypothèques posées par les extrémistes religieux et ultra-nationalistes.

La guerre va se poursuivre et va devoir gérer les aléas humanitaires et sécuritaires de manière symétrique, en vue de changer la donne stratégique et d’ouvrir la voie à des conversions politiques majeures de part et d’autre. Sinon, le Hamas devrait capituler afin de mettre fin aux souffrances de la population civile qui ne peut plus payer de son sang le prix d’une violence qu’elle ne fait que subir. Le chemin des conflits ouverts est aporétique et désastreux, la perpétuation des visions nihilistes et le maintien des extrémistes font partie des obstacles majeurs à balayer. Quant aux Palestiniens, il est grand temps de se doter d’une plateforme politique consensuelle et cohérente, de réengager le processus de paix sur la base des résolutions internationales et de mettre un terme à l’ère des dépendances alternées. Or, pour ce faire, le partenariat avec les Israéliens et la réhabilitation des médiations internationales sont des voies incontournables.

Le Liban, à son tour, ne peut plus s’accommoder de l’extraterritorialité du Hezbollah et de ses acolytes islamistes (libanais et palestiniens), du rapport discrétionnaire aux résolutions internationales et de l’annexion de l’État libanais à la stratégie de subversion à double détente. Autrement, la guerre avec le Hezbollah est irrémédiable. La politique manœuvrière du Hezbollah devrait être déjouée et neutralisée au bénéfice d’une réhabilitation inconditionnelle de la souveraineté libanaise, de l’État de droit et de la culture politique consociative. Les retournements politiques à venir devraient impulser de nouvelles dynamiques en vue de casser la politique de blocage du Hezbollah et de ses satellites, de redonner à la vie politique libanaise son autonomie et aux institutions d’État leur prégnance. Il est inconcevable, dorénavant, de céder au diktat du Hezbollah et consorts qui a battu en brèche toutes les règles de la civilité citoyenne au profit d’une stratégie de subversion qui opère à l’intersection d’une politique de domination et de criminalité organisée.

La réaction unanime de la communauté internationale à l’endroit de l’attaque des territoires israéliens est doublement symptomatique: le refus de toute politique de déstabilisation qui remet en question les règles de la vie internationale et met en péril la paix; le caractère illusoire de la notion du Sud global et l’incapacité de ses acteurs à pouvoir imposer un contre-ordre et une nouvelle normativité; le rôle incontournable des démocraties occidentales et des pays de l’Otan dans les médiations internationales et la recherche de solutions négociées aux conflits en cours. L’ennui avec le régime iranien est dû à son inaptitude à la normalisation, aux réformes structurelles et au renoncement à la violence pour des raisons aussi bien idéologiques que politiques. Le rétablissement des rapports de force est la voie obligée pour mettre fin au régime de terreur, rendre possible le changement politique impératif que revendiquent les Iraniens, sortir l’Iran de son isolement imposé et lui redonner sa place dans le concert des nations.

Autrement, l’endiguement du régime iranien de manière frontale est préjudiciel à toute normalisation sur le plan régional, au changement des paradigmes socio-politiques et religieux et à l’émergence de l’Iran post-islamiste et réformiste qui viendrait relayer les réformismes sunnites en cours en Arabie saoudite et dans les Émirats arabes unis. La phase post-islamiste, démocratique et entièrement axée sur les enjeux de la démocratisation, du pluralisme et du développement étant l’étape ultime de cette mutation paradigmatique. La destruction du quartier général des Gardiens de la révolution a réussi à dévoiler la trame fallacieuse de la politique iranienne et à mettre le régime iranien face à l’épreuve de ses limites.

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