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Au Liban-sud, la population suit avec inquiétude les développements militaires qui s’accélèrent depuis mardi au Liban. Les deux vagues d’explosions d’appareils de transmission du Hezbollah, mardi et mercredi, ont effrayé de manière générale les Libanais qui redoutent les conséquences de cette nouvelle escalade. Le raid israélien de vendredi sur la banlieue sud a accentué ces craintes, d’autant qu’un haut responsable militaire du Hezbollah a été tué. La population libanaise retient son souffle. Celle du sud du pays en particulier, surtout qu’elle subit depuis plus de onze mois les échanges de tirs entre le Hezbollah et Israël, dans la région frontalière.

"Les bombardements se sont intensifiés jeudi soir, à la suite du discours de Hassan Nasrallah", confie à Ici Beyrouth Mona, qui n’a pas quitté Marjeyoun depuis l’ouverture du front sud, le 8 octobre dernier.

Le Hezbollah avait lancé plusieurs salves de roquettes en début de soirée contre le nord d’Israël. L’armée israélienne a riposté en menant une série de raids, détruisant une trentaine de rampes de lancement du Hezbollah.

"Plus de 60 frappes israéliennes ont été signalées, mais toujours dans les mêmes zones précédemment ciblées, telles que Kfar Kila et Odaisseh, ainsi que du côté de Jezzine et du Litani", poursuit-elle. Une précision pour dire que l’escalade des derniers jours n’a pas entraîné un changement au niveau du terrain dans la partie méridionale du pays. Ce qui, pour les habitants du sud, est un signe rassurant.

Habitués des guerres entre le Hezbollah et Israël, ceux qui sont restés dans leurs villages ont justement appris à interpréter les signes. Ils ont également développé un modus vivendi qui les met à l’abri d’attaques israéliennes. "Il ne faut surtout pas s’approcher de la frontière en ce temps de guerre ou encore adopter un comportement inhabituel qui risque de hérisser et de provoquer les Israéliens", confie un habitant de Khiam, qui laisse ainsi entendre que les Israéliens connaissent de leur côté les habitudes des habitants des villages dans leur ligne de mire.

Les explosions de bipeurs et de talkie-walkies n’ont pas été très nombreuses à Marjeyoun ou dans d’autres villages frontaliers, selon Mona. Mais la jeune femme reconnaît que les habitants ressentent, comme partout ailleurs dans le pays, une grande inquiétude quant à la phase qui suivra.

Pas au point de quitter leurs villages, cependant. Les familles qui restent quand même dans les localités du sud le font pour plusieurs raisons.

Certains tiennent à scolariser leurs enfants, comme à Marjeyoun où les établissements du secteur privé ont ouvert leurs portes mardi. Une option accueillie favorablement par les élèves qui préfèrent l’enseignement à l’école à celui en ligne, d’après Mona.

L’hiver dernier, les établissements scolaires ont gardé leurs portes fermées et les écoliers ont dû faire face à de nombreux problèmes liés aux cours dispensés en ligne, dont celui des aléas de la connexion Internet.

D’autres habitants du Sud continuent de cultiver leurs terres et d’élever leur bétail, tout en prenant leurs précautions, comme à Khiam. "Il suffit que les bergers ne s’approchent pas trop de la frontière, sinon, on leur tire dessus", précise un berger du village.

Pour Wassim, résidant à Hebbariyé, il n’y a pas eu, jusque-là, de changement au niveau de l’étendue géographique des bombardements israéliens.

"D’une manière générale, ce sont les mêmes villages qui sont visés. Il s’agit de régions déjà désertées, qui abritent à présent des positions du Hezbollah", explique-t-il.

Même si les efforts pour un règlement diplomatique à la frontière libano-israélienne continuent de s’enliser, la stratégie suivie par les Libanais du sud demeure celle du wait and see.