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Dans le cadre du tollé découlant de la présence massive de migrants et déplacés syriens au Liban, l’exacerbation récente de la criminalité impliquant des Syriens est venue accroître les tensions entre ces derniers et leurs hôtes libanais.

Le dernier de ces crimes s’est produit dimanche. Des adolescents syriens ont poignardé un garçon libanais, Y. Abi Aad, qui a été blessé au coude, à la main et au cou.

Selon le rapport d’enquête, les assaillants, âgés de 13 et 15 ans, ont tenté de voler le petit Abi Aad sur un terrain de basketball à Furn el-Chebbak. Les habitants ont capturé deux des agresseurs et les ont remis aux forces de sécurité, tandis que le troisième a réussi à s’échapper.

Samedi, à l’hôtel Universal residence à Beyrouth, une Libanaise de 30 ans est décédée d’une hémorragie cérébrale après avoir été agressée et rouée de coups par un collègue syrien qui a disparu depuis.

Un mois plus tôt, un responsable du parti des Forces libanaises, Pascal Sleiman, a été tué par des Syriens dans une prétendue affaire de vol de voiture. Le corps de Sleiman avait été transporté en Syrie et abandonné non loin de la frontière avec le Liban. L’incident a déclenché une vague de condamnations et d’appels au rapatriement des Syriens illégalement installés au Liban.

Un autre crime commis dans le quartier d’Achrafieh à Beyrouth avait accentué l’hostilité à l’égard de ces derniers. Un homme âgé et handicapé avait été tué et sa femme avait été battue par deux individus qui, avec la complicité de la femme de ménage, également de nationalité syrienne, voulaient dévaliser leur appartement.

Quelques jours plus tard, Yasser al-Kokash, un résident libanais de la ville d’Al-Azzounieh dans le district de Aley au Mont Liban, est décédé après avoir été attaqué par trois ressortissants syriens qui ont cambriolé son appartement.

Dans un pays où les conditions sécuritaires sont précaires et où l’État est aux abonnés absents, la multiplication des crimes dans lesquels des Syriens sont impliqués ne fait qu’alimenter la colère des Libanais.

Le ministre sortant de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui, avait déclaré, lors d’une conférence de presse, tenue le 1ᵉʳ mai, que 30% des crimes commis au Liban sont perpétrés par des Syriens, mettant à rude épreuve les ressources de l’État.

De sources proches du ministère de l’Intérieur, on indique à Ici Beyrouth que ce département suit de très près la situation sur le terrain et appliquera à la lettre les lois libanaises concernant les Syriens en situation illégale dans le pays.

Beyrouth estime le nombre de migrants syriens sur son territoire à plus de deux millions, dont une partie seulement avait fui la guerre de 2011 dans son pays. Les autres, qui constituent une majorité, sont installés au Liban pour des raisons économiques. Beaucoup entrent dans le pays à travers les frontières poreuses.

Youssef Diab, journaliste accrédité auprès du Palais de Justice, attribue l’augmentation des crimes commis par des Syriens à "l’absence de l’État et de son autorité". Dans un entretien accordé à Ici Beyrouth, M. Diab cite un déclin des capacités des forces de sécurité à lutter efficacement contre la criminalité et met en relief le manque de réglementations pour traiter sérieusement le problème des migrants, notamment ceux qui exercent des métiers sans papiers.

Il constate également un déclin au niveau de l’efficacité du système judiciaire, qui fonctionne, selon lui, à seulement 20 à 30% de sa capacité en raison de la crise en cours, compliquant ainsi les procédures juridiques.

Youssef Diab avertit que la non-mise en œuvre d’une solution globale pourrait aggraver les problèmes déjà existants. "Cela nécessite une action urgente de la part de l’État pour rétablir son autorité, réguler la présence étrangère au Liban et adopter une approche plus robuste pour lutter contre la criminalité", ajoute-t-il.